• pruneau-d-agenDéfi n° 31  proposé par  Hauteclaire

     COMMUNAUTE CROQUEURS DE MOTS

    Les contes de notre enfance

    Tout le monde a lu les contes pour enfants, les a aimés, et peut-être a eu peur ?

    Et bien je vous propose de les réécrire,

    ou du moins d'en réécrire un,

    celui de votre choix, le petit chaperon rouge,

     la belle au bois dormant, la belle et la bête ... la liste est longue !
    Ce peut être un poème, une nouvelle, la forme est à votre convenance

    Alors à vos plumes ! Amusez-vous bien !

     

     

    LE PETIT POUCET

     

    - Chérie, file-moi un peu de beignet, conduire me donne un petit creux.
    - Attention Jared, ne mange pas le papier.
    - Mais bon sang ! Tu ne pourrais pas l’enlever ?
    - Eh bien, j’aurais les doigts tout graisseux. Allez, ouvre la bouche et ne détourne par tes yeux de la route.
    - M’man, j’voudrais aussi un beignet.
    - Tu n’as qu’à en prendre dans le panier. Tant que tu y es, prend une serviette mais ne dérange pas la pile. Et puis donnes-en un à ton frère.
    - Nan ! J’en veux pas.
    - Ah, ben c’est la première fois que je t’entends refuser à manger, fiston.
    - Tu sais p’pa, c’est lui qui a bouffé tous les pruneaux destinés à la tarte aux quetsches que m’man voulait faire hier. Alors à la place, nous avons des beignets à la banane.
    - Ah petit garnement, tu ne sais pas ce qui te pend au nez. Tu vas t’en mordre les doigts.

     

     

    Jared Depor et sa petite famille étaient sur la route des vacances. Alice avait pu avoir ses congés, après d’âpres tractations avec ses collègues. Amandine, une petite délurée de six ans, avait tout fait (cajoler, prier, trépigner, pleurer) pour que la destination de cette année soit le lac Mineur : ses amies projetaient toutes d’y être. Ronnie, un gamin de quatre ans à l’appétit féroce, était plutôt taciturne, à l’air faussement sérieux d’un pince-sans-rire et capable de tours pendables. Une fois, il avait mis un morceau de sucre dans le réservoir de la petite « quatre chevaux », juste pour voir ; Jared n’avait jamais su pourquoi la vieille petite voiture avait renâclé comme un cheval rétif.
     Une méchante côte avait eu raison du vaillant tacot : sont moteur avait chauffé. Les Depor durent faire une pause d’au moins une demi-heure en pleine forêt. Tout en se dégourdissant les jambes, Alice taquinait gentiment son pauvre mari sur son amour immodéré des voitures de collection. Amandine, allant de l’une à l’autre, leur cassait les oreilles avec la description dithyrambique des bagnoles « in » de ses amies. Jared profitait de l’arrêt pour s’en griller une. Son regard passa par hasard à travers le pare-brise. Il n’y avait personne dans la voiture.

     

    - Tiens, où est passé Ronnie ?
    - Il est peut-être accroupi derrière la voiture.
    - Non m’man, l’est pas là… Ronnie ! Yo, fais pas l’idiot, où es-tu ?
    - Mon Dieu ! Il est parti dans la forêt. Mon petit garçon va se perdre.
    - Vous, allez de ce côté. Moi, je vais de l’autre.
    - Non ma puce, on ne doit pas se séparer. D’ailleurs, il faut que quelqu’un surveille la voiture, et c’est toi qui t’y colles.
    - Quoi ? Mais c’est injuss ! Pourquoi pas m’man : avec ses talons, elle ne ferait pas dix pas là-dedans.
    - Je vais prendre mes sandales, ne t’en fais pas.
    - Eh je vois là-bas une serviette de papier.
    - Eh oui p’pa, ce corniaud a pris tout le paquet.

