•  

    Perroquet en volDeux semaines s'étaient écoulées. Arthur éprouvait une excitation joyeuse, assombrie d'un vague malaise. Il était enfin passé de l'autre côté du mur de la clinique Krapulax, où il disposait maintenant de sa chambre, confortable, même cossue sans ostentation, comme l'ensemble des locaux.

     

    Dès le lendemain de sa candidature à l'annonce, une convocation s'était inscrite sur son ordinateur, pour des tests, épreuves et entretiens divers. Le message stipulait que cette opération prenait trois jours pendant lesquels les candidats acceptaient de rester dans l'enceinte de la clinique. Il lui était donc enjoint de se munir d'un sac d'affaires personnelles. Il avait fait ses adieux provisoires à ses parents, intrigués mais contents pour lui et à sa fidèle bipbip Agrippine qui, voyant les préparatifs, avait compris qu'il la quittait et poussait des glop glop tantôt courroucés, tantôt plaintifs. Ses parents César et Agathe avaient dû entourer de leurs bras le gros oiseau coureur, qui aurait bien voulu suivre son maître lorsqu'il traversa la rue pour sonner au grand portail.

     

    Trois jours intenses, où il répondit brillamment aux divers questionnaires, fut médicalement déclaré apte au service, fit ses preuves en arts martiaux, accomplit dans le petit bois de la propriété un parcours du combattant sans fautes. Sur les quinze candidats parmi lesquels il s'était retrouvé, issus d'un peu toutes les zones habitées de la planète Pif, il n'en fut gardé que six au final, dont Fougériane, une superbe jeune fille à la peau sombre et aux abondantes boucles noires, joliment musclée, avec qui il avait sympathisé (et le mot était faible). Il eut même la joie d'inviter Fougériane, venue de loin, chez ses parents, lorsque leur contrat d'embauche en poche, ils furent libérés, le temps de réfléchir avant de signer. Si c'était oui, ils devaient tous deux intégrer la clinique au début de la semaine suivante.

     

    Arthur bénéficia de surcroît d'une faveur spéciale. En effet, à la question : "vous pouvez avoir des missions longues à mener à bien, dont vous ne parlez pas à l'extérieur (heureusement on lui avait assuré qu'il ne lui serait pas nécessaire de faire des trajets en hyperespace), avez-vous des liens très forts qui vous rattacheraient à votre vie précédente et qui ne vous rendraient pas tout à fait libres ?", il avait répondu, comme une boutade : "oui, j'ai ma fidèle Agrippine qui aura bien du mal à comprendre mes disparitions !" Le DRH, à sa grande surprise, lui avait rétorqué : "Mais faites-la donc venir avec vous, elle peut vous et nous être utile !"

     

    Le contrat d'embauche fut examiné à la loupe par César, le père d'Arthur, qui n'y vit rien à redire, même sur la clause de confidentialité absolue sur l'élevage de perroquets pifiens. "Écoute, Arthur, au fond, cela ne te regarde pas, pourquoi le secret sur cet élevage. Les avez-vous vus, ces perroquets ?" Arthur et Fougériane s'étaient regardés, cachant rapidement leur gêne et avaient répondu : "oui, nous avons vu leurs installations, ils sont bien traités, bien nourris." "Alors, allez-y, les enfants !"

     

    Arthur, Fougériane et même Agrippine, étaient maintenant en stage de préparation intensive car leurs missions consisteraient à prospecter de nouveaux talents musicaux sur les diverses planètes du système Spirou, à aplanir des difficultés juridiques avec des divas ou des compositeurs perpétuellement insatisfaits , etc, à organiser des festivals promotionnels. Ils avaient le titre de conseillers spéciaux, ce qui signifiait à la fois musicologues, attachés de presse et … baroudeurs … L'espace n'était pas une cour d'école maternelle, les pirates de tous poils sévissaient, il fallait parfois être capable de se défendre et de se battre. Des séances de tir au pistolet paralysant étaient également au programme. Arthur et Fougériane savait qu'ils devraient d'ailleurs en porter un sur eux en permanence, ce qu'ils avaient caché aux parents d'Arthur (surtout à Agathe, la maman car César s'en doutait, sûrement, de par son métier).

