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    Dupont et Dupond

    Image : www.story-bd.com/tintin.htlm
    Dupont et Dupond sont-ils des jumeaux homozygotes ? Pas sûr, mais un fait est certain : ils ne se séparent jamais ...
    Clin d'oeil entre  parenthèse, car ...
    place à Rahar !
    ***

    La boucle sans fin

    - Monsieur, monsieur ! C’est épouvantable !
    - Qu’y a-t-il, Ivan ?

    - Votre fils, monsieur…

    - Enfin, voulez-vous bien parler ! Quoi, mon fils ?

    - Un accident, monsieur. Un camion a brûlé un feu rouge…

    - Et quoi, Ivan , et quoi ?

    - La berline de monsieur Sergueï a été fauchée. Lui et madame Tatiana sont mort sur le coup…

    - Mon Dieu !...

    - Mais les jumeaux sont indemnes. Leur couffin était bien arrimé.

    - Où sont-ils ?

    - A l’hôpital Saint Grégoire, monsieur. Ils ont été juste un peu secoués.

    - Préparez la limousine.

    - Et madame ?

    - Je me charge de la prévenir. Allez.


    Vladimir Karopov était la 15e fortune du pays ; sa niche était les bijoux de fantaisie et les marchandises de marque contrefaites de l’Extrême-Orient. Natacha et lui n’avaient eu qu’un fils. Vladimir espérait transférer à celui-ci les rênes de son empire dans trois ans. A la cinquantaine, il désirait lever le pied et prendre sa retraite ; sa femme aimerait bien voir du pays, elle en avait assez des vacances à l’isba, quand bien même celle-ci serait luxueuse.


    Maintenant, il fallait dire adieu à ce rêve. Natacha devait recommencer à pouponner, car il revenait naturellement à eux d’élever leurs petits-fils orphelins, et Vladimir devait rester à la barre de son industrie. La complexité et les ramifications de ses affaires étaient telles que seul un cerveau pouvait en maîtriser le mécanisme ; deux cerveaux, même jumeaux
    , ne pourraient qu’apporter la
    pagaille. Du moins, c’était le raisonnement de Vladimir.


    Le magnat décida donc de ne léguer son empire qu’à un des jumeaux. Son stratagème de sélection était des plus simple. Il fit asseoir les deux bambins au pied du mur du salon, dégagé de la table pour l’occasion, sous les yeux inquiets de Natacha, et mit son silver dollar fétiche, souvenir d’un voyage à l’étranger, au pied du mur opposé.


    - C’est simple Natacha, c’est le premier qui attrapera la pièce qui héritera de toutes mes affaires.

    - Mais c’est injuste, Vladimir. Et que deviendra l’autre ?

    - Tu sais bien mamouchka que je ne peux faire autrement. Je veillerais à ce que l’autre ait une éducation irréprochable, qu’il soit bien armé pour affronter la vie.

    - Mais tu ne peux pas attendre qu’ils soient assez grands pour connaître celui qui sera le plus apte ?

    - Ce sont des jumeaux homozygotes, Natacha. Ils ont le même cerveau, les mêmes aptitudes. Crois-moi, c’est le seul moyen… Venez les enfants, venez prendre la belle pièce.


    Les deux bébés commencèrent à ramper à quatre pattes en gazouillant vers leur grand-père. Celui-ci leur désignait la pièce brillante, les encourageant à le prendre. A mi-chemin, les bambins s’arrêtèrent
    et firent une pause, ils se regardèrent, se sourirent, puis tournèrent la tête vers leur grand-mère. Natacha eut un sourire contraint, le cœur serré ; elle jeta un regard désespéré à son mari, puis ses yeux revinrent aux bébés. A contrecœur, elle les encouragea à rejoindre Vladimir. La course reprit donc, mais à quelques mètres du but, l’un des deux accéléra soudain et s’empara avidement du silver dollar.

    - Tu as vu mamouchka ? On dirait que Boris sait bien ce qu’il veut. Il sera mon héritier.

    - Je trouve quand même que c’est monstrueux, Vladimir.

