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2011 Rue Barré, Montréal P.Q. - Di et Marie-Louve - 7/2 Di
Avertissement: Ces textes sont politically incorrects et ne reflètent pas les opinions des auteures.
7/2. Josette et Henriette (par DI)
Avant de quitter Henriette Labelle-Rathé au téléphone, Josette lui donna rendez-vous chez elle le lendemain matin vers midi, pour ensuite aller manger un petit quelque chose au restaurant. Elle jeta un coup d’œil rapide vers Roger étendu sur le tapis, encore sans connaissance. Elle chercha du regard un contenant et aperçu sa belle théière décorative, cadeau de mariage de son amie Raymonde, qu’elle n’avait pas revue depuis. Elle haussa les épaules, la remplit d’eau et versa le contenu au visage de Roger, qui en revenant à lui, la regarda comme s’il ne l’avait jamais vue.
- Ne prends pas l’habitude de tomber dans les pommes mon vieux Roger. Je ne suis pas équipée en Baby Duck pour te remettre sur le piton comme Cunégonde Brouillette-Légaré.
À ces mots, Roger se souvint pourquoi il avait perdu conscience, c'était lorsqu’il avait vu le français qui habitait chez les anciens Laterreur et que celui-ci lui avait envoyé la main ; il n’en dit rien à Josette. Ils regardèrent les nouvelles à la télévision et allèrent se coucher vers minuit. Mais comment dormir ? Assurément, il se passait quelque chose chez Cunégonde, les murs en tremblaient et des cris résonnaient au-travers.Josette approcha son oreille du mur qui n’est pas à l’épreuve des indiscrétions orales. Cunégonde ne passait pas la nuit seule, le Poulet n’était pas parti. De son côté, Roger était aux aguets du moindre cri, impressionné du plaisir entendu dans ces cris. Il mit en doute ses meilleures prouesses et essayait d’imaginer comment ce Poulet pouvait atteindre des performances aussi hot. Comment un concombre comme Paul Poulet, si petit à côté de la grande horloge pouvait la faire jouir autant. Il en conclut qu’elle simulait l’orgasme, ça ne pouvait être autrement. Cela le rassura sur son estime de soi, mais il fit des cauchemars pendant qu’il était dans les bras de Morphée. Tôt le matin, il s’habilla chaudement pour marcher de long en large dans la ruelle. Marcher le détendait, mais il ne désirait pas que personne ne voit les ecchymoses qu’il avait au visage. Il était encore troublé par la nuit d’amour qu’avait fait vivre un poulet à une dinde comme Culnégonde.
Roger était un bel homme mais c’était surtout la faute de sa mère s’il l’était autant. Depuis qu’il était en âge d’entendre, elle ne cessait de lui marteler dans la tête. « T’es tellement beau mon p’tit gars. » À force de se l’entendre dire et répéter, il avait fini par le croire et se comportait en « beau ». Mais c’était surtout son charme qui le rendait beau. Personne ne s’en apercevait, tous le pensaient beau.
Quand il vit Henriette sortir de chez elle par la ruelle, il entra chez lui à toute vitesse, disant à sa femme de ne le déranger sous aucun prétexte. Deux minutes plus tard, Henriette Labelle-Rathé frappa à la porte de la cuisine. Elle avait vu entrer Roger et espérait qu’il lui réponde en personne.
- Entrez Henriette, mais restez sur la carpette pour ne pas salir mon plancher frais lavé. Je prends mon foulard de laine et mes mitaines dans le racoin du placard.
- Ok. Mais je suis déçue que vous soyez prête.
- Vous savez, je ne laisse pas entrer tout le monde dans ma maison. Il y a trop d’écornifleuses qui ensuite vont colporter des commérages. Bon ! On y va ?
Tout en placotant, elles sortirent par la ruelle et se rendirent sur la rue Notre-Dame. Henriette revint sur le sujet des écornifleuses dont parlait Josette.
- Vous faites ben de fermer votre porte aux commères. En tout cas, moi, quand il s’agit de fermer ma gueule, vous me connaissez, je suis une tombe. Zipp … (en faisant mine de fermer une fermeture éclair). A propos, votre Roger est-il revenu ? Je l’ai vu marcher dans la ruelle ce matin. Il avait les lèvres enflées et les joues fouettées.
- Oh ça ! C’est juste qu’il a perdu connaissance hier quand je parlais avec vous au téléphone.
- Il s’est fait mal ?