     

     

    En suivant les trois-quatre serviettes tombées, Jared et Alice finirent par trouver leur rejeton. Ils allaient le morigéner pour ne pas les avoir avertis de son intention. Ronnie était accroupi au pied d’un arbre, le paquet de serviettes devant lui, le visage rouge et crispé : le petit poussait.

     

     

    Rahar

     

     

    ***

     

    Note de Lenaïg :

    Si on dispose d'un peu plus de temps pour la lecture, j'embraie le pas à Rahar dans les bottes du Chat Botté car j'ai déjà proposé aux Croqueurs de mots (avant ce défi) :

     

    La Souris du Chat Botté (deux parties).

    Voir dans Les Nouvelles de Lenaïg.

     

    ***


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  • Chômeur, mode d'emploi - Dominique BiotDominique, tu nous présentes là un CV pas ordinaire, qui mérite qu'on prenne son temps pour le lire, installé dans son fauteuil le plus propice à la réflexion et à la méditation.
    Comme je te connais déjà par plusieurs conversations téléphoniques et par tes écrits, je sais -et cela se confirme- que j'ai affaire à un écrivain, une âme d'artiste, étouffée dans l'oeuf par le fait que tu as dû, au sortir de l'adolescence, te trouver un boulot dit sérieux. Ta famille ne voulait pas entendre parler d'une carrière artistique, aléatoire.
     
    La peinture t'attirait, tu es donc devenu peintre en bâtiment, après t'être émancipé par un passage dans l'armée (entre autres) puis, en raison d'un problème de dos, de ta trop (?) grande gentillesse exploitée sans scrupules, de ton côté "pas comme les autres", tu t'es fait remercier de ton emploi de peintre, ainsi que des suivants, tous plus variés les uns que les autres.Tu as apporté ta bonne volonté partout où tu as été accepté mais tu t'es fait à chaque fois jeter. On t'a collé sur le dos (justement ton point faible) les dysfonctionnements dont tu as fait les frais : échaffaudage branlant, camion brinquebalant, rien ne t'a été épargné.
     
    Tu as essayé de te mettre à ton compte, après avoir fondé ta famille mais tu t'es cassé le nez sur l'énorme mur de prêts et de dettes. On dirait que tu es l'illustration vivante, l'incarnation concrète, moderne de Sisyphe poussant son rocher jusqu'en haut de la montagne et obligé de recommencer indéfiniment car le rocher retombe. On peut faire le parallèle avec le chemin de croix du Christ et ce n'est pas déplacé, car, encore jeune, tu as découvert tout seul la foi. Tu es en plus un autodidacte, poète, essayiste (tu m'as fait cadeau pour mon blog de plusieurs nouvelles que je trouve excellentes). L'art et la foi font de toi quelqu'un qui se démarque et ceux qui ne se trouvent pas sur la même longueur d'onde que toi, que ce soit pour la perception artistique ou la conviction religieuse, ou les deux, doivent t'appréhender malheureusement comme hors norme, voire suspect !
     
    Ton CV fleuve, pas ordinaire donc, se lit comme un roman de l'absurde, où le sourire mène sans cesse un combat contre la mélancolie et le désespoir. C'est bien là une oeuvre d'écrivain, ponctuée de quatre jolies pages de poésie en prose sur les saisons.
    Lorsque on approche de la fin de ton livre CV, on se rend compte que tes pages sont empruntes d'un dynamisme accru, comme si tu commençais à relever la tête, à te redresser le dos, décidé à ne plus te laisser marcher sur les pieds et à ne plus te plier aux exigences ou fantaisies inhumaines de cadres incapables et inhumains.Tu a su démontrer les imperfections, les injustices des organismes sensés procurer des emplois aux gens sans propos haineux mais en soulignant avec précision ce qui ne va pas.
     
    On trouve dans ton livre un poème, un chant de désespoir des précaires, des laissés-pour-compte dans la course à l'argent, happés par le démon de la drogue consolatrice et dévastatrice. Il ne s'agit nullement de toi, qui ne t'es pas perdu dans les paradis artificiels et qui, à cinquante ans, dis fermement : maintenant ça suffit !
     