     

    Krapulax était réellement une clinique : on croisait les patients, toujours du monde de la musique, très fortunés, qui se reposaient de surmenage ou venaient chercher l'inspiration, dans les salons, au piano ou dans les luxuriants jardins dont on avait le choix : celui-ci à la française digne du mythique et lointain Château de Versailles sur la Terre, ou celui très fantaisiste, touffu et coloré, ombragé d'éclatants magnolias du cru, de flamboyants rhododendrons et azalées, de solide palmiers.

     

    Mais le malaise d'Arthur, que Fougériane partageait, provenait de ce fameux secret des perroquets. Un énorme secret, effectivement. Ils savaient tous deux que les voix admirables qui s'élevaient par-dessus le fameux mur d'enceinte n'étaient pas humaines ! C'étaient les perroquets qui chantaient ainsi. Mais … ils ne volaient plus. Ayant fait la remarque au responsable de l'oisellerie, un individu à l'air perpétuellement indifférent, voire cynique, du nom de Draco Luthor, il s'était fait remettre en place par celui-ci : "Ah, ça 'risque pas ! Tous les aras, cacatoès et autres amazones qui sont là ont les ailes brisées. C'est p't-être pour ça qu'ils chantent si bien, hin hin ! Mais ce ne sont pas tes oignons ! Eh, le bleu, 'faut que tu t'endurcisses, ces bestioles nous sont précieuses par leur incroyable don à capter la musique et reproduire les voix humaines. Pas un qui siffle ou chante faux ! Ils ont l'oreille absolue, ces psittacidés !"

     

    Fougériane venait d'entrer dans la chambre d'Arthur pour un moment de tendresse, dans la lumière crépusculaire qui se découpait par la fenêtre. Agrippine dormait sur sa couverture, la tête sous l'aile. Bientôt elle sortirait passer la nuit dehors à sa convenance, comme à son habitude (il faut se rappeler que l'utilisation de toilettes ou d'un bac à litière comme un chat n'était absolument pas réalisable pour elle). Arthur avait mis en route son neutraliseur de voix, cadeau de son père, qui le lui avait remis en cachette dès la signature du contrat en lui assurant que ce gadget lui rendrait sûrement service. La Compagnie galactique de robotisation n'avait pas encore commercialisé le système mais l'appareil avait l'ingéniosité de transformer les propos tenus dans une pièce en paroles anodines sans rapport avec la conversation réelle. Il fallait en effet déjouer les éventuels pièges des micros cachés. Fougériane, au cours de la journée, avait eu une communication stupéfiante avec l'un des psittacidés et la découverte était de taille.

     

    A suivre  !

     

    Lenaïg

     

     Image :

    goodies.pcastuces.com/fond_ecran ...

    Perroquet en vol.

     


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  • Gouttes de pluiePersonnages :

    - Zigue, chien,

    - Stache, chat,

    - Sébastien, maître de Zigue,

    - Bernard, "maître" ou plutôt compagnon de vie de Stache,

    - la narratrice.

    Un petit rappel :

    la narratrice était pour l'instant la seule à savoir le secret de Zigue et Stache : le grand chien, solide gaillard à la généalogie très riche et le chat noir à la tache blanche sur le front s'étaient mystérieusement rapprochés dans une communication mentale. Voir les trois premières nouvelles :

     

    Le Chien incertain, Le Chat d'en face, puis Zigue et Stache.

    *** 

     

    Un coup de fil

    Un dimanche après-midi pluvieux. Bernard venait de découvrir un fait qui l'intriguait et d'appeler Sébastien, son voisin d'en face.

    " - Salut Seb ! Tu sais où est ton chien ?

    - Oui, enfin … il a demandé à sortir, il a dû se rendre à son terrain vague favori. Mais, c'est vrai, il en met du temps ! Il va rentrer trempé … Mais, pourquoi me poses-tu la question, au fait ?