    *


    Boris et Grégori étaient des enfants éveillés et intelligents. Leur scolarité n’avait posé aucun problème, cumulant les mêmes excellentes notes (on était jumeau ou on ne l’était pas). C’était lors du choix des études supérieures que la première discussion sérieuse troubla l’harmonie de la famille Karopov. Vladimir était intraitable, Boris devait étudier l’économie et la gestion ; et en parallèle, devait suivre le droit. Les jumeaux avaient une aptitude naturelle pour les disciplines scientifiques, et Grégori prit le parti de son frère.

    En vain. Boris se plia à la volonté de son grand-père. Cependant, il finit par prendre goût à ses études, y excellant même. Son frère étudia les mathématiques et la physique.

    Vers la septantaine, Vladimir appela les jumeaux. Il leur révéla tout, le secret de ses affaires, le choix arbitraire de son héritier, l’orientation de celui-ci vers sa future destinée. Une onde glacée parcourut l’échine de Grégori ; la tristesse se mêlait au dépit, puis une rage froide le submergea. Papi devrait savoir qu’en tant que vrais jumeaux, Boris et lui avaient la même mentalité, la même tournure d’esprit, ils n’auraient jamais de divergence de vue dans la gestion de l’entreprise.


    L’onde glacée eut évidemment un écho chez Boris. Mais celui-ci l’avait associé à la surprise. Il avait considéré ce cadeau comme une compensation à son sacrifice ; il avait gardé une rancune inconsciente à l’égard de son grand-père qui avait contrarié sa vraie vocation. Ce ne fut qu’un peu plus tard qu’il prit vraiment conscience de l’injustice flagrante. Cependant, il ne put jamais raisonner Vladimir qui défendait avec opiniâtreté sa position.

    *


    Pendant cinq ans, Vladimir servit de mentor à Boris, avant que celui-ci pût maîtriser les arcanes des affaires et savoir louvoyer à la limite de la légalité, et enfin de voler de ses propres ailes. L’intelligence aiguë du jeune homme avait même permis à l’entreprise de s’étendre. Après quelques années, Boris nageait dans le luxe, voyageait partout dans le monde, vivait trop intensément pour sentir la vague pensée qui l’importunait en arrière-plan.


    Un jour, après un déjeuner d’affaire, alors qu’il rentrait seul à sa villa luxueuse, son cabriolet tomba en panne en rase campagne. Il aperçut au loin une isba et projeta d’y demander le téléphone (il n’avait pas
    de réseau). En passant par le verger, Boris surprit deux enfants. La fille donnait des roubles au garçon.


    - Qu’est ce que vous faites là, les enfants ?

    - Oh, rien m’sieur.

    - Vous partagez le fruit de vos rapines ? fit Boris, taquin.

    - Oh non, m’sieur. Voyez-vous, j’ai eu de très bonnes notes à l’école, et papa m’a donné de l’argent. Il a jugé que celles de mon frère n’étaient pas assez bonnes, alors il ne lui a rien donné. Pourtant, je sais que mon frère a fait des efforts.

    - Ma voiture est en panne, et je voudrais téléphoner chez vous.

    - Mes parents sont là, mais s’il vous plaît m’sieur, ne parlez pas de ce que vous avez vu à mon père.


    Boris repensa aux enfants. Il prit conscience du vague malaise qui le tourmentait depuis longtemps. Il avait été obnubilé par l’agréable contrepartie de ce qu’il avait considéré comme un sacrifice, et avait passé son temps à savourer sa récompense. Il n’avait plus son grand-père sur son dos et pouvait faire tout ce qu’il voulait. Dès son indépendance, il aurait dû penser à son frère. Où était Grégori ? Le remord commençait à le tarauder insidieusement
    . Il était injuste que son frère ne profitât pas du luxe et du confort dont lui, Boris, jouissait grâce à une course arbitraire au silver dollar.

    Ses études terminées (Vladimir avait tenu sa parole) avec de prestigieux diplômes en poche, Grégori avait émigré dans un pays qui lui avait proposé des émoluments largement supérieurs à ce qu’il espérait chez lui. Il fut recruté par le Centre de Recherches de Physique Appliquée sous le nom de Professeur Gregory Carropow. En ce moment, il travaillait sur une machine à remonter le temps.


