• Cirque, montage chapiteau - Univers Circus

      

     

    Ayant toujours fait fi d’une vie convenue qui  laisserait le temps de traquer des cheveux blancs dans le miroir et de se vautrer dans le stupre et la luxure, la détective française Bernie Bonnet –nom de code Baby- venait d’accepter sa nouvelle mission et de découvrir l’identité de son partenaire, surnommé le Mythomane, à tort d’ailleurs car ses soupçons et prédictions, aussi farfelus qu’ils fussent au départ, les conduisaient , sur terre, sur mer et dans les airs, même si ce n’était pas tout droit, jusqu’au Graal recherché. Cinq ans qu’ils n’avaient pas joué les baltringues ensemble et leur binôme en avait monté et démonté des coups fumants, surmonté des épreuves aussi harassantes que le montage et le démontage des chapiteaux de cirque ! D’ailleurs, cela commençait à lui manquer. Trop de routine et pas assez de cirque dans son existence actuelle !

     

    Pour l’heure, Baby, bien reposée après son voyage jusqu’au Canada, attendait dans la suite confortable de l’hôtel réservé par le richissime vieillard commanditaire, que l’Anglais Ryan Hayfeaver la rejoignît. Tandis que Mytho Ryan recevait l’hostie à sa messe dominicale, Baby s’offrait des bulles de champagne et grignotait des asperges. Elle avait déjà tiré des conclusions du courriel étoilé de fautes d’orthographe volontaires qui servait de support à leur mission et s’impatientait de les confronter aux hypothèses que Ryan allait apporter de son côté.

     

    Comment le commanditaire Lothar Von der Derch avait obtenu ce message électronique importait peu –l’argent tout puissant, assurément-, mais ce n’était pas à eux deux, spécialistes des brouillages et filigranes en tout genre, que les stratagèmes employés résisteraient ! Il suffisait de poser un plectre sur les bonnes cordes pour que les interférences disparussent et que s’affichât le vrai sens d’un message dans toute sa clarté. Les carottes étaient presque cuites, se disait Bernie avec assurance : le message émanait d’une secte détentrice de la machine convoitée par Lothar. Il s’agissait maintenant de la localiser …

     

    Ce que fit Ryan, plus performant que jamais, après leurs retrouvailles enthousiastes au restaurant de l’hôtel devant un repas des plus roboratifs. Ils occupèrent le reste de la journée à dresser le chapiteau, euh pardon à échafauder leur plan d’action. Le lendemain, dès potron minet, ils enfourchèrent chacun une moto et vogua la galère ! Ils infiltrèrent la secte à pas de loup et de mains de fer dans des gants de velours. Un mois après, ils ramenaient non seulement la machine et son mode d’emploi  mais, plus fort encore, le savant qui allait avec ! En termes corrects autant qu’élégants, pour rendre justice à celui-ci, le concepteur de la machine, qu’ils avaient réussi, par des arguments prudents et intelligents, à faire s’affranchir sans regret de sa dépendance mystique.

     

    Leur passage, puis leur fuite, découverte trop tard, chamboulèrent les rouages de la secte, qui but son calice jusqu’à la lie ! La machine en question devait permettre, entre époustouflantes prouesses, d’entrer en contact avec des individus dans le coma. C’était le vœu le plus cher de notre milliardaire : communiquer avec sa femme bien aimée qu’un accident cérébral maintenait dans un état d’apparente inconscience. Le vieux monsieur fut satisfait au-delà de ses espérances, car il ne tarda pas à doubler les honoraires de Bernie Bonnet et Ryan Hayfeaver. L’histoire n’est pas finie, mais elle fait déjà grand bruit ! Aux dernières nouvelles, Marisol Van der Derch venait de rouvrir les yeux et de prononcer ses premiers mots depuis des années, en espagnol car, rappelons-le, c’était sa langue maternelle. Les media mondiaux s’étant emparé de l’affaire, il n’y avait plus qu’à suivre les captivants développements et péripéties.

     

    Lenaïg,

    selon les trente-cinq mots imposés du jeu Les Mots ... tion dans le magazine L'Esprit de la lettre, créé par Dominique Bar et Freddie Sailor sur facebook.

     

    Illustration : les baltringues, voir le site Univers Circus.

     

     


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  • autres-villes-douarnenez-france- Locronan de nuit - www.image-photo.linternaute.com
     
     
    Dans la noirceur d'une nuit
      
    L'Effaceur, un tueur à gages, arborait sans crainte de la démesure, dans la pénombre de la ruelle pavée, déserte à cette heure, d'une ville restée joliment moyenageuse, son sabre oriental à lame large et recourbée, qui brillait par contraste avec son paletot pâlot, couleur de silicium.
     
