• Tourisme sexuel - Michel Thibault

      Cayo-Largo,-Cuba

     

     

     

     

    Tourisme sexuel

     

     

     
     Un couple dépareillé s'est présenté un soir à la réception de l'hôtel cubain où j'ai séjourné la semaine passée.
     
     
    Lui, un Cubain dans la vingtaine à la peau noir comme l'ébène. Elle, une dame d'au moins 70 ans à l'épiderme rose légèrement ridé. Une touriste du Québec qui ne comprenait rien de ce que la commis lui disait en espagnol. Son jeune compagnon m'avait entendu baragouiner la langue de Castro. Il m'a apostrophé et m'a demandé de traduire, svp.
     
    L'employée au comptoir m'a expliqué que le tarif était de 70 $ par jour pour héberger une personne dans une chambre. J'ai fait la traduction à la vieille dame. Elle est restée bouche bée, visiblement mal à l'aise. «Madame, vous êtes tous les deux majeurs et vaccinés. Je ne juge pas. Je fais simplement la traduction», je lui ai dit. Elle a hésité puis elle a lancé : «70 $ par jour même s'il couche dans ma chambre ?» «Oui», a confirmé l'employée. «D'accord», a dit la touriste. Le visage de son compagnon s'est illuminé. Il lui a donné un bisou sur la bouche en passant son bras autour de sa taille.
     
    On a vu les deux tourtereaux sur la plage avoir des «rapprochements» style Occupation Double. Ni l'un ni l'autre ne parlait la langue de l'autre mais ils les mêlaient pareil. Entre-temps, on a appris qu'elle avait 80 ans. Une femme bien conservée qui ne devait pas avoir à payer pour un rendez-vous galant dans sa jeunesse, au contraire.
     
    Son ami Cubain m'a encore interpellé quelques jours plus tard. «Je ne veux pas m'imposer. Demande lui si elle veut que je parte. Combien de jour elle veut me garder ?», il m'a demandé. «C'est une bonne personne. Pour moi, l'âge n'a pas d'importance», il a précisé. J'ai traduit à la dame. Elle a dit qu'elle voulait qu'il reste sans préciser de limite. Rebisous.
    À 70 $ par jour, la facture montait vite. «Ça vaut la peine», a assuré l'octogénaire en souriant.
     
    En général, quand un étranger âgé se promène au bras d'une jeune Cubaine en manque de tout, un léger haut le cœur nous étreint. On trouve dégueulasse de profiter de la pauvreté des gens pour obtenir des services sexuels.
     
    Avec la madame plus âgée, ça passait mieux. Les gens réagissaient plutôt bien. Plusieurs trouvaient ça même «mignon». La sexualité chez les ainés est taboue. Voir une octogénaire affirmer ses besoins et les combler avait peut-être un côté rafraichissant.
     
    Mais tous ne voyaient pas la chose d'un bon œil. Après le départ des émules d'Harold et Maude, l'employée à la réception de l'hôtel a eu cette réflexion : «Elle va faire une crise cardiaque ! Les touristes sont fous !»
     
    Michel Thibault
    Samedi 22 janvier 2011
     
    *** 
     
      
    Plage, alcool et sexe
     
     
    Sur la plage, l'autre jour à Cuba, un sexagénaire à moitié chauve et une jeune fille de la place occupaient des chaises longues voisines. La main tachetée de vieillesse du bonhomme a atterri sur la cuisse juvénile allongée à côté.
      