    Boris mit des années à retrouver son frère qui avait coupé les ponts de dépit. Grâce à sa fortune, le jeune magnat avait embauché nombre de détectives et avait fini par le retrouver au CRPA ; celui-ci avait même changé de nom. Il avait longuement préparé ce qu’il allait dire à Grégori, réfléchi aux arguments pour ménager son amour-propre et vaincre son ressentiment. La secrétaire le faisait attendre, elle disait que le professeur Gregory était en train d’expérimenter une invention et qu’elle le préviendrait dès que l’expérience serait terminée.


    Boris patienta une demi-heure. Puis pour tromper sa nervosité, il chercha à bavarder avec la secrétaire. L’expérience présentait-elle des dangers ? Peut-être, personne ne le sait. Mais une fois, le professeur avait provoqué une explosion, qui n’avait heureusement pas fait de victime. Boris fut pris d’inquiétude ; il n’allait pas risquer de perdre son frère juste en ce moment. Il n’allait pas attendre. Il profita de ce que la secrétaire s’absenta un moment pour
    se ruer vers le laboratoire de son frère.


    - Boris ! Mais qu’est-ce que tu fais ici ?

    - Grégori, mon cher frère…

    - Ouais, mon cher frère mon œil ! J’ai attendu des années la manifestation de ton amour fraternel, et c’est maintenant que tu te montres. Pourquoi ? Pour étaler ta réussite ?

    - Non, Grégori. Je voudrais réparer…

    - C’est un peu trop tard, tu ne penses pas Boris ? Il y a trop longtemps que la rancœur me ronge. Mais j’ai construit une machine qui va corriger tout ça. On va reprendre notre course.

    - Attend Grégori, il n’est pas trop tard, je voudrais te dire…

    Le professeur avait appuyé sur un bouton de l’imposante machine. Tout sembla vaciller, puis devenir flou. Le décor se délita et partit en lambeaux.

    *


    L’esprit de Gregory n’arrivait pas à se concentrer. Les réincarnations ne se passent pas toujours de la même façon : chaque cas est particulier. Le jumeau avait beaucoup de difficulté à rassembler ses souvenirs, le fleuve de l’oubli commence à les emporter ; mais son instinct lui disait qu’il devait se souvenir d’un fait très particulier et très important. Il était par terre, avec un autre lui-même ; la grande créature bienveillante les appelait d’une voix pressante mais agréable. Lui et son image
    rampaient sur la douce moquette. A mi-chemin, il s’arrêta, comme le fit son double ; il regarda Boris comme dans un miroir, puis l’autre grande créature en robe. Elle souriait, mais le sourire n’était pas naturel. Il n’eut pas le temps de s’inquiéter de ce sourire artificiel, là-bas, un objet brillant l’attirait. C’était çà ! Il fallait se saisir de cet objet coûte que coûte. Gregory se remit à ramper comme son double, mais il força son petit corps à accélérer.

    - Tu as vu mamouchka ? On dirait que Gregori sait bien ce qu’il veut. Il sera mon héritier.

    ...

    *
    ...

    - Tu as vu mamouchka ? On dirait que Boris sait bien ce qu’il veut. Il sera mon héritier.

    ...

    Auteur : RAHAR.

    *** 


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  • Note : il s'agit ici d'infos et histoires qui se transmettent de mail à mail.
    J'ai bien apprécié cette sélection d'Anaëlle.


    Merci Anaëlle pour cette première superbe histoire, vraie !
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    "BELLE HISTOIRE D'HOMME ET DE CHIEN

    Le baiser
    Belle histoire de chien et d'homme
    Il venait juste de la sauver de sa maison en feu,la sortant sur le parterre avant tout en retournant combattre l'incendie.
    Elle attendait des bébés.
    > Le pompier eut peur d'elle en la sortant parce qu'il n'avait jamais côtoyé de Doberman avant.Quand finalement l'incendie fut contrôlé, il s'est assis sur le gazon pour reprendre son souffle et prendre un peu de repos.
    > C'est à ce moment qu'un photographe du journal "The Observer" de la ville de Charlotte,Caroline du Nord a remarqué que la femelle Doberman fixait le pompier.
    > Il l'a vu s'approcher du pompier et se
    demandait ce qu'elle avait l'intention de faire. C'est alors qu'il la vit donner un baiser à l'homme qui l'avait sauvé du brasier ! Et dire qu'il y a des gens qui pensent que les animaux sont stupides !