- Il ne disait plus un mot quand je l’ai arrosé avec ma théière. Je l’ai un peu tapoté ce matin pour le remettre en forme et j’ai dû exagérer un p’tit brin.
- Ouin …
- Roger sait très bien se défendre selon les besoins. C’est loin d’être un fafoin.
- Ouin … Mais faut pas maganer sa belle face.
- C’est un élément de décoration ancien chez moi, mais j’y tiens.
- Ouin.
- Arrêtez de parler en canard. Connarde.
- Quoin ? Mais j’ai pas le choin.
- Pourquoin ?
- Je vous réponds en canard parce que vous parlez en canard.
- Vous saurez Labelle-Rathé que si je parlais en canard je le saurais moi-même.
- Ouin ! Mais je paierais cher pour l’examiner de plus près encore votre conjoint.
- Vous parlez de mon mari ?
- Ben oui ! Votre conjoint, le beau Roger. Qu’est-ce qu’il fait pour vrai comme métier ?
- C’est un professionnel dans les relations humaines. Vous avez déjà payé pour le savoir. Oui ou non ?
- J’ai rien payé. Je l’ai gagné pour une heure.
- Vous avez gagné Roger, mais où ça ?
- Un soir en jouant aux cartes chez madame Bloomfield de Westmount où je fais le ménage deux fois par semaine. Il manquait une joueuse un samedi soir pour son « poker » et madame a doublé ma paie de la semaine et m’a donnée un bonus pour remplacer sa copine. La gagnante de la soirée avait le droit de passer une heure avec le beau Roger. En temps ordinaire, il parait qu’il coûte cher le vlimeux. Alors j’en ai profité au max.
- C’est un bourreau de travail qui aurait besoin de vacances.
- Il ne peut pas se faire remplacer ? Vous ne pourriez pas lui donner un p’tit coup de main, le seconder des fois ?
- Non. Roger est un perfectionniste et ne sait pas déléguer son travail. Imaginez ! Il lave ses cheveux un par un et il se plaint que son coiffeur Roberto n’en fasse autant.
- Et vous, vous aimez le sexe avec le beau Roger ?
- Vous êtes ben effrontée Labelle-Rathé.
- Vous faites jamais joujou avec « son p’tit bonhomme qui rentre pis qui sort » ?
- Tabarnouche que vous êtes vulgaire !
- C’est vrai qu’avec vos cernes sous les yeux, ça ne doit pas lui tenter beaucoup de faire joujou avec vous. Vous devriez vous maquiller un peu aussi. Du make-up ça ne ferait pas de tort.
- Vous croyez que ça me rajeunirait ?
- Non, mais ça cacherait votre peau.
- Qu’est-ce qu’elle a ma peau ?
- Ben, on dirait une peau de phoque tannée.
- C’est pas la diplomatie qui vous étouffe.
- Ça c’est vrai. Mais au moins je suis franche.
- Je ne sais ce qui me retient de ne pas vous montrer mon poing.
- Vous voyez, vous recommencez à parler en canard.
Elles étaient sur le pas de la porte du restaurant « Griffintown Café Dining, sur la rue Notre-Dame et sur le point de se tapocher. Le froid leur fit reprendre leur esprit et elles entrèrent pour se réchauffer quelque peu. Le garçon les plaça dans un endroit discret car les ayant déjà eues comme clientes, il craignait que les deux commères ne s’échauffent.
- C’est moi qui paye la traite (dit Henriette). J’ai trouvé 0 dans la ruelle ce matin en me rendant chez vous.
- Vous m’avez coupé la faim.
- Enwaillez donc. Laissez-vous donc gâter Josette. On va parler de Cunégonde.
- Pourquoi pas hein ! Ça va nous réchauffer un p’tit brin. Il fait un froid de canard dehors.
Quand elles eurent mangé et bu beaucoup de whisky, elles demandèrent l’addition. Le garçon de table ne parlait que l’anglais. Cela fâcha Josette qui le regarda avec des fusils dans les yeux et lui dit d’un ton sans équivoque : « If you want your tip, forget the bill. » « Hic ». Elle jeta un dollar sur la table et lorsque Henriette passa devant, elle le ramassa, le mit dans sa poche et dit au pauvre garçon : I am very sorry. She is very cheap.». Elles se retrouvèrent dans la rue, complètement pafs, bras-dessus bras dessous et chantaient « C’est beau un homme » en se tortillant pour se réchauffer. Cela faisait bien 40 minutes qu’elles tournaient en rond sans trouver le chemin du retour. Pour s’amuser elles faisaient des coins-coins avec leurs mitaines, aux passants qu’elles rencontraient sur le trottoir, et heureusement, le froid cinglant du jour les dégrisa peu à peu. Tout à coup Josette se souvint …
- Dites donc la moyenne Henriette … Euh non, je veux dire la grosse Henriette.
