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Par lenaig boudig le 12 Janvier 2011 à 10:07
La jeune babebine -car tel était son titre-, fille unique du mandarin mégalomane qui régnait en maître absolu sur cette planète située à une distance incommensurable de la Terre (aux confins de l'univers, quoi), était à se morfondre sur sa magnifique chaise longue installée sur la terrasse de l'immense propriété princière. Dans le sombre état d'esprit où se trouvait à ce moment-là la babebine, ce n'était plus sur une chaise longue qu'elle pensait déjà être mais dans une sorte de cercueil, voire de sépulcre et l'accueillante terrasse fleurie de rares orchidées, ornée d'orangers et citronniers en pot lui semblait faire office de ... catafalque.
Comment les deux ou trois rencontres inespérées et si exaltantes de la pauvre princesse avec le groupe d'explorateurs de l'espace avaient-elles pu avoir lieu, malgré la vigilance paternelle et celle de ses barbouzes ? Elle en était encore à se le demander. Ces étrangers étaient d'une autre trempe que ses compatriotes, qui se laissaient écraser sans mot dire par la clique au pouvoir et elle avait savouré sa chance de pouvoir parler librement avec eux, à la faveur des festivités et des bals donnés en leur honneur. Ce qui la rendait si malheureuse, c'était que son père lui avait toujours témoigné son amour et sa tendresse, alors qu'elle le savait impitoyable et même cruel dans les affaires de l'état. Ce qu'elle ignorait, c'était que tous ses compatriotes ne ployaient pas sous ce joug écrasant et que la résistance s'organisait en grand secret. Elle ne savait pas non plus que les jours de son père étaient comptés, ainsi que les siens, si aucun événement ne venait perturber les plans des comploteurs.
Tout en mordant distraitement dans une mancenille pourtant bien mûre et goûteuse, elle jetait de temps en temps un regard tantôt courroucé tantôt fataliste sur son scrogneugneu de père et sa suite en train de s'adonner au golf sur les pelouses en contrebas, tandis que les gardes du corps nounous bien gentils avec elle mais tout acquis au tyran assuraient à la fois son bien-être et sa sécurité autant que sa surveillance, la babebine essayait d'imaginer quel fiancé son père lui avait choisi et qu'elle n'avait pas encore vu, craignant le pire ... Sûrement rien à voir avec le bel homme robuste aux yeux de félin couleur malachite de l'équipe d'explorateurs spatiaux avec qui elle avait dansé, riant des pas et gestes maladroits de son cavalier, avec qui elle avait échangé quelques mots. En serait-elle tombée amoureuse ? Elle le connaissait à peine !
Pendant ce temps-là, le copilote du vaisseau spatial en visite, très momentanément désoeuvré dans le luxueux appartement que son hôte lui avait attribué, révassait de son côté ... Il savait maintenant que leur mission commerciale n'aboutirait pas, du moins pas lors de cette première visite. Des événements graves allaient se produire dans quelques jours. L'équipage aurait déjà pu prendre le large mais cela aurait été très lâche. La babebine, qu'il appelait sa poupée de porcelaine était en danger de mort et certainement dans des circonstances atroces ... Il n'arrivait pas à se mentir et était conscient qu'il en pinçait pour cette jeune fille si dynamique et qui leur avait fait comprendre à demi-mots qu'elle n'approuvait pas du tout les méthodes de son père pour assujettir son peuple. D'ailleurs, tous les éléments males de l'équipage avait craqué pour elle et un plan de sauvetage avait eu le temps d'être élaboré avec leurs moyens techniques très sophistiqués.
Ce fut en effet au cours du gigantesque feu d'artifice fêtant l'anniversaire de l'arrivée au pouvoir du potentat que la poudre révolutionnaire commença à parler ... Dans l'affolement général, la jeune babebine vit soudain se profiler devant elle la silhouette de l'homme aux yeux de félin, qui l'enleva dans ses bras et la fit descendre, encadré de ses complices et de plusieurs gardes du corps, qui avaient bien caché leur jeu, dans les sous-sols de la forteresse impériale par un passage secret. Un étrange engin excavateur et reboucheur, anti-résonance, à bord duquel ils embarquèrent tous se faufila sous terre jusqu'au vaisseau spatial, dont les moteurs ronronnaient déjà. La soucoupe s'envola prestement et la jeune babebine, éberluée, fit une plongée dans l'inconnu ...
Il lui fut expliqué que sans cette opération, elle aurait été condamnée à mort. Le vaisseau se tint éloigné de la planète, dont la capitale s'était embrasée, tandis que toutes les grandes villes s'insurgeaient à leur tour. On ne mentit pas à la jeune fille quand on lui apprit avec tout le ménagement possible que son père avait été tué dès le début des hostilités par des tirs croisés et acharnés et, malgré sa douleur, la babebine se dit que cette mort était préférable à un procès suivi d'une exécution.
Babebine se remit peu à peu de ses intenses émotions, s'intégra parfaitement à l'équipage, au sein duquel elle fut adoptée, dévoilant des connaissances scientiques insoupçonnées et se montrant curieuse de tout. Le bruit courut qu'une tendre idylle s'était nouée entre elle et l'homme aux yeux malachite, mais sans certitude. Babebine goûtait chaque jour sa liberté et avouait qu'elle gardait l'espoir de pouvoir remettre un jour les pieds sur sa planète de naissance, incognita ou pas, pour constater les progrès réalisés dans l'amélioration du sort de ce qui aurait pu être ... son peuple.
Lenaïg
pour le jeu des Mots ... tion de L'Esprit de la lettre sur facebook (Dominique Bar et Freddie Sailor), selon les mots imposés (en gras).
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