    - Oh, ne t'inquiète pas pour lui ! Viens voir chez moi ! Je ne te dis rien de plus, pour ménager le suspense …"

    *** 

     

     La grange

    Ils étaient tous les deux réfugiés dans la grange, derrière la maison de Bernard. Zigue rentrait rapidement de sa balade hygiénique, le pelage déjà trempé quand Stache, sentant sa présence dans la rue, lui proposa de venir le rejoindre sous le toit de la grange. La grange, dans le jardin chez Bernard, comportait une partie qui restait ouverte sur l'extérieur mais offrait un abri confortable en cas d'intempéries. Zigue s'était ébroué vigoureusement et avait rejoint Stache, qui était en train de lui transférer ses souvenirs de frustration dans sa vie, avec ses maîtres, en lui faisant revivre mentalement plusieurs situations. C'était en effet par images mentales que la communication s'effectuait.

    Déjà, Zigue percevait une différence importante entre son ami chat et lui-même. Pour Zigue, Sébastien était incontestablement le chef de meute, qu'il avait choisi, d'accord mais il s'en trouvait très heureux.

     

    Pour Stache, il n'en était pas ainsi : il aimait Bernard et sa femme Martine, leur rendait autant d'affection que ces derniers lui manifestaient, mais il se considérait comme leur égal, content de leur apporter sa compagnie. Stache voulait rester indépendant, il y allait de sa dignité et l'idée de la meute, il ne l'appréhendait pas.

    Stache faisait partager à Zigue son indignation qu'on le déloge parfois d'une chaise ou du canapé pour s'asseoir à sa place. Lorsque Bernard et Martine étaient au salon, que des invités arrivaient, Bernard ou Martine, l'un ou l'autre, le prenait dans ses bras pour le poser par terre, ou essayait de le garder sur ses genoux en s'asseyant à nouveau.. Stache se sentait vexé, préférait s'en aller, s'isoler, bouder un peu ! Si par hasard Stache entendait les invités rire en le voyant s'éloigner, sa honte en était accrue …

     

    Zigue, après avoir ressenti l'émotion du chat, commença ensuite à évoquer à Stache le fait qu'il ne montait jamais sur le canapé de Sébastien, qu'il était entendu une fois pour toutes qu'il avait son coussin à lui et que cela ne le dérangeait nullement … Là, c'est Stache qui éprouva la sérénité du chien à ce sujet et il était à parier que cette sensation minimiserait désormais ses propres frustations, un bon point pour Zigue !

     

    Tout d'un coup, Zigue fut pris d'une vague d'allégresse qui lui secoua le corps, à la grande surprise et méfiance de Stache, dont les poils se hérissèrent et les babines commencèrent à se retrousser : quel était ce comportement inconnu auquel se livrait son nouvel ami ? Puis les images qui faisaient … rire Zigue -car c'était bien de cela qu'il s'agissait- s'imposèrent à Stache. La fantaisie avait pris à Zigue de se mettre dans la situation de Stache, imaginant Sébastien le prenant du canapé pour l'asseoir sur ses genoux, disparaissant derrière la grande masse de son chien, tandis que celui-ci pédalait désespérément pour garder son équilibre sur les genoux de son maître. Stache fut envahi à son tour de gaieté, cligna des paupières et regarda Zigue dans les yeux. Zigue lui rendit son regard et bailla bruyamment. Stache détourna les yeux, dans lesquels s'exprimaient maintenant une quiétude parfaite et s'allongea en rond, posant le menton sur ses pattes de devant.

     

    Les deux compères restèrent longtemps silencieux, savourant le bon moment de complicité. L'après-midi était à la douceur et le crépitement de la pluie sur le toit de zinc contribuait à la torpeur et à l'endormissement. Zigue et Stache avaient beaucoup à apprendre l'un de l'autre. Prochainement, ils aborderaient des sujets plus sérieux : leur instinct de chasseur, leur passé plein d'épreuves, la question de savoir comment mieux se faire comprendre de leurs compagnons de vie humains … Mais ce fut dans cette délicieuse sérénité que Bernard et Sébastien les découvrirent, à la dérobée, derrière la porte-fenêtre du salon.

