• Le 28 mai 2008

    Sommes-nous devenus INUTILES ? Ce sera la question à laquelle il faudra tenter de répondre au Café Philo d’Ivry de vendredi. Je n’y participerai pas cette fois, donc je pourrais ne pas me la poser, et m’en laver les mains, comme Ponce Pilate ! Mais elle est écrite dans ma tête et je sens que, comme elle ne s’en va pas, je vais pondre une réponse, même en méandres farfelus.

    Déjà, cela commence : l’image de Ponce Pilate flotte encore devant mes yeux. Ce dernier a peut-être été un peu mal jugé, c’est l’impression que j’en ai. En effet, il avait interrogé le trublion Jésus et, selon les réponses obtenues, il se grattait bien la tête et ne voyait pas ce qu’on reprochait à cet individu. « Mais cet homme n’a rien fait ! », c’était ce qu’il avait conclu et c’est-ce que j’ai retenu. Si mes souvenirs sont bons, Ponce Pilate venait d’être catapulté en Galilée, loin des siens. Il ne voulait pas contrarier les habitants du coin et il sentait la pression de Rome pour faire régner l’ordre, alors … il a laissé faire. Imaginons qu’il ait empêché la mise à mort de Jésus, mais je suis pas Dan Brown ! Alors, à mon avis (humble, je ne suis pas sûre de l’être ici !), son intervention aurait sans doute été INUTILE, ce n’aurait été que partie remise car : Jésus d’un côté dérangeait trop ; de l’autre côté, il semblait tellement convaincu qu’il devait mourir pour sauver l’humanité de ses pêchés qu’il serait allé tout seul au sacrifice.


    Ce n’étaient pas des temps marrants, la violence était brute, les corps des condamnés étaient exposés cloués en croix. Jésus au milieu de tout cela ne semblait pas très UTILE, il ne voulait pas faire de politique, il ne voulait pas se battre, il ne faisait que parler mais ses paroles captivaient les foules, il diffusait son message d’amour et de partage, grande nouveauté … En marge de ce message originel chrétien, dans un contexte non religieux, il m’a été suggéré de lire les écrits du philosophe « montant » slovène Slavoj Zizec et je vais m’y mettre car j’augure que je vais pouvoir creuser dans une matière intéressante !


    Mais, de fil en aiguille, je repense à l’entrée de Jésus dans Jérusalem avec ses disciples, où il savait ne pas être le bienvenu. Malgré l’horreur qui l’attendait, un épisode plutôt cocasse eut lieu. La prophétie disait que le sauveur ferait son entrée dans Jérusalem à dos d’âne. Or, Jésus et ses compagnons n’avaient pas d’âne sous la main. Ils sont tombés sur un brave paysan qui passait avec une ânesse et son petit. Le paysan ne voulait pas leur vendre son ânesse, elle lui était UTILE ! Il a fini par céder, on lui a acheté l’ânesse et … son petit (eh bien oui, ils n’auraient pas séparés les deux !). Jésus est donc monté sur l’ânesse et le petit suivait, ainsi que les disciples. J’espère que l’ânesse et son petit ont eu longue vie, ils la méritaient, pour avoir aidé Jésus à accomplir la tâche qu’il s’était imposée, menant au sacrifice UTILE à l’humanité.


    Tout ceci pour avouer que je ne m’en lave pas les mains. C’est une question qui trotte en permanence dans ma tête, comme chez tous les quinquas en recherche d’emploi. UTILE ? On peut l’être tant qu’on est valide, on peut faire du bénévolat. Je connais des retraités qui se dépensent sans compter. Mais il faut pour cela assurer ses arrières, sinon c’est du bénévolat des autres qu’on aura besoin ! Qu’ai-je vu défiler sur mon ordi, pour les offres d’emploi correspondant à mon « profil » ? Des emplois loin, très loin de chez moi. Mon profil a d’ailleurs été redéfini et en juin quelque chose se passera. Mais ici, je me sens UTILE, je compte pour mes proches, je me suis assez expatriée sans hésiter dans ma vie comme cela, maintenant je n’hésite pas, je ne veux pas ! Mes proches sont tout pour moi aussi, le temps est compté, donc je resterai là et … cela viendra.