     

     Ce courriel doit continuer de circuler... "
    ***


    Et encore merci, Anaëlle, pour cette histoire étonnante, moins crédible mais bien originale !  
    ***

    "Le fils d´un Émir arabe part étudier en Allemagne.
    > > >
    > > >
     Au bout d´un mois il envoie une lettre chez lui avec ces mots :
    > > > " Berlin est superbe et les gens sont sympas et ça me plait beaucoup ici mais j´ai un peu honte

    > > > d´arriver à l´école avec ma Mercedes en or alors que mes professeurs descendent du Tramway ".

    > > >  Au bout de quelques jours le fils reçoit une lettre avec un chèque de 1 million de Dollars avec ces quelques mots :

    > > > " Ne nous fais pas honte plus longtemps, va t´acheter aussi un Tramway ". "
    ***   


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  • Intertitre:
    Stéthoscope au cou, le Dr Ulysse a plongé l'aiguille d'une seringue d'adrénaline dans le bras de l'enfant de six ans que j'étais en faisant une promesse : tu ne vas pas vomir.
     
    Texte:
    Les minutes ont passé. Ma respiration sifflante est revenue à peu près normale. Et le contenu de mon estomac bien sagement dans mon ventre. Mon sauveur ! Je suis tombé en admiration devant ce grand médecin noir qui avait soigné mon asthme sans que je régurgite. Ce fut mon tout premier contact avec Haïti. Un jour de Pâques. Le Dr Ulysse a donné son numéro de téléphone à la maison à mes parents pour qu'ils puissent l'appeler en cas de besoin. Puis de fil en aiguille que je recevais régulièrement, nos familles sont devenues amies.
    Haïti c'était pour moi, enfants, ces gens chaleureux qui parlaient avec de grands éclats de rire. Du riz blanc avec des fèves rouges. Salade de cresson. Délicieux. Plus vieux, j'ai appris l'histoire. Les Duvalier et les cruels tontons macoutes.
    Avant de partir pour Cuba, en janvier, mon frère Stéphane se désolait. «On montre toujours ce qui est laid à Haïti, la misère, la pauvreté. C'est plate. Il y a des belles choses à Haïti. C'est un beau pays. Il y a aussi des riches.»
    Mon frère parle en connaissance de cause. Il a vécu huit ans en Haïti dans les années 90. Travaillait dans un restaurant à Pétion-Ville. Il connaît des gens là-bas. Ses yeux ont vu Port-au-Prince.
    Tu dois être secoué mon Stéphane ? Il m'a répondu hier sur Facebook. Je vous lis sa réflexion.
    «Ça m'a vraiment touché de voir la nature se déchainer sur un si beau petit pays qui était déjà atteint par la misère et la pauvreté. Ce coup-là, c'est toutes les couches de la population qui ont été touchées; les pauvres anéantis et des riches qui vont se rebâtir avec peut-être un peu de chance.
    Pauvre Haïti. Pourquoi un si beau petit pays est-il toujours plongé dans le malheur : politique pourrie, cyclone, ouragan, tornades, et comme si c'était pas assez : tremblement de terre de quelques secondes et voilà la perle des Antilles ravagée par des visions d'horreurs.»
    Un baume, estime mon frère, la cruelle secousse a aussi déclenché un grand mouvement de solidarité. «Une chose me console un petit peu : c'est l'amour de pleins de nations pour les Haïtiens, spécialement les Québéquois. Je pense que presque tout le monde a eu beaucoup de compassion à en voir les dons envoyés pour Haïti.»
    Espérons qu'Haïti trouvera son équivalent du bon Dr Ulysse qui en prendra soin avec empathie et mènera le pays sur le chemin de la guérison.
    Et comme l'écrit si bien Stéphane, «que la nature puisse faire reluire ce qui était autrefois la perle des Antilles».

    Article de Michel Thibault (Québec), paraissant dans son journal aujourd'hui.