     

    La narratrice, étonnée, elle-même un tantinet euphorique, s'était alors lancée dans une sorte de virelai ancien à sa manière, une forme poétique que lui enseignait à l'époque un mentor du nom de Chveïk. Il n'était pas impossible que le dit mentor, s'il venait à lire ce récit, grinçât des dents devant l'usage qu'elle osait faire de son enseignement mais … tant pis ! Voici donc ce que la narratrice écrivit et fredonna :

     

    Ce fut dans la rue,

    Rencontre incongrue …

    Heureux !

    Mais serai-je crue,

    L'histoire parue ?

    Douteux !

    Si l'averse est drue,

    L'entente est accrue,

    Des deux.

     

    Un fait hasardeux ?

    Chat, chien amoureux ?

    Etrange !

    S'étonnent entre eux

    Les gars soupçonneux.

    Ça change !

    Ils plissent les yeux,

    L'air malicieux.

    LA GRANGE !

     

    S'y poursuit l'échange

    Quand la pluie dérange,

    On voit !

    Passerait un ange ?

    Chien et chat, mélange !

    Qu'est-ce donc, qu'entends-je ?

    Chante une mésange,

    Qui croit !

    ***

     photo-mesange-bleue-aux-aguets

    Si la mésange le croyait, Sébastien et Bernard avaient encore du chemin à faire avant de percer le secret de Zigue et Stache, s'ils y arrivaient jamais … Mais la narratrice comptait bien les y aider.

    ***

     

    Lenaïg - Complété le 20 avril 2010

     

    Images :

    www.iphonefondos.com, gouttes de pluie

    www.photo-pixel.eu, mésange bleue aux aguets.

     


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  • trottoir pas crottoir 1Marcher sur les trottoirs peut relever de l'exploit. Quand ils sont encombrés, ce n'est pas sans danger. A petits pas, à grandes enjambées, en talons fins ou en brodequins, dans la foulée de Di, qui met de l'énergie dans ses pieds plutôt que dans un réservoir, sur les traces de Moca, qui même sous la pluie délaisse le parapluie, les joues rosies ...

     

    Ah, moi non plus je n'aime pas les parapluies. D'accord, ils protègent bien quand on n'a pas d'imperméable ni de bonnet, mais on ne sait où les fourrer quand on descend dans le métro ou qu'on grimpe dans un bus, on les oublie au restaurant ou n'importe où mais surtout ... qu'ils sont offensifs, ces parapluies sur les trottoirs ; à vous de vous baisser, de vous tordre le cou pour éviter de vous les prendre en pleine poire ou, pire, de recevoir un coin de baleine dans l'oeil, quitte à descendre carrément sur la rue, à poser un pied sur la piste cyclable au risque de sursauter sous le timbre d'un vélo, furax que vous ayez osé empiéter sur son territoire !

     

    Attention aux crottes des amis canins, que leurs maîtres ne ramassent pas tous encore, même s'il faut avouer qu'ils ont fait bien des progrès. Sur les trottoirs encombrés, moult obstacles attendent le piéton. Si on n'est pas distrait, on coutourne facilement les lampadaires ou poteaux divers, mais on n'est pas à l'abri d'une sournoise boursouflure du goudron qui vous fait trébucher, alors que vous atteignez une honorable vitesse de croisière ... Si vous n'êtes pas tombé, vous continuez alors aussi dignement que possible, en claudiquant pendant un temps, si vous avez la chance de ne vous être fait sauter un talon. On se dit, dans ces instants plus ou moins critiques, qu'arpenter les rues de sa ville est plus difficile que gravir un sentier caillouteux, sans trop mentionner les pavés, pittoresques certes mais pas prévus pour des escarpins.