     Que l'écriture de cet ouvrage trouve un vaste écho, que sa publication ouvre, non pas directement la porte du paradis, mais celle de la reconnaissance de ta valeur et la joie de pouvoir continuer à écrire pour de nombreux lecteurs.
     
    Bises, Dominique !
     
     
    Note : désolée pour la photo floue de la couverture, je n'ai pu obtenir plus net !

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  • bagua - lesbeauxjardins.com

     

     

    Lenaïg a disparu,

    Deux jours qu'on ne l'a pas vue.

    Les lieux semblent désertés,

    S'est-elle déconnectée ?

     

    Il faut vite lire,

    Tous les jours écrire,

    Ou on disparaît.

    Des textes n'ont pas leur chance,

    Impitoyable cadence.

     

    Ce blog est à l'abandon,

    Peut-être se dira-t-on.

    Mais non ! Je prends un bol d'air,

    De temps, de mer et de vert !

    ***

     

    Je suis chez Maman,

    Dans ma ville du Ponant,

    Je soigne mes dents.

    Ma visite, en coup de vent :

    Deux pierres en même temps.

     

    De gros frais dentaires,

    Des implants seront à faire.

    A Paris : plus cher !

    Il y a le chemin de fer

    Qui non plus n'est pas offert ...

     

    Programme à venir :

    Retrouver un beau sourire.

    Facile à choisir :

    Rester chez moi, ou partir ?

    Joindre l'utile au plaisir !

     

    Puis j'en avais marre :

    Trop chaud, trop de tintamarre,

    Paris trop bizarre.

    Je suis allée à la gare

    Vers l'air du large et les phares.

     

    Demain je reviens

    Vers mon travail, mon destin,

    Je reprends le train.

    Voir ma Mère ce fut bien

    Et la mer me sied au teint.

    ***

     

    Lenaïg

     

    Illustration :

    lesbeauxjardins.com - Feng Shui

    (Voir lien exact dans dossier Fantaisies).


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  • Panneau impasse - techni-contact.comLe vieux chien, allongé de tout son long sur la route, au milieu, chauffe son corps au soleil. Cette route n'est pas une route, c'est une impasse. Il y a de longues heures dans la journée où tout est calme ; aucun véhicule à moteur ne vient troubler la quiétude des lieux, en semaine, sauf le soir lorsque les gens rentrent du travail.

     

    Et voilà qu'une auto arrive, en plein après-midi, une jeune femme au volant. La jeune femme se gare provisoirement devant chez elle, ouvre son garage et se remet au volant pour ranger son véhicule à l'écurie. Mais le chien n'a pas bronché et la manoeuvre est impossible. La jeune femme demande au chien de s'en aller ... Rien !

     

    Vieux Pépère finit quand même par être sensible aux paroles cajolantes et aux supplications de la jeune femme. Il se lève péniblement sur ses pattes de quinze ans et se dirige tranquillement vers chez lui. La jeune femme et le vieux chien ne sont pas des inconnus l'un pour l'autre : dans cette impasse, tout le monde, humains et animaux favoris, se connaît.

     

    C'est alors qu'une chatte, auparavant en planque discrète non loin, comme les chats savent le faire, surgit comme une flèche et s'installe à l'endroit exact que le chien vient de quitter. Il faut dire que ce n'est pas n'importe quelle chatte : c'est la compagne de vie du chien ! Oui, ils ont tous les deux les mêmes "maîtres", le même foyer ! Ils s'aiment bien tous les deux. Stupéfaction et désarroi de la jeune femme.

     

    Un voisin retraité, qui s'occupait de ses rosiers devant sa maison, sort en riant pour aider : "Allez, Gatine, ne reste pas là, toi non plus, hein ? Tu le fais exprès, ou quoi ?" Il essaie de la pousser gentiment. Gatine crache furieusement dans sa direction, très en colère ! Les deux humains, bien embêtés, éclatent de rire. Ah, ils n'auraient sans doute pas dû : c'était vexant pour Gatine et son compère ... Au bout de quelques minutes, Gatine est partie à son tour, sautant un muret pour disparaître de leur vue.