    Mon frère haïtien - Article éditorial de Michel Thibault
    http://monteregieweb.com/main+fr+haiti+.html

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    Haiti

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    La nouvelle tomba comme un Père Noël attendu depuis des lustres.  Gargantua
    Un édit prononcé et dûment signé par Zeus lui-même condamna
    Gargantua à la déportation manu militari au Québec. C’est bien là
    où quelques arpents de neige sauront mettre des freins à ses démesures alimentaires. Ce glouton créé par Gaia pour venger les Titans offrait à Zeus une belle occasion de se débarrasser de cette brute sans cervelle. Tous savent que Zeus et le Roi Soleil sont du même bord. Les Français lourdement affectés par ses orgies, ses colères et son indigence spirituel s’en étaient plaint auprès des seigneurs qui soutenaient leur cause craignant être détroussés eux-mêmes de leurs caves à vin capiteux. En moins de deux, Héraclès, major chevronné du souverain avait rivé Gargantua au fond de la Grande Hermine. Le voilier quitta le port aux aurores pour mener
    ce porc au bout du monde.

     

    Grâce au ciel, l’ogre souffrait du mal de mer. Le cœur au bord des lèvres, il refusait ses repas composés de  pain sec et d’eau.
    L’odeur du  hareng salé qui flottait dans l’air le vidait de ses tripes. Les pauvres moussaillons de corvée en tombèrent malades à force de nettoyage répétitifs et d’abondance colossale. Au bout d’on ne sait plus quelle mesure de temps, Chronos ne s’étant pas mêlé à cette histoire, La Grande Hermine débarqua avec grand soulagement  son fardeau aux abords du fleuve Saint-Laurent, là où ce dernier paraît davantage figure de mer. Sitôt le voilier délesté de cette peste, sitôt, il repartit sans chercher commerce d’aucune manière. Ses immenses voiles se gonflèrent et le vaisseau fila droit devant comme transporté sur les ailes des puissants vents du large le ramenant vers sa mère-patrie.  Alléluia, la France enfin débarrassée de cette gale coûteuse à faire vivre se réjouira et décorera d’une médaille olympique le grand Héraclès à son retour au port de Saint-Malo.  

     

     L’ogre reprit ses esprits si tant peu soit-il possible pour cette outre extensible d’un océan à l’autre. L’air frais pour ne pas dire glacial lui fouetta les narines qui s’emplirent d’odeurs de cocottes d’épinettes et de feuilles mouillées. Cela lui fit un petit creux au ventre. Il hurla : «J’ai faim !  À boire et à manger avant que tout cru, je ne dévore âme qui vive ici ! » 

     

    Pontiac, le chef Indien pêchait pas très loin du visage pâle inconnu. Il ne comprit rien de ce langage coup de tonnerre. Calme et silencieux, il lui jeta un regard indifférent et il releva la tête coiffée de sa couronne de plumes multicolores. Il pensa en son fort intérieur, «  Gros homme blanc, trop manger. Pas bon pour sa vie. » Sans se soucier de cet animal étrange à ses yeux, il se remit à taquiner le poisson. Juste pour le plaisir parce que dans son canot d’écorce, il y avait suffisamment de prises. Sa Perle de Rosée l’accueillerait avec ardeurs dans ses caresses en guise de reconnaissance. Elle savait dorer les meilleurs filets de truites et de saumon frais délicatement emballés dans les feuilles de maïs.

     

     Étonné, Gargantua resta bouche bée. L’homme à plumes ne semblait pas l’avoir aperçu ni entendu. Pire, il n’avait pas peur. Il resta perplexe.  Il vit courir à ses pieds de sept lieues une biche blonde comme les blés en France. Ce souvenir lui fit monter les larmes aux yeux. Ah non ! Pas de ça. Gargantua n’est pas une mauviette. « J’ai faim ! » hurla t’il une seconde fois. Impassible, Pontiac déjà sorti de son canot, le carquois sur le dos et sa besace pleine à rebord, se dirigea d’un pas assuré vers l’étranger plus haut qu’une montagne. Sans aucune peur, il toisa  de la tête aux pieds ce géant tapageur que lui envoyaient les grands Esprits, ceux des forces de la nuit  pour lui apprendre à vaincre ses ennemis en les affrontant dans la lumière du jour.   Du bonbon  pour l’épanouissement d’un vrai guerrier.  Notre grand dadais avait tellement faim qu’il suivit l’odeur de la besace accrochée à la ceinture de Pontiac.