    UTILES ? Les Cafés Philo, les Débats d’idées le sont sans conteste pour moi. Utiles à la pensée pour lui éviter de tourner en rond. Les animateurs le font bénévolement, justement. Le doute doit les prendre sûrement, et la lassitude quelquefois. L’engouement du début semble se tasser, les participants ne venant pas aussi nombreux qu’au début. Dommage si cette tendance s’accentue, la philosophie n’est pas une mode, pour ensuite passer à autre chose ! Elle permet de faire le point sur soi, sur la société, sur l’humanité, sur le monde entier, de relativiser les « egos », de voir ce qui ne va pas dans notre course effrénée à la technologie et à l’argent artificiel, d’empêcher le chacun pour soi, de corriger les tirs sans utiliser d’armes destructrices, de favoriser les échanges, de réunir le virtuel et le réel !


    Ma conclusion bête et pas méchante est qu’il ne faut pas se poser la question ! Quand je mets « faux », j’ai d’ailleurs dans la tête une phrase de mon prof de philo de terminale, qui nous corrigeait toujours quand nous disions : «  il faut penser ceci, ou cela … » « Non, il ne « faut » pas », intervenait-il, « quand on exprime une idée de « devoir », on tombe dans l’éthique, ou la morale, restons en philosophie ! Alors, je vais corriger : ma conclusion est que la question ne se pose pas ! On a besoin de moi comme j’ai besoin des autres, cela me suffira ! Quant à savoir si l’humanité, l’espèce humaine tout entière, est utile, elle est simplement là ; pour son utilité, l’avenir tranchera !

    Lenaïg


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  • Pour s'évader du froid et de la neige, retour dans le temps :

    balade au printemps 2009.

     

    Quatre amis, deux couples, déambulent et baguenaudent dans les rue de Paris, à cheval sur deux quartiers. Quels sont ces quartiers ? Oh, deux noms précis pourraient être cités mais que soient juste jetés en pointillé l'entrée de chez Michou, la maison de Dalida, un certain funiculaire, un gros gâteau tout blanc à la crème, dont l'une des marcheuses aperçoit le dôme et les clochers de son appartement, l'Église de St Jean l'Évangéliste aussi, aux si jolies mosaïques, aux balustrades aux ronds croisillons, à l'ange géant qui se penche sur le bénitier à l'entrée, comme pour accueillir presque tendrement les arrivants et leur assurer la protection et le confort de ses ailes.


    Les marcheurs s'arrêtent pour écouter, captivés, la guitare acoustique d'un jeune homme aux longs cheveux. Est-ce un gitan ? "Estas Tomes"* indique son disque. Il nous ravit et nous transporte, là, sur la petite place à l'ombre des arbres. Mais s'il a des accents manouches, on sent la puissance, l'élan du classique ; l'une des marcheuses, incorrigible amalgameuse, "entrevoit" même des accents proches d'un Carlos Santana au mieux de sa forme ! Une dame âgée s'approche, après qu'il ait terminé un morceau, très applaudi. Le musicien et la vieille dame se parlent; le jeune homme se lève pour embrasser la dame sur les deux joues, en lui prenant délicatement les épaules. Et le musicien, recroisant ses longues jambes, reprend sa guitare pour de nouvelles envolées.


    Les quatre amis se remettent en marche. Ils se sont accordés auparavant un repas dans un petit restaurant simple, assis à une table ronde, où ils ont âprement (trop !) discuté, soupesé, comparé, en s'échauffant, les apports du monde ouvrier par ses luttes, ses révoltes, justifiées, ses acquis durement obtenus et les apports des intellectuels sympathisants mais peut-être pas pleinement conscients de la dureté du travail physique des masses laborieuses. La marcheuse amalgameuse repense après coup à l'"acier rouge" et les "mains d'or" de Bernard Lavilliers, émouvant hommage aux métallos.


    Avant de se remettre en branle, ces quatre marcheurs se sont aussi accordés une halte dans un nouveau bistro, étonnamment pas trop assiégé, dans une ruelle pavée. L'un des hommes, autant cramponné à son éternel sac à dos (beaucoup trop lourd mais il est têtu) que l'amalgameuse à son réticule, a sorti son appareil à prendre la tension et à mesurer les pulsations. Surprenants résultats, mais pas de quoi s'inquiéter, a priori. L'amalgameuse n'a jamais eu une tension aussi basse : 11 - 7. Quant à ses pulsations : 80. Elle ne révèlera pas les résultats pour ses trois compagnons. L'homme au sac à dos explique et réexplique comment interpréter les chiffres. Systole, diastole, on dirait qu'il tient un cœur entre ses mains …


    Rafraîchis, revigorés, les marcheurs montent, affrontent une forêt dense de touristes et entament la descente du retour. Au fil des trottoirs, des obstacles, les deux couples se tiennent respectivement par le bras, par la main, se détachent. Les "filles" tombent en arrêt devant une vitrine (oh, pas la seule, mais celle-là les fait redevenir petites filles, ou leur donneraient l'envie de pouponner). Les deux "garçons" ne s'en aperçoivent pas tout de suite et sont déjà loin.