     

    Mais ce n'est pas tout, les obstacles sont aussi humains ! Il existe deux catégories d'humains qui marchent sur les trottoirs : les aériens et les "relous". La deuxième espèce s'avère malheureusement la plus répandue. Les relous sont des petits bulldozers qui avancent coûte que coûte, faisant s'écarter les imprudents qui croisent leurs chemins, contraignant tout le monde à se déporter, qui vous arrachent à moitié votre sac à main au passage, alors que vous l'aviez bien en bandoulière, qui vous meurtrissent une épaule ou un bras et sont déjà loin sans s'en rendre compte.

     

    Les groupes sur les trottoirs sont encore plus redoutables. Comme rien d'autre n'existe autour d'eux que THE groupe dont ils font partie, ils vous barreront le passage si vous voulez doubler, vous feront descendre sur la rue (même scénario que précédemment). Quelquefois, un électron du groupe fait prendre conscience aux autres qu'ils gênent et là, c'est bien ! Il arrive qu'on marche soi-même en compagnie et, si aucun membre de la compagnie ne présente de difficultés à se déplacer, on peut alors s'impatienter, voire fulminer intérieurement, qu'une conversation animée absorbe tellement les participants que la compagnie parfois se met à piétiner ou à s'arrêter net, comme si parler empêchait de marcher ! On se trouve donc à son tour aussi dans un groupe gênant. Il semblerait que la teneur d'une discussion ou d'un récit fasse oublier à certains le but final de l'action en cours : aller d'un point A à un point B ...

     

    Autrefois, dans les campagnes, les curés se livraient à leurs promenades de santé en lisant leur bréviaire, preuve que la marche est le prolongement de la pensée.

     

    On est aussi confronté à un autre petit scénario marrant. A qui n'est-ce pas arrivé, cela ? On se trouve à droite du trottoir ; face à soi arrive quelqu'un et la collision est inévitable si on ne fait rien. Alors on se dit : barre à bâbord ! et on s'exécute ... Mais l'entité qu'on a pensé éviter a opéré la même manoeuvre symétrique ! Hop, barre à tribord, qu'à cela ne tienne, se dit-on illico presto ... Hé hé, barre à bâbord cette fois-ci, s'est de son côté dit l'entité inconnue. Et il s'en suit un ballet plus ou moins gracieux, un tango impromptu ! Si l'entité n'a pas la tête à rire, on ravale vite le sien, de sourire, et ... on oublie !

     

    Mais certains piétons, quelle grâce ! Quelle agilité, quelle maîtrise de l'espace, quel respect de l'espace des autres, quelle attention généreuse envers leurs congénères passants ! Ces individus sont souvent jeunes (mais pas forcément), sportifs ; on sent qu'ilstrottoir pas crottoir 2 n'ont pas de hargne spéciale à décharger sur leur trajet ; ils se faufilent, car bien sûr ils sont souvent minces, très rapidement, sans vous toucher, sans vous heurter ; ils prévoient les changements de cap à la vitesse de l'éclair, ils présentent leurs excuses légères et décontractées, laissant dans leur sillage dynamique des petites notes de bonne humeur contagieuse.

     

    Sur les trottoirs le calme règne par moments et je me souviens d'un petit épisode que j'ai vécu sur l'un d'entre eux, peu fréquenté. Un moineau dégustait une part de brioche abandonnée devant moi et semblait hésiter à mon approche, tout en se dépêchant de picorer son mets de choix, prêt à s'envoler. Je fis un respectueux écart sur la rue, il ne bougea pas. L'Ours Castor se moque encore de moi : "Tu as fait ta BA ce jour-là !" Mais il aurait fait la même chose que moi.

     

    Lenaïg - 16 février 2009


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  • Pif-et-Hercule

     