     

     Arrivés au campement de la communauté du grand chef, tous se rassemblèrent autour de l’envoyé du grand Esprit. Le chaman s’approcha le premier et en fit le tour en l’enfumant des volutes d’herbages magiques. Cela prit plusieurs heures avant d’avoir complété un tour complet.  Au début, Gargantua se sentit légèrement étourdi. Puis, il sombra dans une profonde  léthargie. Perle de Rosée lui fit boire une tisane au goût âcre. Là, ce fut l’euphorie. Comme un gros bêta, il s’étendit sur le tapis de mousse fraîche qu’on lui avait désigné. Le chaman dansa autour de lui en agitant de longs hochets sur lesquels pendaient de fines lanières de cuir se terminant par des osselets. Sous l’emprise de cette cure, il  somnola pendant sept lunes. Les femmes venaient à tour de rôle lui offrir la tisane des rêves. Celle qui parle avec le grand Esprit. Le matin du troisième jour, Gargantua eut une apparition. Une Louve géante, lui raconta son histoire. C’est ainsi qu’il apprit son origine. Il était né d’une vengeance pour l’honneur des Titans. En pleurant dans ses rêves, il revit ses crimes et ses abus. Son cœur se mit à battre très fort, il sentit la douleur. Mais il vit aussi pour la première fois la beauté et la bonté de la généreuse nature envers toutes les créatures.

     

    Le quatrième jour, Pontiac et le chaman lui firent fumer le calumet de paix. Ils partagèrent trois pleins fourneaux de cette pipe qui apporte le bonheur. Gargantua devenu calme et méconnaissable se vit servir deux grosses marmites de siffleux baignant dans un bouillon épicé de feuilles de menthe. Quand il eut tout englouti, il dévora douze douzaines d’épis de maïs cuits sur la braise et Perle de Rosée n’en finissait plus de lui remplir une outre de jus de pommes d’automne. Pour en finir, Pontiac le mena au verger et lui dit : Quand ta faim sera comblé, reviens au camp. On a besoin de toi pour aller à la chasse à l’ours. L’hiver approche, les femmes doivent coudre les peaux pour nous vêtir et nous protéger du froid mortel.

     

    A partir de ce jour, Gargantua ne souffrit plus jamais de la faim. Il y avait tant de forêts et d’animaux… Les pauvres, on ne leur avait pas demandé leur avis. Avec autant de bouffe à portée de dents et des calumets de paix, Gargantua se civilisa sans en prendre conscience.

     

    Plus tard, il découvrit le goût des fèves au lard et bien sûr du petit caribou. Je peux vous jurer qu’avec le petit caribou, on l’entendait chanter jusqu’à Ottawa.

     

    Un jour Pontiac traîna Gargantua jusqu’aux abords de l’Ontario pour l’initier à la rame en canot d’écorce, mais surtout pour ramener des fruits exceptionnels qu’on ne trouvait qu’à cet endroit en cette saison. Là, dans ce corridor d’air chaud poussaient des fruits ronds à la peau de velours qui cachaient un gros noyau brun dans son cœur. Bien sûr, Gargantua sentit ses papilles saliver juste à l’idée d’en goûter. Il avait reconnu la description des pêches qu’il dévorait à pleines mains en France et ailleurs avant sa déportation. C’est là que se produisit l’irréparable. À peine arrivé sur les lieux, il se goinfra de tant de fruits juteux le temps de crier « lapin » que toute une acre de pêchers avait été vidée de ses fruits. Puis ce fut la catastrophe ! Gargantua indisposé par tant de gourmandise fut pris de violentes crampes abdominales qu’il devait soulager de toute urgence. Il s’empressa de courir jusqu’au lac situé au sommet de la montagne pour y asseoir son arrière train en feu et à cet instant, le sol s’effondra sous son poids. Ainsi sont nées les Chutes Niagara. Pontiac n’en croyait pas ses yeux et regretta amèrement la conduite de son protégé. Gargantua grièvement blessé par cette chute fatale, mourut quelques heures plus tard une moitié de son corps chez les Américains et l’autre chez les Canadiens.