    Quand les quatre se rejoignent, les hommes sont rigolards et complices, à l'écoute des commentaires de leurs compagnes. L'un dit : "Une coccinelle en plastique et quelques bouts de chiffon bariolés, les voilà qui s'émerveillent et qui restent scotchées !" L'autre répond : "les hommes, eux, mettent un temps pour se rendre compte qu'il leur faut freiner et amorcer une marche arrière d'une centaine de mètres !"


    Mais, bon sang, elle était craquante, cette vitrine, qui offrait aux yeux des petits et grands enfants une grosse coccinelle d'un nouveau genre, rutilante et sympa, dotée d'un petit siège mignon, de roues et d'un guidon, sans oublier les antennes, ou encore des petites bottes d'un beau rouge également, parées d'antennes sur le devant, ni plein de bébés coccinelles tout autour et toutes sortes de petits vêtements. Les pucerons n'ont qu'à bien se tenir, les coccinelles préparent l'assaut, les deux dames sont au courant !

    Qu'on se rassure, de quoi seront capables seulement les coccinelles qui s'envoleront de là ? De faire naître des nuées de rires d'enfants, mélodies chères aux grands.

    Lenaïg
    ***


    * Estas Tomes est un guitariste russe, mondialement connu et reconnu !
    Le demander sur Google pour avoir son pédigrée !
    Si je peux transférer une photo que nous avons prise de lui, je le ferai.


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  • Arrivent les démons et l'angoisse me mord,
    le doute qui surgit ; ma vie est-elle un leurre ?
    Je cherche un réconfort, je saisis donc sur l'heure
    mon pelucheux ami, le procyon lotor*.

    La douceur du câlin rend la nuit plus belle,
    l'enthousiasme est là, je me secoue alors ...
    L'anxiété faiblit et son spectre s'endort,
    dissout dans un bon bol de soupe au vermicelle.

    L'ours humain est parti, plus de bruit de moteur.
    Il est déjà chez lui, m'appelle au téléphone.
    Ses mots et les miens, notre chanson résonne ;
    je revois le ciel, retrouve mon bonheur.

    L'adulte est un pantin, l'enfant meut les ficelles !
    ***

    Notes importantes :
    1) Retrouvé
    sur un de mes cahiers, un exercice que nous a fait faire Slévich (mais où est-il ?), du temps de l'atelier sur Lgdm.
    Il y a dans ce poème bizarre : du vécu et de la plaisanterie.
    2) * Le procyon lotor est le nom savant du raton laveur et un clin d'oeil à Ancelly, toujours à Louxor ...
    Je m'étais bien divertie à son "jeu du procyon lotor" !
    ***

    Notes facultatives :
    Il faut donc lire pour que tous les vers soient des alexandrins :
    - le pro-cy-on lotor,
    - la nu-it (eh oui !),
    - l'en-thou-si-asme,
    - l'an-xi-é-té,
    - les mi-ens,
    - le ci-el !

    Je me doute bien que les grands poètes évitent ce genre de phrasé ... ou non ?
    Mais je suis un poète amateur et mes rimes ne sont riches que quelquefois !

    Je ne raffole pas de la soupe au vermicelle, je ne la déteste pas, c'était justement pour la rime.
    ***

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  • CHARABIA


    Sous la charmille qui surchargeait un peu la charpente de la charmante chartreuse reconvertie en hôpital de la Charité, Sœur Charline déchargeait le chariot surchargé par la charpie et la charogne qu'en avaient chargé les charmantes infirmières chargées de soigner, en les charcutant un peu, le clochards malades de l'épidémie de charbon, en descendant, par le monte-charge, ce charnier à la décharge.

    Dans le parc, assis sur un vieux char à bancs , qu'un soir de charivari deux bambochards (un ancien charbonnier et un charcutier) avaient charrié jusque là, Charlemagne et Charlot, deux pochards, un bras en écharpe mais l'autre chargé d'un sac contenant une bouteille de chardonnay, d'un bifteck froid bien charnu de charolais, d'une boîte de pilchard ,d'un reste de charlotte et de quelques cerises charnues, se disputaient déjà, avec acharnement, en se comportant en mouchards :
    Charlemagne, pleurnichard, accusant l'autre d'être vachard. Charlot, en vrai cabochard, ripostait qu'en plus d'être un mouchard, l'autre lui avait chargé ses charentaises de chardons, et tout charpillé (*) son plus beau falzar.