- La moyenne Henriette.
- Oui, la moyenne. Enfin … Je veux dire, le paparapluie de Cucunégonde. L’avez-vous revu dans sa poubelle en venant chez moi ce matin ?
- Ben non. Il n’était plus là et ce n’est pas les vidangeurs qui l’ont volé. Ils ne passent jamais avant 3 heures.
- Il restait bien les baleines ?
- Même pas. Ah oui, m’dame Marchouin. En parlant de baleine, savez-vous que la fille de Cunégonde est revenue par icitte ? Elle était disparue depuis si longtemps que je ne l’ai pas reconnue.
- Elle ressemble à sa grosse tante Hortense. Ce serait un miracle si ce que vous me dites est vrai.
- Ben, j’vous l’dit. Mais vous mame Josette, pensez-vous que la Cucunégonde peut aimer le sexe ?
- Avec Roger, oui. On a eu la preuve hier quand elle s’est jetée goulument sur lui.
- Mais avec un autre que le beau Roger ?
- Qui voudrait d’elle ?
- J’ai entendu des bruits toute la nuite. Vous savez, les murs parlent.
- Ha ben - Ha ben – Cunégonde avec le concombre de Poulet ?
- Ben moi, j’ai vu Cunégonde de ma fenêtre de ruelle. Elle portait un kimono en soie rouge, cintré à la taille par une ceinture doré. Il y avait un homme avec elle. Tout à coup, elle a fermé la lumière et tiré les rideaux et j’ai tout raté le spectacle.
- Vous n’avez rien vu d’autre ?
- Ben j’ai vu l’homme. Il n’avait plus son manteau ni sa tuque. J’ai téléphoné à ma voisine de gauche pour lui demander si elle avait vu autre chose, mais moi vous savez, je suis une tombe. Zipp ...
- Cunégonde avec son concombre ? Oui, ils ont fait un bruit d’enfer.
- Quoi ? Avec un concombre ?
- Oui. Le Poulet est devenu le concombre de Cunégonde. Même Roger était impressionné.
Elles virent qu’elles étaient arrivées au dépanneur « Quinine Couche-Tard » et arrêtèrent pour acheter des billets de loto 6-49, des jeux de hasards de poules aux œufs d’or et de tic-tac-toc. Quinine trop heureuse de voir Josette, lui raconta l’exploit de Cunégonde. Elle lui avait sauvé la vie avec l’aide de son parapluie. La fameuse pièce à conviction que Josette aurait bien voulu retrouver car elle avait su le matin par sa fille Rosette que l’un des voleurs voulait porter plainte contre madame Cunégonde Brouillette-Légaré, pour avoir failli le tuer. Elle n’eut pas le temps de manifester sa désapprobation sur la vénération que Quinine portait sur cette chipie, une petite vénération dont elle ne connaissait pas la raison. La voix d’une femme attira son attention.
- Viens icitte mon p’tit criss. C’est pas poli de tirer sur les robes des madames.
- Maman regarde …
- Ce ne sera pas long mon chéri. Où c’est qu’elle peut bien être ma criss de carte?
- Maman, à côté, la saine Vierge est là.
- Oui ? Ben voyons … Tu sais ben que la Sainte-Vierge reste au ciel avec le p’tit Jésus.
- Non non, maman. Mais putain de bordel de merde, elle est bien là ! Elle me fait un sourire.
Josette regarda la femme dont parlait le gamin qu’elle estimait âgé d’environ 7 ans. Il tirait sur son manteau. Le peu qu’elle vit de son visage s’arrêtait aux yeux.
- Tu veux dire cette madame-là?
- Oui maman.
- Non mon ti-boutte, cette dame n’est pas la Sainte-Vierge et tu ne peux pas voir son sourire car sa bouche est cachée. On ne voit que ses yeux.
- Oui maman. C’est la sainte-Vierge. Comme celles que l’on examine dans les cathédrales quand on voyage dans notre pays maman. Elle bouge ici et elle sourit avec ses yeux. Pourquoi n’a-t-elle pas sa robe bleue ?
- Attends que je la trouve ma putain de carte et je vais t’expliquer ça.
Quand Josette reconnu la voix de la fille de Cunégonde, elle se dessaoula d’un coup et perdit connaissance.