     

    Croyez-le ou non, cette histoire est pure vérité.

    Auteur : Marie-Louve.


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    Lena ressent du vague à l’âme. Son amie Fée n’est pas encore réapparue et la présence de celle-ci commence à lui manquer. Cela fait plus de deux mois que Dodue est partie. Cassandra, depuis, a rendu visite plusieurs fois à Lena. Percevant la mélancolie sous l’enthousiasme apparent de Lena, elle l’a distraite en lui parlant de ses investigations sur la musique et le meurtre, la question de savoir s’il y a des assassins chez les compositeurs de musique.

    Lena a été très intéressée d’apprendre que Cassandra a tranché sur le doute concernant le rôle joué par Antonio Salieri dans la mort de Wolfgang Amadeus Mozart. Pour Cassandra, Salieri n’a pas été l’empoisonneur de Mozart mais elle reconnaît qu’il n’est peut-être quand même pas mort par intoxication volontaire … Elle continue à ses heures perdues d’explorer le monde de la musique dans l’optique que celle-ci adoucit les mœurs !

    Lena ne s’est d’abord pas inquiétée de l’absence prolongée de Dodue grâce à Aristide, le clown robot qui, depuis qu’il est reparti en mission, lui relaie par la voie mentale les informations provenant de Danilo, toujours concentré sur sa tâche dans l’hôpital inconnu, l’opération de la dernière chance par insertion de nanosphères ayant réussi. Il est resté surveiller les moindres symptômes de rejet (peut-être n’a-t-il pas fait que surveiller d’ailleurs), ainsi qu’observer la régression de la maladie chez l’heureux patient et l’excitation presque incrédule des chirurgiens, du personnel hospitalier et de la famille. Aristide a également donné des nouvelles de Dodue, très absorbée par des missions qu’elle s’est fixée toute seule dans le même hôpital, se liant d’amitié avec une vieille dame atteinte de la maladie d’Alzheimer, à qui elle redonne goût à la vie, en cachette de tout le monde …


    Soucoupe 2 gotomars.free.frCependant, les semaines passant, la surprise de Lena grandit devant le fait que Dodue, elle-même, ne se manifeste pas du tout. Lena a fini par poser la question au clown robot Aristide, qui lui a révélé que c’est Danilo qui empêche toute communication directe entre Lena et sa Fée, pour des raisons de sécurité. Lena ayant insisté pour en savoir plus, Danilo a précisé, toujours par l’intermédiaire d’Aristide, qu’un problème inattendu lui a fait prendre cette décision et que, dès que la solution sera trouvée, Dodue communiquera à nouveau directement avec Lena.


    Ayant touché un mot de cela à Cassandra, Lena, aux aguets, a perçu une ombre de préoccupation sur le visage de Cassandra, vite dissipé. La jovialité habituelle a éclairé à nouveau les traits de la Chef, qui a sobrement commenté : Danilo sait ce qu’il fait, Lena ! Dodue réalise des merveilles de son côté, elle va en avoir des choses à te raconter …


    Lena :

    Dodue n’a pas hésité à suivre Danilo, Cassandra. Moi, je ne suis pas courageuse, je serais épouvantée si je devais me lancer dans l’inconnu comme elle l’a fait. Je veux bien suivre les héroïnes des romans bien calée dans mon fauteuil ou dans mon lit douillet, mais j’ai encore en mémoire la fin étrange de ce physicien de soixante-dix ans dans le roman Timeline, ou Les Prisonniers du temps, de Michael Crichton. Dans ce roman, la téléportation dans le temps est utilisée …


    Cassandra :

    Raconte-moi un peu !


    Lena :

    Au début du roman, ce physicien est retrouvé et recueilli au milieu de nulle part, enfin non, dans Corazon Canyon, en Arizona, mal en point, tenant des propos incohérents. Sa chemise n’est plus bien raccordée, alors qu’on ne distingue aucune déchirure ni aucune couture réparatrice … Comme on l’apprend, après sa mort rapide à l’hôpital, le physicien a eu l’imprudence de se livrer à de trop nombreux voyages téléportés aller-retour dans le temps. A chaque fois, des erreurs, d’abord infimes, se sont produites dans le « remontage » de son corps et le dernier voyage lui est fatal. La téléportation me tente, mais êtes-vous sûrs de votre technique à cent pour cent ?