     

    Comment comprendre ce fait divers, à travers notre perception humaine ? Gatine veille comme une mère sur son compagnon en fin de vie ? S'est-elle sentie offensée pour lui, qu'on ose le déranger ? C'est fort possible.

     

    Ou alors ... qu'y avait-il de si ... précieux, si ... positif, si ... bénéfique à cet endroit particulier ? Les humains ne le sauront jamais.

     

     

    Narration de Lenaïg

    Information communiquée par l'Ours Castor

     

    Illustration :

    www.techni-conseil.com


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  • Cité des Indes - Sartrouville 3 - L'Ours CastorDécompte : 4 3 2 1 0 …

    Les tours de la Cité des Indes s'effondrent.

    La journaliste précise que de nombreux habitants ont été relogés dans des HLM voisines ; elle sait que HLM est féminin, c'est bien.

    N'ayant pas vu les images au journal télévisé, je les retrouve sur internet. J'aperçois, bien que changé, à droite, l'immeuble où j'ai vécu.

     

    Aujourd'hui, 8 juin 2010, je vais à Sartrouville me faire couper les cheveux. Oui, j'ai gardé certaines habitudes dans cette ville, c’est ma ville celle ou je suis né, ou j’ai vécu avec mes parents ; je ne manque jamais de passer me recueillir et prier sur leur tombe. D’autres membres de la famille y vivent toujours.

     

    C'est un peu réticent que je décide de faire un tour à la Cité des Indes voir l'événement Cité des Indes - Sartrouville 2 - L'Ours Castortélévisé, bien que je ne me rende plus souvent en ce lieu, où j'ai habité, de 1978 à 1984, sauf pour aller chez C. en réunion amicale, ou encore chez J. pour la même raison (j’ai une pensée pour Y., son mari qui nous a quittés). En arrivant en voiture, je contourne le tas de gravas qui a été entouré de barrières et je vais m'arrêter face à l'immeuble où j'ai vécu avec mon fils. La Rue Mélies, n° .., par laquelle j'entrais dans le hall de l'immeuble, n'existe plus ; le studio du bas a été agrandi sur l'ancienne entrée. Devant moi, une montagne de gravas.

     

    Cité des Indes - Sartrouville 7 - L'Ours CastorLe vent souffle et lève la poussière du béton pulvérisé. Je fais le tour de la montagne, en profitant pour prendre des photos. Il y a encore plusieurs tours pointant vers le ciel. Je reconnais peu le lieu où j'ai vécu, car beaucoup de choses ont changé, que je regrette, même si on remarque une volonté sensible d'amélioration : de nouvelles boutiques ont remplacé celles de l'ancienne dalle, des arbres ont été plantés sur l'ancien parking. Je constate que toutes les portes sont codées. Je ne me sens pas bien, oppressé : la Cité a l'air mal entretenue, les immeubles tristes et vieillis.

     

    A plusieurs endroits, je repère des jeunes, des veilleurs, qui montent la garde ; que Cité des Indes - La pie non reconnue - L'Ours Castorgardent ils ? Plusieurs ont une capuche rabattue sur la tête ; ils dissimulent leurs visages ; j'hésite à prendre certaines photos, de peur d'être agressé. En regagnant ma voiture, je vois un guetteur à droite ; il suit mes mouvements. Face à moi, un gros oiseau que, sur le coup, je ne reconnais pas ; je le prends en photo pour donner le change au guetteur !

    Je remonte dans ma voiture en prenant une dernière photo de mon immeuble ; six ans de ma vie sont restés là.

     

    L'Ours Castor

    http://www.youtube.com/watch?v=1OE1TmSvpF4 

    Accompagnement musical proposé par l'Ours Castor :

    violon - Le Poème, de Chausson. 

    *** 

    Note de Lenaïg : l'Ours Castor devait être vraiment troublé ... Son drôle de gros oiseau est une pie. Dans son émotion, il n'a pas bien perçu les couleurs.


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