• Morceaux choisis pour le jeudi en poésie de Tricôtine

      joan-miro-constellation-d-etoiles-du-matin - www.eternels-eclairs.fr

     

     

     

    Du grave et du sérieux, pour commencer !

     

     

    Victor HUGO (1802-1885)
    (Recueil : La légende des siècles)

     

    La conscience

    Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
    Echevelé, livide au milieu des tempêtes,
    Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
    Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva
    Au bas d'une montagne en une grande plaine ;
    Sa femme fatiguée et ses fils hors d'haleine
    Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. »
    Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
    Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
    Il vit un oeil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
    Et qui le regardait dans l'ombre fixement.
    « Je suis trop près », dit-il avec un tremblement.
    Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse,
    Et se remit à fuir sinistre dans l'espace.
    Il marcha trente jours, il marcha trente nuits.
    Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits,
    Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve,
    Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève
    Des mers dans le pays qui fut depuis Assur.
    « Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr.
    Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. »
    Et, comme il s'asseyait, il vit dans les cieux mornes
    L'oeil à la même place au fond de l'horizon.
    Alors il tressaillit en proie au noir frisson.
    « Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche,
    Tous ses fils regardaient trembler l'aïeul farouche.
    Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont
    Sous des tentes de poil dans le désert profond :
    « Etends de ce côté la toile de la tente. »
    Et l'on développa la muraille flottante ;
    Et, quand on l'eut fixée avec des poids de plomb :
    « Vous ne voyez plus rien ? » dit Tsilla, l'enfant blond,
    La fille de ses Fils, douce comme l'aurore ;
    Et Caïn répondit : « je vois cet oeil encore ! »
    Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs
    Soufflant dans des clairons et frappant des tambours,
    Cria : « je saurai bien construire une barrière. »
    Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière.
    Et Caïn dit « Cet oeil me regarde toujours! »
    Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours
    Si terrible, que rien ne puisse approcher d'elle.
    Bâtissons une ville avec sa citadelle,
    Bâtissons une ville, et nous la fermerons. »
    Alors Tubalcaïn, père des forgerons,
    Construisit une ville énorme et surhumaine.
    Pendant qu'il travaillait, ses frères, dans la plaine,
    Chassaient les fils d'Enos et les enfants de Seth ;
    Et l'on crevait les yeux à quiconque passait ;
    Et, le soir, on lançait des flèches aux étoiles.
    Le granit remplaça la tente aux murs de toiles,
    On lia chaque bloc avec des noeuds de fer,
    Et la ville semblait une ville d'enfer ;
    L'ombre des tours faisait la nuit dans les campagnes ;
    Ils donnèrent aux murs l'épaisseur des montagnes ;
    Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d'entrer. »
    Quand ils eurent fini de clore et de murer,
    On mit l'aïeul au centre en une tour de pierre ;
    Et lui restait lugubre et hagard. « Ô mon père !
    L'oeil a-t-il disparu ? » dit en tremblant Tsilla.
    Et Caïn répondit : " Non, il est toujours là. »
    Alors il dit: « je veux habiter sous la terre
    Comme dans son sépulcre un homme solitaire ;
    Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. »
    On fit donc une fosse, et Caïn dit « C'est bien ! »
    Puis il descendit seul sous cette voûte sombre.
    Quand il se fut assis sur sa chaise dans l'ombre
    Et qu'on eut sur son front fermé le souterrain,
    L'oeil était dans la tombe et regardait Caïn.

     

     

     

    Note de Lenaïg :

    Ce poème m'impressionnait beaucoup lorsque j'étais enfant, surtout la fin, on s'en doute bien !

    Cet oeil est celui de la conscience, qui poursuit Cain pour le meurtre de son frère Abel.

    Ou l'oeil de Dieu !

    Comme j'ai eu besoin de me le remémorer en entier, j'ai juste fait un  copié-collé du site :

    link

     

     

    ***

     

     

     

    Brigitte Bardot dans Le Trou normand - www.toutlecine.com

    Du léger, du chanté pour rêver, pour danser !

     

     

    Michel Jonasz

    Chanson pour tes yeux lilas

     

     

    A la terrasse d'un café, tes yeux lilas
    Dans un lit, par ci, par là
    Dans tes cheveux décoiffés, tes yeux lilas
    Tu me regardes et voilà


    La vie m'avait laissé las, tes yeux lilas
    Ils se sont posés sur moi, tes yeux lilas
    Comme ils se posent un peu là, tes yeux lilas
    J'ai gagné la tombola

    Marilyn Monroe jeune - www.students.stedwards.eduC'est les nuits bleues qui reviennent, tes yeux lilas
    Le reine de la fête foraine
    Qui tend sa baraque pour moi, tes yeux lilas
    Ils sont allés jusque là

    Quand la vie me laisse las
    Quand je perd, quand rien ne va, tes yeux lilas
    Dès que tu poses sur moi, tes yeux lilas
    J'entend les chevaux de bois

    C'est les beaux jours, c'est gala, tes yeux lilas
    Dans quel état me voilà
    Je vois le Guatemala, lala lala
    Ils ont navigué par là, tes yeux lilas
    Quand la vie me laisse las

     

     

    ***

    • Devinette (facile !) :
      à qui appartiennent ces yeux féminins, non alourdis par les fards, qui viendront plus tard, et ces cheveux naturels, sur les deux photos ?
      Réponse, si nécessaire, plus tard en commentaire !
    • Tableau de Joan Miro : Constellation d'étoiles du matin
      (voir album Soleil et Lune chez les grands peintres).