    Lena, en interrogeant Cassandra, se demande avec angoisse si ce n’est pas là que se situerait le problème préoccupant Danilo.


    Cassandra, riant :

    Oui la technique est sans faille, c’est notre moyen de transport à nous. Maintenant, avant de te téléporter, toi, Lena, mes chefs exigeraient des tas d’examens auparavant, sans que cela doive te faire peur d’ailleurs. S’il y avait le moindre risque, nos robots nous avertiraient.


    Donc, si cela te dis un jour, si tu maîtrise ta peur … Dodue était mieux équipée que toi pour ce genre d’expédition. C’était moins difficile pour Danilo de la téléporter avec lui, étant donné qu’elle est une représentation mentale créée par toi. Dodue s’adapte à tout, puisque, pour elle, les frontières n’existent pas. Le mal du pays, par exemple, elle ne connaît pas, toi si !


    Lena :

    C’est vrai. Pendant longtemps, je l’ai ressenti, quand je mettais les pieds hors du Finistère. Ne voir que des maisons en briques et en tuiles me rendait mal à l’aise et je cherchais désespérément un toit d’ardoises et un mur clair pour me rassurer, comme si, pour moi, c’était cela la fameuse « normalité » !


    Bien sûr, cette impression s’estompait rapidement, surtout si les gens que je côtoyais étaient chaleureux. LesET se cachant rares fois où je suis allée à la montagne aussi, j’ai éprouvé une sensation d’étouffement en arrivant : l’horizon bouché par les sommets commençaient par m’écraser littéralement. Je me sentais mal sans vouloir l’avouer à mon entourage.

    Cela se produisait à chaque fois mais le lendemain je me sentais déjà mieux et au cours des séjours, je goûtais pleinement la qualité de l’air, la neige, rendant les paysages magiques. Passé l‘âge de vingt-cinq ans, tout de même, après un certain nombre de voyages à l’étranger et un certain nombre de séjours prolongés hors du Finistère, j’ai fini par m’approprier toutes sortes de décors et de paysages différents, j’ai plaisir à passer des uns aux autres et la gêne qui accompagnait la découverte autrefois a complètement disparu.

    N’empêche, je rêve de me trouver en orbite autour de la Terre mais cela restera un rêve, Cassandra ! Si la possibilité m’en était donnée, je ne courrais pas le risque de céder à la panique, au point de ne pas réussir à apprécier le merveilleux spectacle qui me serait offert …


    Oh, Cassandra, j’y pense ? Les soucoupes volantes existent-elles ?

    Là aussi, le sujet me fascine, mais si je me trouvais face à l’une d’elles, comme David Vincent, en cherchant un raccourci que jamais je ne trouverais, c’est la terreur qui l’emporterait sur la fascination !


    Cassandra :

    Dois-je te répondre, alors ? Oui, Lena, elles existent. Nous n’explorons pas les mondes de cette façon, nous vivons dans un univers que vous pourriez appeler « parallèle » mais nous savons par exemple, que certains astronefs venus survoler la Terre étaient issus du système solaire Zeta Reticuli, à trente-neuf années lumière de chez vous, une bagatelle, n’est-ce pas ?! Je crois que leurs visites ici ne se sont pas bien passées et qu’ils ont abandonné leurs incursions. Leur technologie est bien plus avancée que la vôtre, mais je suis obligée de révéler qu’ils ont été horrifiés par l’aura négative qui se dégageait de la présence humaine sur la planète et qu’ils y ont laissé des plumes et des individus. Ils n’espèrent qu’une chose, c’est que vous ne puissiez jamais leur rendre visite ! Des collègues à nous les connaissent mais ils sont liés par le secret professionnel et je ne dispose pas d’autres détails.


    Stargate allocine.frLena :

    Au moins, saurais-tu me dire à quoi ressemblent ces visiteurs de l’espace ?

    Cassandra :

    A toi et moi, Lena !

    A suivre …


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