    Le cimeterre était bien l'arme vengeresse choisie cette fois-ci. Il se l'était procurée manifestement sans moche anicroche et son client avait insisté pour qu'il fasse rouler les têtes de ses victimes. L'accord et la stratégie avaient été conclus dans le secret de la salle en sous-sol du bar huppé La Coquille, autour d'une succulente table, à laquelle succédèrent de très bons cigares ; en cas de changement nécessaire, un plan B était même prévu, tant la haine vivace du commanditaire tenait à ce que l'entreprise macabre réussisse. Cette nuit, qui nuirait définitivement à son ennemi et à sa famille, devrait marquer la fin de ses déboires et le début de sa résurrection à lui.
     
    Seulement, dans ce monde interlope où évoluaient ces individus sans foi ni loi, même les plus machiavéliques pouvaient se trouver à la merci de trahisons et ce que les deux hommes ignoraient, c'était qu'une lettre anonyme avait prévenu les victimes désignées, qui avaient fui. Un piège attendait notre Effaceur, qui risquait de se trouver fait comme un rat ... A moins que son sixième sens ne l'en avertisse à temps ... Auquel cas, il aurait intérêt à disparaître, lui aussi, la moitié de ses gages en poche ...
     
     
    Lenaïg,
    Nouvelle courte, instant pris dans la noirceur d'une nuit particulière. Je ferai remarquer que, dans cet instant, personne n'est tué. Ce qui s'est passé avant, ce qui se passera après est laissé libre à l'imagination !
     
     
    Mais, que je n'oublie surtout pas ! Ce texte a été rédigé sur ... des mots imposés, lui aussi, pour le magazine L'Esprit de la lettre, de Dominique Bar et Freddie Sailor, sur facebook. Les Mots ... tion de la semaine dernière !
    La liste des mots pour le mag de la semaine prochaine ne devrait pas tarder à se faire connaître ...
     
     
    La photo est due à L'Internaute, c'est la bonne vieille ville de Locronan dans le Finistère, où je ne souhaite pas du tout que de tels événements se produisent. Disons qu'elle joue ici un rôle, comme un décor de cinéma !
     
     
     

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  •  lampe-de-salon-pistolet1 - www.blog-deco-maison.com

     

     

     

    Chaque matin, quand je me réveille ... Banal, ça, comme phrase, hein ? Pourtant, si tu ne te réveilles pas, il n'y a plus d'histoire ; c'est que que tu as rendu le dernier soupir, que tu t'es éteint, que tu as passé l'arme à gauche, selon les expressions consacrées. Mais si tu es devant moi, jeune journaliste "Frenchie", c'est parce que cette phrase n'est point banale pour moi. Tu es fûté, tu as réussi à me trouver !

     

    Si tous les êtres vivants se réveillent le matin, chacun n'a pas, comme moi, tout de suite en tête deux idées bien nettes qui ne le lâchent plus. Mon revolver étant prêt, il se peut qu'aujourd'hui je passe effectivement l'arme à gauche mais ce sera parce que je l'aurai coincé et qu'il m'aura tiré dessus le premier. Au fait, pour plaisanter un peu, en tant qu'états-unien d'Amérique, je ne suis pas sûr que, politiquement, nous ayons la même conception, aussi tranchée, de ce que sont la gauche et la droite.

     

    Bref, ma première motivation au réveil, je résume, est l'esprit de vengeance. Hors la loi moi-même, ayant restitué mon arme officielle et ma plaque de police, actuellement recherché par celle-ci, je veux avoir en face de moi l'ordure qui a tué ma femme et mes enfants. Si j'arrive à le neutraliser en le gardant en vie, je nous livrerai tous les deux à la justice. Si cela tourne mal, j'espère lui faire passer son arme à gauche, à lui, avant d'être abattu.

     

    Ma seconde pensée est que, pour moi, le jour qui commence est peut-être le dernier. Porté par ma motivation première, je laisse mon corps apprécier les milliers de gouttelettes de ma douche et je descends savourer les oeufs au plat, les saucisses et haricots, les toasts de mon petit déjeuner. Je prends des forces en vivant l'instant sans penser à rien. Puis je me remets en chasse.

     

    Pourquoi je te fais confiance, petit ? C'est juste au "feeling" ! Et, avec toi, j'ai eu l'impression de redevenir humain. Tu pourras raconter mes longues confidences quand tout sera fini.  Adieu, ou au revoir, petit.

     

     

    english-breakfast-blackpudding - www.londondailypicture.com

     

     

     

    Lenaïg,

    pour le nouveau jeu du texte sandwich de Marc Varin sur son forum Plumes au vent.

    Références des illustrations dans l'album Fantaisies 3.