     


     


     

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 19 Mai 2011 à 06:48
    Monelle

    Deux visions très différentes en effet ! C'est vrai que notre conscience parfois fait les gros yeux ! quand à  la chanson de Jonaz elle m'était inconnue.

    La devinette, je sèche pour l'instant et pourtant la 1ère photo est connue !

    Très belle journée à toi - bisous

    2
    Jeudi 19 Mai 2011 à 08:34
    pinceaux.en.voyage.o

    je sens l'oeil derrière moi...merci pour ce poème...

    anne-marie

    3
    Jeudi 19 Mai 2011 à 08:42
    jill-bill.over-blog.

    Bonjour Lenaïg, en ce qui concerne le poème de Victor, l'oeil de la conscience qui me fut servi au cours de religion aussi, c'est un fort bel écrit sur la chose...  Quand à la chanson de Michel ce n'est point le même registre...  Les yeux de BB mais en deux ça me dit mais sans parvenir à les nommer.... Bon jeudi à toi  Bises de JB

    4
    Jeudi 19 Mai 2011 à 09:01
    Libre  necessite

    Comme souvent c'est un festival culturel... je suis un fan de Miro mais aussi de victor Hugoe et bien sûr de michel Jonasz...alors merci

    Pour les photos je pense à brigitte Bardot (facile) et peut être à jeanne Moreau..Bises dan

    5
    Jeudi 19 Mai 2011 à 09:41
    Catheau

    L'oeil de Dieu dans la tombe, une image primitive qui n'a cessé de hanter. Sans doute Brigitte Bardot, quand elle était sans fard, sur la première photo. Quant à l'autre, je sèche.

    6
    Jeudi 19 Mai 2011 à 11:10
    jill-bill.over-blog.

    E. Taylor ?  Au hasard !  Bizzzz 

    7
    Jeudi 19 Mai 2011 à 11:17
    anne-marie

    j'ai oublié pour les portraits ; je dirai brigitte et Marylin ??

    8
    Jeudi 19 Mai 2011 à 11:41
    jill-bill.over-blog.

    Ah ben oui Marilyn !!!!!    Merci Anne-Marie ! 

    9
    Jeudi 19 Mai 2011 à 15:48
    Marie-Louve

    Magnifique regard sur l'art et la littérature. Pour l'oeil, poids lourd, de la conscience de Caïn, on peut croire que la morale de ce récit serait " Mourir de sentir la honte de soi, ce regard de culpabilité devient " L'Oeil. Assurément, un poison vif.

    As-tu vu dans la partie gauche, vers le haut du tableau de Miro, on aperçoit suggestivement, la forme du taureau ? Bon jeudi. Bizs. 

    10
    Jeudi 19 Mai 2011 à 16:37
    m'annette

    BB et Maryline, dirais-je...

    de tout ce que tu proposes, je ne connaissais que la toile, bien que ce ne soit pas mon peintre préféré!

    bises

    11
    Jeudi 19 Mai 2011 à 16:57
    Reinette

    j'ai écrit moi aussi un poème sur la conscience intitulé l'oeil de la conscience

    c'est un poème qui m'a beaucoup impressionné aussi.

    bisous

    12
    Jeudi 19 Mai 2011 à 17:23
    Nounedeb

    Coucou Lenaïg. Je préfère de beaucoup Miro à la logorrhée alexandrine du prolixe Hugo. Bises.

    13
    Jeudi 19 Mai 2011 à 23:20
    Mireille

    Bonsoir Lénaïg, les yeux et toutes leurs nuances, de la conscience, à l'amour, en passant par dieu, le remord, l'amant, la fête foraine, le rêve, la mort, la violence... tout passe dans ces yeux-là et tu nous secoues sans ménagement! Comme toi, j'ai été fort perturbée enfant par le poème de Victor Hugo. Miro et Michel Jonasz adoucissent ce soir le poids de ses mots. Merci pour ce partage. Bisous. Mireille

    14
    Jeudi 19 Mai 2011 à 23:25
    Tricôtine

    j'emporte le tout !!! ... Léna là où tu fais forten plus c'est de mettre un tableau de "Miro" pour un jeudi sur les zyeux .. j'ai pas compris pour la devinette, ce sont bien deux actrices différentes ?? BB et Norman Jean  je dois avoir le néon trop mathisé par la compta de ce soir !! des bizzzoux paupières presque closes

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