     
    C'est un des visages du tourisme sexuel auquel le journal La Presse a consacré une série d'articles cette semaine. Ironiquement, après en avoir vu de toutes les couleurs sur ce plan pendant mes vacances, je tombe sur ces textes à mon arrivée.
    Les gars y sont généralement pointés du doigt mais je puis vous dire que les filles ne sont pas en reste.
    Leurs motivations paraissent toutefois variables. Il existe des femmes peu gâtées par la nature, avec une faible estime d'elles-mêmes, qui vont à Cuba pour trouver l'Amour, voire perdre leur virginité. Et l'excursion leur réussit. Un Cubain les courtise. Elle croit qu'il ne voit pas ses bourrelets mais c'est plutôt parce qu'il perçoit en elle un billet d'avion aller seulement vers la richesse. Deux pauvres réunis. Lui d'argent et elle de tendresse. Triste.
    Il y a aussi les filles qui vont faire la fête dans le Sud : plage, alcool et sexe. Elles n'attendent pas que les gars les courtisent. Elles prennent les devants. «Je viens de voir un super beau gars au bar. Je lui ai dit qu'il me plaisait. Il a dit que je lui plaisais aussi. Je veux le baiser. Avez-vous des condoms ? Je ne fais pas ça sans condom.» Une compatriote avec qui nous avions échangé quelques paroles est venue nous demander ça bête de même tandis qu'on prenait l'apéro. C'est un exemple.
    Un autre soir, deux amies de filles dansaient la salsa en se retroussant les jupes dans l'aire du snack bar. On les a vues aller titiller des jeunes hommes en frottant leur buste ici et là.
    J'en ai entendu des plus vulgaires pousser des chansons grivoises à tue-tête sur la plage : «On s'en vient se faire (mot salé de votre choix) par les latinooooos». Frotti-frotta dans la mer avec les sauveteurs. Un moment donné, une de ces touristes québécoises sur le party en soulève un hors de l'eau en demandant à la ronde : «Yé tu bandé ! Yé tu bandé !»
    Ha ces jeunes hypersexualisés ! pensez-vous. Pas du tout. Les filles dont je vous parle n'avaient pas vingt ans. C'était toutes des dames dans la quarantaine.
    J'en ai même vu une deux fois plus vieille se payer les services d'un jeune Cubain. Pour les détails, vous lirez mon billet intitulé «Tourisme sexuel» dans Le Soleil de demain.
    Bien sûr, je n'ai rien contre les rapprochements entre adultes consentants. C'est le genre pas subtil qui me rebute. L'influence d'Occupation Double ?
     
    Michel Thibault
     
      Tourisme sexuel - www.ecpat-france.org
     
    ***
     
     
    Note de Lenaïg : Occupation double, émission de téléréalité québécoise.

     


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  • Commentaires

    1
    Jeudi 27 Janvier 2011 à 03:29
    jill-bill.over-blog.

    Bonjour Michel, Lena, plus rien ne m'étonne en ce "bas" monde... La dame octogénaire bien conservée me fait sourire... Incognito par là-bas elle se donne du bon temps avec 4 fois plus jeune... sans trop de complexe !! Quant aux autres protagonistes... la pauvreté fait loi.... Merci pour ce billet.  Bon jeudi à vous deux... Bizzzzzz de JB 

    2
    Jeudi 27 Janvier 2011 à 20:25
    Lenaïg Boudig

    Bonsoir Michel. C'est en effet un triste constat qu'on peut faire, en dehors de toute histoire individuelle et sans vouloir condamner les personnes que tu nous a décrites, sauf les fofolles de la quarantaine qui profitaient d'être hors de leur pays pour faire et dire n'importe quoi. Aller faire ailleurs ce qu'on trouverait honteux de faire chez soi, c'est du propre !

    Et la prostitution reste donc le plus vieux métier du monde et dans les conditions déplorables qu'on sait. Ce doit être un commerce aussi lucratif que la drogue, mais pas pour ceux qui en sont les victimes.

    Je te remercie pour tes deux billets, complémentaires, qui nous font réfléchir : à condamner sans condition la prostitution enfantine. Pour les cas de dame bien mûre qui s'offre un gigolo (qui a besoin de manger !) ou les fofolles sur leurs plages exotiques, il faut nuancer. Moi je fais ma part des choses !

    Amitié.

    3
    Jeudi 27 Janvier 2011 à 20:27
    Lenaïg Boudig

    Coucou Jill, merci beaucoup à toi d'être venue lire les deux billets et, surtout, d'avoir pris la peine de laisser ton appréciation. Bizzzzz !

    4
    Vendredi 28 Janvier 2011 à 01:29
    marie-louve

    Je trouve déplorable ces comportements. Quant au tourisme sexuel, je ne peux accepter ce comportement qui est basé sur un rapport de force inéquitable. Obtenir de la sexualité contre de l'argent ou d'autres profits quand l'autre devient un objet de marchandage dû à sa pauvreté, le coeur me lève ! Honte sur ces abuseurs ! La vulgarité est d'un autre ordre.

    Merci Léna de nous offrir un espace pour partager nos idées sur un sujet aussi vieux que le monde. Bonne soirée. Bizs.

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