     


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  • Nous pauvres mortels entassés dans des villes tristement nimbées d'une pollution qui nous masque les milliards d'étoiles au firmament, occupés à tricoter des jambes sur les trottoirs pour nous éviter les uns les autres ou les coups de boutoir des sacs à dos, les coudes des passants pressés, nous qui nous hâtons nous-mêmes d'aller gagner notre pain, de rejoindre le lieu de notre travail lorsque nous en avons un, soumis à nos patrons souvent arnaqueurs, portés par l'espoir diaphane de grappiller deux ou trois heures d'une bonne soirée en liberté, une fois de retour dans nos tanières avant de repartir de plus belle, l'aurore venue, emportant pour nous donner du courage le souvenir des baisers de nos maris ou femmes et de nos enfants, nous qui sommes friands durant les fins de semaine de romans ou de feuilletons télévisés policiers,
      
    nous ignorons que les enquêtes n'ont pas lieu qu'au Quai des Orfèvres, à Manhattan, Minneapolis ou Los Angeles.
      
    corbeau freux - www.dinosoria.comAccordons-nous un petit moment pour nous pencher sur une affaire peu ordinaire. Lorsque nous en aurons pris connaissance, nous n'en éprouverons aucun regret, promis ! Cela s'est passé dans la campagne profonde. Les héros se nomment : Pierre Corbeau, commissaire de la police animalière du hameau et son adjoint, Aliboron Polo, liés depuis l'enfance par une solide amitié. Les gendarmes humains enquêtèrent de leur côté ; ils ne surent jamais que le coupable du crime leur fut livré par les remarquables Corbeau et Polo.
     
    Les faits : le Père Thomas était effondré car, au matin, il avait découvert ses ruches complètement saccagées, tout son miel disparu et une bonne partie des abeilles tuées ou à l'agonie, asphyxiées par un produit toxique. Tout le village essayait de lui remonter le moral : le maire et les gendarmes faisaient des conjectures et penchaient pour la culpabilité d'étrangers, venus peut-être de cinquante kilomètres de là, ou même de la ville, attirés par la perspective de se faire du blé grâce au nectar du Père Thomas, dont la réputation allait en s'étendant.
    Venait d'arriver le Père Martin, directement du salon régional de la confiture, qui se tenait à la préfecture où il avait passé la nuit, à ses dires.
    Exerçant un commerce un peu du même cru, il se montra d'autant plus compatissant de l'affreux coup du sort qui frappait le Père Thomas. Il invita tout le monde chez lui, à se réconforter et à se creuser les neurones devant un petit salé aux lentilles arrosé de beaujolais ou de muscadet.
    A dix heures du matin, voilà qui tombait bien.
     
    Mais tôt ce jour-là, un Aliboron fou de peur, entouré d'abeilles virevoltantes, avait fait irruption au pied de l'arbre bureau où Pierre Corbeau venait de se toiletter les plumes, après s'être sustenté de trois ou quatre juteux vers de terre. Ah ! Est-il besoin de préciser : Aliboron est un âne, comme son illustre prédécesseur de l'oeuvre de La Fontaine ; Pierre Corbeau est ... l'oiseau du même nom ? Belle alliance du sens de l'observation aiguisé, nourri d'un oeil acéré, favorisé par des approches aériennes et d'un entêtement à toute épreuve pour la traque des indices au niveau du sol.
     
    L'âne de l'Odet - Photo L'Ours CastorEn l'occurrence, Aliboron avait perdu tous ses moyens, craignant de se faire piquer, sourd aux appels à l'aide des abeilles. Corbeau calma les esprits et recueillit le témoignage des insectes survivants, encore un peu étourdis. Le crime était l'oeuvre d'un seul humain, révélèrent-elles. Corbeau prit son envol, suivi des abeilles les plus vaillantes, assista à la réunion des humains, les suivit discrètement chez le Père Martin ... L'équipe animalière explora toute la propriété tandis que les humains prenaient leur collation. Les abeilles se dirigèrent sur un vieux débarras au fond de la cour, qui les attirait. Ils entrèrent par un carreau cassé et découvrirent le miel entreposé.
     
    Corbeau pensa vite et bien. Aliboron fit irruption dans la cour, poursuivi maintenant de son plein gré par l'essaim reformé par les survivantes, poussant des braiements assourdissants, faisant surgir tous les humains, gendarmes et maire compris. Aliboron les guida mine de rien au petit débarras et les abeilles s'agglutinèrent sur la porte, ou se reglissèrent par le carreau cassé. "Qu'y a-t-il donc à l'intérieur ?" s'interrogèrent les gendarmes. Leur enquête était bouclée.
     
    Corbeau réussit à grand peine à persuader les abeilles de modérer leur furieux désir de vengeance par une dose de tolérance et l'individu peu reluisant, jaloux du succès de son confrère, s'en tira douloureusement d'une douzaine de piqûres. La justice animalière se montra clémente, la justice humaine suivit son cours.
     
     
    Lenaïg,
    selon les mots imposés (en gras),
    pour le magazine L'Esprit de la lettre sur facebook.
    Références des illustrations dans l'Album Animaux. 

     

     

    Police animalière - Bricolage (trop) hâtif de Lenaïg pour Pierre Corbeau et Aliboron Polo

     

     


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