Remise de ses émotions, celle qu’elle avait toujours appelée « Eille » se penchait vers elle. Josette ne comprenait plus rien et pensa qu’elle était encore sous l’influence du whisky. C’est alors qu’elle entendit Henriette dire tout haut.
- Eille, c’est dommage que la chirurgie ne puisse changer la voix. Han Quinine ?
Mais Quinine remettait la monnaie à un client. La fille de Cunégonde n’entendit pas l’offense mais elle jeta son sac à main derrière le comptoir et donna une claque sur les fesses de son fils.
- Arrête de brailler comme ça. Tout le monde te regarde. Pis, arrête de parler mal comme ça. Ç’est laid. J’va te passer la langue au savon !
- Mais maman, c’est la sainte Vierge.
- Non Ti-boutte. La sainte Vierge elle habite au ciel.
- Mais oui, regarde, elle me sourit encore avec ses yeux.
Henriette, ne sachant se taire, dit encore à l’intention de la fille de Cunégonde :
- C’est dommage que les docteurs ne puissent pas refaire la démarche non plus.
Cette fois, l’enfant pleurait et « Eille » implorait Josette et Henriette de ne pas faire savoir à sa mère qu’elle était par ici.
- Pourquoi ? demanda Josette.
- C’est pas de vos affaires sacramant.
- Bon d’accord Eille. Mais tout ce que je veux c’est son parapluie et il est disparu.
- Ma criss de mère ? Jamais elle ne pourrait se débarrasser de son parapluie. Elle l’a gagné dans un concours de mangeurs de hots-dogs et ne s’en est jamais séparé.
- Qu’est-ce qui vous est arrivé « Eille ». Et d’abord c’est quoi votre vrai prénom ?
On se serait cru dans un cubicule où se déroule un interrogatoire serré de police. Josette faisait office de méchante, Quinine de l’amie qui vous veut du bien. « Eille » c’était l’accusé et le gamin tapait des pieds en criant : Je hais les Québécois. Je veux retourner dans mon pays. Tant qu’à Henriette, elle feuilletait une revue de potins de vedettes dans un coin. Un article semblait l’intéresser particulièrement car on la vit arracher deux pages et les cacher dans sa sacoche. Elle finit tout de même par dire tout haut en se parlant :
- C’est quand même de valeur que le beau Roger se fasse maganner par Josette Marsoin.
Finalement, Josette appris peu de choses de « Eille ». Dès qu’il s’agissait de sa mère, elle réagissait comme si elle n’avait jamais existée. Elle fuyait la réalité.
DI
À suivre (trois petits points)
Tags : , c’est, josette, roger, cunegonde
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Commentaires
ha,ha, c'est vraiment fou ce récit pas barré ! C'est une catastrophe en vue. Le retour de " Eille " fera bondir Cunégonde. Aucun doute, soit Quiquine ou Labelle-Rathé, mais par une d'elles, Cunégonde sera informée du retour de sa fille et de son petit-fils ! Le ciel est à l'orage. Hi,hi.. Merci Léna de nous ouvrir les pages de ton blog. Bizs. Bravo DI ! Qu'est-ce qu'on rigole avec ces deux folles ! À plus ! Bisous.
3DI leVendredi 6 Juillet 2012 à 08:46Merci Hélène. C'est gentil, vraiment. Moi aussi j'ai hâte de lire la suite, comment Cunégonde va bondir. Josette s'attends à n'importe quoi de cette furie et Roger est songeur. Il se demande s'il ne doit pas commencer à penser à sa retraite. Il se trouve un peu moins performant dernièrement. Bisous.
4DI leVendredi 6 Juillet 2012 à 08:46Les théières sont superbes, les kimonos rouges de Cunégonde aussi, les canards sont mignons à croquer. Le poussin, très élégant et poli, Paul Poulet, le poussin jaune a de la mine dans le canard. Et Ti-Boutte: Hihihi. Et tout ca à cause du Baby Duck de Cunégonde et de son parapluie.
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Ma chère Di, le commentaire que je viens de poster sur la page de Marie-Louve te concerne aussi ! J'y mets qu'en pesant mes mots, je trouve vos prestations à toutes les deux excellentes, éblouissantes dans le genre ! je viens ce soir de tout relire à petit feu, chaque détail est savoureux ! Je crois que je ne pourrais plus me passer de ces personnages extraordinaires sous leur apparence de messieurs et dames tout le monde, j'en voudrais tous les soirs, de mon nouveau feuilleton !
Gros bisous et merci infiniment du plaisir que vous nous apportez !