    Un siècle que les pionniers s'étaient installés sur cette petite planète hospitalière Pif, dans la Galaxie du Concombre masqué, après que les humains eurent commencé à essaimer de la planète Terre. Sur Pif, à Muzoville comme partout, la petite criminalité s'effaçait devant un pouvoir fort qui, par ailleurs, favorisait les riches et pénalisait les plus pauvres. Et si les rues la nuit étaient à peu près sûres pour les quidams sans histoires, en revanche ce pouvoir fort était complice d'une pègre terriblement bien organisée, faisant son beurre de substances illicites de plus en plus variées en fonction des découvertes et des récoltes liées à l'exploration spatiale. Les maisons closes avaient pignon sur rue et, dans ce domaine-là, l'esclavage et les horreurs de la prostitution clandestine n'avaient plus cours. Les conflits religieux se réduisaient à des querelles de clocher, la conquête spatiale et la rencontre plus ou moins chaotique et tumultueuse avec des espèces pensantes inconnues ayant fait se rapprocher les humains croyants dans une tolérance mutuelle. Hormis ces particularités non négligeables, il n'y avait donc rien de nouveau sous le Spirou. Le … quoi ? Le Spirou ! L'étoile, le "soleil" autour duquel tournaient Pif et Hercule, entre autres.

     

    Ce soir-là, tandis que le spirou déclinant cédait la place à Belle-Lurette et Lily la rouge, les satellites naturels de Pif, un jeune homme, Arthur Rahan prenait le frais dans le jardinet du pavillon de ses parents. Tout pensif, se laissant distraitement mordiller l'oreille par son bipbip femelle familier, sorte de gros volatile coureur issu de la faune autochtone, à mi-chemin entre l'émeu et l'autruche, très efficace garde du corps aux coups de bec et de patte redoutables au demeurant, il contemplait l'imposant mur d'enceinte de la clinique Krapulax, en face, de l'autre côté de la rue.

     

    Le matin même, sur l'hebdomadaire informatisé de Muzoville, Le Courage du pionnier, Arthur avait pris connaissance d'une annonce et y avait répondu promptement. Rahan junior, ses études de commerce terminées, peinait à se faire embaucher. Sur Pif, tout marchait au piston -une coutume qui ne datait pas d'hier- ; grâce à son père, il aurait pu faire carrière dans la Compagnie galactique de robotisation mais il était allergique à l'hyperespace.

     

    Derrière le mur d'en face, la mystérieuse clinique Krapulax, également productrice de musique universellement célèbre, recrutait ! Pourvu qu'il obtienne un entretien, déjà, histoire de passer de l'autre côté du mur et de satisfaire sa curiosité ! Il correspondait au profil brièvement décrit dans l'annonce : diplômé de droit commercial et de musique, bon musicien et pratiquant des arts martiaux. Il pensait donc avoir toutes ses chances, non seulement de trouver un poste correspondant à ses capacités mais aussi de découvrir qui étaient ces patients de la clinique, qu'on entendait chanter divinement les jours de beau temps dans les cours intérieures, ou gémir d'un désespoir absolu la nuit quand on avait des insomnies. Les portails du mur s'ouvraient rarement, l'essentiel des allées et venues étant aéroportées.

     

    A suivre

     

    Lenaïg

    ***

     

    Collection de murs

     

     

    mur-de-berlin

     mur-de-berlin 2

     

    Mur des lamentationsmur-palestine

     

     La Grande Muraille

     

     


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  • pic 5 97DE23949

     

     

    J'ai 54 ans.

     

    Qu'est-ce que j'ai fait de ma vie ?

     

    Est-ce que j'ai vraiment utilisé le temps imparti

             du mieux que je le pouvais ?

     

    Est-ce que je n'ai pas gaspillé ma jeunesse ?

     

     

    Est-ce que je n'ai pas fait trop de mal

             autour de moi ?

     

    Est-ce que je n'ai rien fait d'irréparable ?

     

     

    Que faire ?

     

     

    Comment continuer ?

     

     

    Comment choisir un juste chemin ?

     

    Comment ne pas me tromper, ne pas échouer

             dans le choix de mes priorités ?

     

     

    Je n'ai pas peur de mourir, j'ai peur de ne pas savoir

             tirer les leçons de ma vie, de ne pas savoir faire usage

             au mieux du temps qui me reste sur cette terre.

     

     

    Est-ce que je suis capable d'AIMER vraiment ?

     

     

    Christina

    ***

     

    Photo du tableau :

    Jacqueline aux mains croisées

    Pablo Picasso 1954

    Musée Picasso


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