• Défi n° 76 chez Lilou : extrait du journal intime de René Tanouveau - Lenaïg

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    Je mangeais tous les jours mon pain blanc et si je ne buvais du petit lait qu'au figuré, étant plutôt fort de café, je mettais des tonnes de beurre dans mes épinards, je n'en perdais pas une miette, je me goinfrais ! J'étais le roi de la publicité, toutes mes petites phrases faisaient mouche et on me courtisait : il y en avait toujours des nuées de ces mouches, justement, qui tournoyaient autour de mon coche, attrapant au passage l'argent que je jetais allègrement par mes fenêtres, en ayant jusqu'à ne pas savoir quoi en faire et tout heureux de le partager !

     

    Mon comptable s'arrachait tant les cheveux qu'il n'en avait plus sur le caillou et ses mises en garde me faisaient rire, car je n'ai jamais su manier l'épée et je restais aveugle, sur mon petit nuage, sans vouloir remarquer celle de Damoclès qu'il brandissait au-dessus de ma tête.

     

    Et il y eut ce flop retentissant, l'échec de la campagne électorale du candidat qui m'avait choisi pour porter haut son chapeau. Mais pourquoi m'accoquinai-je donc avec lui ? Qu'allai-je faire dans cette galère qui me fit boire la tasse ? Il s'en est fallu de peu que ce soit mon bouillon d'onze heures ; en effet, je me suis soudain senti plus bas que terre, au fond du panier percé que j'étais, où je me serais noyé si quelques amis précieux ne m'avaient pas sorti la tête hors de l'eau, eux qui n'avaient pas détalé comme des lapins et ne m'en avaient pas posé non plus.

     

    Et voilà, c'est maintenant que je dors dans de beaux draps que je n'ai plus, le beau linge s'est complètement détourné du panier percé que j'étais car la poule aux oeufs d'or naguère gaie comme un pinson et qui faisait l'autruche se retrouve sur la paille. Mais si j'ai l'estomac dans les talons et que mes faims de loup doivent faire place à un appétit d'oiseau sans pour autant que je doive manger des grives faute de merles, encore moins de la tarte -et ce n'en est pas, qu'on me croie !-, je n'ai pas dit mon dernier mot, bien au contraire car je compte vite me remplumer grâce à ma plume alimentée par ma mémoire d'éléphant et mon regard d'aigle dans mon oeil de myope : la poule aux oeufs d'or sur la paille n'a pas les deux ergots dans le même sabot et elle va réserver un chien de sa chienne à la nuée de mouches qui l'encensaient de leurs yeux de biches ou de merlans frits pour la rejeter ensuite comme une vieille chaussette !

     

    Oui ! La poule sans oeufs d'or sur la paille, que je suis et qui en est à se moucher du coude, va pondre un roman sur les arcanes du pouvoir qui en fera trembler les piliers sur leur base ! Ils se reconnaîtront ou croiront se reconnaître, ils se soupçonneront mutuellement et pourtant ils ne pourront pas me chercher midi à quatorze heures, je ne nommerai personne ; la poule sans oeufs d'or deviendra renard rusé et  nid rat tout rat porc avec la raie alitée, poil au nez. La zizanie avancera telle un cheval au galop qui donne des coups de pied dans la fourmilière et je pourrai me réjouir d'assister à la mêlée de ceux de qui je fus la vache à lait dont ils n'ont plus rien à cirer ! Ils s'arracheront mon livre comme les petits pains que je pourrai à nouveau m'offrir au petit déjeuner, pour en décrypter les moindres recoins et leurs adversaires feront de même. S'ils envoient des fins limiers fouiner dans mes affaires et mon passé, ils en seront pour leurs frais tout en me renflouant car il faudra qu'ils dorment debout pour me chercher des poux dans la tête et en trouver qui soient crédibles ! Si coups bas il y eut dans ma vie précédente, ils ne savent que trop que ce ne fut pas moi qui les tramai mais eux, et les serpents n'auront plus qu'à se mordre la queue tout en la tenant basse ou dans leur poche en mettant leur mouchoir par-dessus.