    Un vrai charivari allait éclater : ils allaient s'écharper, en bons revanchards qu'ils étaient, en se traitant de charençons. Charlot en était même à sortir son écharnoir lorsque Sœur Charline, malgré sa surcharge de travail mais poussée par son charisme, s 'acharna à décharger leurs âmes de ces sentiments revanchards en les chargeant de recharger le chariot pour le pousser ensemble vers la décharge – à charge pour elle de leur offrir une p'tite Chartreuse.

    - Ah ben, si vous nous faites du charme…. On va l'faire, votre charroi !
    - Ouais, on n'est pas cabochards à ce point !
    -C'est pas qu'ça nous charme, mais on vous fait ça par charité…
    - Et pis pour la Chartreuse, surtout …
    - Allez ! avance, charogne, que j'suis tout seul à m'acharner su' c'chariot
    - Vrai, j'vas l'dire à Sœur Charline qu'tu m'as traité d'charogne !
    - Sale mouchard, va !
    - Et toi, charançon charbonneux !
    - Allez, pousse la charrette, sinon on n'aura pas d'Chartreuse !

    Et en avant pour la décharge.

    (*) charpiller : mot lyonnais : mettre en lambeaux. En charpie, quoi.


    :A VOUS, MAINTENANT !

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  • J’ai commencé a travailler en 1962  dans une entreprise qui envoyait des techniciens en Inde pour entretenir les matériels vendus là-bas. Quand ils rentraient, tous étaient choqués de ce qu’ils avaient vu : des êtres humains qui mouraient de faim et de froid  dans les caniveaux. Au début :

    -       on était effrayé.

    -        et après ?

    -       Ben !!! on les enjambait et des préposés venaient les ramasser tout les matins.

    Actuellement, ici , des volontaires proposent des repas et des refuges pour  dormir au chaud en cas de grand froid  ; beaucoup acceptent un repas mais refusent les refuges.  Déjà des morts.

    Quand ces volontaires se contenteront –ils de ramasser les cadavres tous les matins ?????????????????????????????????



                        Nous sommes en 2010 c’est la France  de M.  Nicolas Sarközy de Nagi-Bocsa et le président est content. Les cris de l’Abbé Pierre  que j’ai entendus en 1954 n’ont-ils  servi à rien ??

           ++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++

    « TOI QUI SOUFFRES, QUI QUE TU SOIS, ENTRE, DORS, MANGE, REPREND ESPOIR, ICI ON T’AIME »

    L'appel de 1954 de l'abbé Pierre

    Diffusé le 1er février 1954, à 1 heure du matin sur Radio Luxembourg

    Mes amis, au secours...

    Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant hier, on l’avait expulsée...

    Chaque nuit, ils sont plus de 2000 recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d’un presque nu. Devant l’horreur, les cités d’urgence, ce n’est même plus assez urgent !

    Écoutez-moi : en trois heures, deux premiers centres de dépannage viennent de se créer : l’un sous la tente au pied du Panthéon, rue de la Montagne Sainte Geneviève ; l’autre à Courbevoie. Ils regorgent déjà, il faut en ouvrir partout. Il faut que ce soir même, dans toutes les villes de France, dans chaque quartier de Paris, des pancartes s’accrochent sous une lumière dans la nuit, à la porte de lieux où il y ait couvertures, paille, soupe, et où l’on lise sous ce titre CENTRE   FRATERNEL   DE DEPANNAGE, ces simples mots : « TOI   QUI   SOUFFRES,   QUI   QUE   TU   SOIS,   ENTRE,   DORS,   MANGE,   REPREND   ESPOIR,   ICI   ON   T’AIME »

    La météo annonce un mois de gelées terribles. Tant que dure l’hiver, que ces centres subsistent, devant leurs frères mourant de misère, une seule opinion doit exister entre hommes : la volonté de rendre impossible que cela dure.

    Je vous prie, aimons-nous assez tout de suite pour faire cela. Que tant de douleur nous ait rendu cette chose merveilleuse : l’âme commune de la France. Merci !

    Chacun de nous peut venir en aide aux "sans abri". Il nous faut pour ce soir, et au plus tard pour demain :

    • 5000 couvertures,

    • 300 grandes tentes américaines,

    • 200 poêles catalytiques

    Déposez les vite à l’hôtel Rochester, 92 rue de la Boétie. Rendez-vous des volontaires et des camions pour le ramassage, ce soir à 23 heures, devant la tente de la montagne Sainte Geneviève.

    Grâce à vous, aucun homme, aucun gosse ne couchera ce soir sur l’asphalte ou sur les quais de Paris.

    Merci !


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