     

    Ouf, ça y est, l'onde de choc du bouquin s'est calmée. Mézigue renard qui faisait le zouave et le brave pour masquer ses incertitudes est rassuré, sa ruse a marché, même couru ! Les poux qu'on lui a cherchés dans la tête n'ont été que la souris dont la montagne a accouchée : dans les milieux autorisés mais néanmoins glauques de la politique et du mercantilisme pur et dur, la rumeur ressasse que bibi a, en fait, toujours eu un petit vélo dans la tête et ne peut être pris au sérieux ; quelle bonne idée, celle du vélo, je m'y suis remis et ce n'est pas ma tête que j'assois dessus ! Ainsi, je garde la forme, sans les formes (oui, c'est banal mais cela repose de s'appuyer sur un cliché !).  Renard s'est remplumé, sans excès, grâce à ses pieds dans le plat et sans chercher désormais à mettre les petits dans les grands, il ne met plus ses nouveaux oeufs dans le même panier, qui a cessé d'être percé. De quoi voir venir le temps d'écrire de nouveaux romans et ... l'éditrice a un aussi beau ramage que plumage, c'est une colombe, pas un corbeau et renard ne veut plus être goupil, encore moins poule aux oeufs d'or ou non, ni mouillée, ni même coq pour plastronner, juste un soupirant sur les rangs qui se pliera en quatre et mettra les bouchées doubles pour gagner non seulement son pain mais le coeur de sa dulcinée.

     

    C'était un extrait du journal intime de René Tanouveau

     

     

    Lenaïg

     

    Illustration : www.fr.123rf.com

     

     

     

     

     

     

     

    Pour le défi de Lilou-Frédotte (clic) :

     

     

     

    A    L’ABORDAGE …

                                   défi 76

                             

    Au pied de la lettre       

     

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    Quel drame terrible a bien pu pousser

    celui qui a "réellement" donné sa langue au chat ?

     

    A partir d'une expression choisie

    dans le poème de

    Au-pied-de-la-lettreClaude ROY

     

    Je vous invite à inventer une histoire en prenant

    littéralement une ou plusieurs de ces expressions

    au pied de la lettre.

     

    D’autres expressions ? Clic LA PIOCHE

     

     

    Postez votre texte pour

    Lundi 05 mars à 8 heures 

    (programmez)

     

    COMMUNAUTE CROQUEURS DE MOTS

     

     

     

    N’oubliez pas les jeudis en poésies

     

    jeudi 1 mars : amitié

    jeudi 8 mars : harmonie

     

     

    http://www.lilou-fredotte.com/article-a-99141852.html

     

     

    Poème de Claude Roy

    Au pied de la lettre

    Avoir un cœur d'or,
    Battre la campagne,
    Coûter les yeux de la tête,
    Faire les quatre cents coups,
    A dormir debout,
    C'est la mer à boire,
    Être connu comme le loup blanc,
    Avoir les yeux plus grands que le ventre,
    Se dorer la pilule,
    Aimer à corps perdu,
    Passer l'arme à gauche,
    Il tombe des cordes,
    Avoir la dent dure,
    Lécher les bottes,
    L'estomac dans les talons,
    Avoir un pied dans la tombe,
    Mettre les pieds dans le plat,
    Poser un lapin,
    Décrocher la lune,
    Manger sur le pouce, T
    Tirer le diable par la queue,
    Tenir la chandelle,
    S'envoyer en l'air,
    Tuer le temps.


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  • Commentaires

    1
    Lundi 5 Mars 2012 à 06:23
    libre  necessite

    Un bon gars bien sympathque ce René, oui il a bien avalé toutes les périphrases, les métaphores et toutes les exxpressions populaires mais c'est ce qui lui donne cette bonhommie probablement paysanne. Bises Dan 

    2
    Lundi 5 Mars 2012 à 07:48
    Violette dame mauve

    Que de talent dans ces défis!

    merci de ta visite

    Amicalement

    Violette

    3
    Lundi 5 Mars 2012 à 08:42
    Nounedeb

    Exhaustif! Je me demande si j'ai tout bien compris! Belle journée.

    4
    Lundi 5 Mars 2012 à 08:43
    Lilou

    Voilà un défi qu'il est bien relevé. Le texte est bien contruit plaisant à lire et beaucoup d'expression. Ce qui demande un travail de recherche important.

    Je te remercie

    @tantôt

    5
    Lundi 5 Mars 2012 à 09:10
    olga.au-coeur-des-mo

    Il est cuit aux petits oignons, ce défi !!! Ouf il va falloir lui tirer les vers du nez !!!!

    Terrible !!!

    Amitié

    Olga

    6
    Lundi 5 Mars 2012 à 09:11
    Dominique

    Bonjour Lénaïg,

    C'est super !!  René Tanouveau à beaucoup de talent peux tu lui dire de ma part ?

    Bises

    Dominique

    7
    Lundi 5 Mars 2012 à 09:20
    jill-bill.over-blog.

    Bonjour Lena, si j'osais je te dirai embrouillée comme les oeufs l'affaire René Tanouveau !   Tu as pondu au plus que parfait.... Bravo Lena... Bisous de JB

    8
    Lundi 5 Mars 2012 à 10:08
    Monelle

    Je ne sais qui de toi ou René Tanouveau a le plus de talent... bravo pour cette histoire qui relève superbement le défi de Lilou !!!

    Bon début de semaine  – bisous 

     Monelle

    9
    Lundi 5 Mars 2012 à 11:35
    askelia

    Un coucou et merci pour ce bon moment de lecture !!

    10
    Lundi 5 Mars 2012 à 11:43
    leblogdhenri.over-bl

    Bonjour Lenaïg,

     Bravo un texte bien construit trés agréable à lire. Défi magnifiquement relevé. Bien amicalement.

    Henri.

    11
    Lundi 5 Mars 2012 à 12:22
    mansfield

    Très beau texte bien illustré par toutes ces expressions et très cohérent, bravo! 

    12
    Lundi 5 Mars 2012 à 15:36
    Marie-Louve

    Ça me coupe le sifflet ! On peut affirmer que ce texte et son auteur ont de la branche ! On en bave des ronds de chapeau ! Bravo c'est plus que parfait comme on l,a déjà qualifié. Bon lundi Léna. Bises.

    13
    Lundi 5 Mars 2012 à 17:23
    Malika

    Belle participation.

    14
    Lundi 5 Mars 2012 à 21:49
    chloé

    Quel onde de choc! des idées à la pelle, des tournures de phrases, expressions et jeux de mots a être "pliée en quatre! Quelle imagination Lenaïg on sent que tu t'es éclatée à faire ça et c'est contagieux ! MDR! Amicalement.Chloé

    15
    Lundi 5 Mars 2012 à 23:18
    Tricôtine

    René Tanouveau en avait gros sur la patate de tous ces poils qu'on avait cherché sur ses oeufs d'or de son panier percé. mdr !! Lénaïg, j'ai lu, non bu d'une traite ce petit lait pressurisé qui forme un fromage onctueux que le renard envie au corbeau !! j'arrête là... il y aurait de quoi écrire un roman de Renard à la suite du tien, tant c'est empli de finesse et de jeux de mots tous aussi croquants les uns que les autres !! , bref... j'ai adoré !!! merci pour ce sourire me voilà presque dans de beaux draps, je crois qu'il est l'or monseignor !! bizzzoux

    16
    Mercredi 7 Mars 2012 à 08:10
    fanfan

    Une histoire à dormir debout mais bien amusante ! Un défi bien imagé !!

     

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