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    Pastiche du Chaperon Rouge de Charles Perrault

     

     

    Lovée dans son hamac écarlate, Chaperon Rouge rêvasse sous les feuilles des érables cramoisis de son jardin. Une abeille butine tout autour. La main de sa mère tapote son épaule.

    Elle sursaute, tire les écouteurs de ses oreilles. Ses doigts juchent sur son nez aquilin ses lunettes aux verres épais comme des galettes. 

     

    -Maman ! Tu m’as fait peur.

     

     -C’est ta grand-mère ! La voilà bien mal prise depuis le matin. Son ordinateur a attrapé le fameux virus B B W « Big Bad Wolf ». 

     

     -Bon ! C’était prévisible. Ça fait mille fois que je lui dis d’installer des protections Ultragard à son système. Elle et ses méthodes à l’ancienne. Il serait grand temps qu’elle pense à la retraite. J’ai peine à croire que la CIA lui confie encore des missions.

     

     -Tais-toi ! Le mal est fait. J’ai mis un antidote sur cette clé USB. Va le lui porter. Elle t’en sera reconnaissante.

     

    -Ça va. J’ai compris. Apporte-moi mes bottines à crampons et mon casque de moto.

     

     Chaperon enfourcha sa Harley Davidson et sa mère lui fit ses dernières recommandations.

     

    -Ne passe pas par la rue Principale. Les travaux en cours ralentiront ta course. Contourne la ville, ne te fais pas remarquer.

     

    Dans une pétarade, elle lance son engin vers la rue des Trois Crapets Soleil. Cap sur la rue Principale pour aller joindre le pont Piez. Sur deux-roues, elle saura bien se faufiler dans le chantier.

     

    Les cahots de la route en reconstruction font trembler ses omoplates. Son arrière-train tressaute. Ouille ! Une pelle mécanique bloque le chemin. De chaque côté, des ravins au fond desquels des égouts béants vomissent des puanteurs en glougloutant. Coup de frein. Impasse. Impossible d’aller plus loin.

     

    Un ouvrier costaud siffle : Hé ma jolie, voyez pas que c’est fermé ? D’you est-ce que vous allez ?

     

    Comment vais-je traverser la rivière ? se demande Chaperon Rouge en son for intérieur. La question fuse par sa bouche : «  Désolée. Je pensais pouvoir passer en moto. Je dois aller chez ma grand-mère de toute urgence. Elle habite de l’autre côté de la rivière. Comment puis-je traverser ? »

     

    Intérieurement, l’ouvrier ricane. Il n’aurait jamais pensé que sa mission serait aussi facile. Passez par ici puis par là, tournez à gauche, faites 12 bornes, puis virez à gauche et vous atteindrez le pont Piez, conseille l’ouvrier qui était nul autre que le malicieux Red Wolf du KGB.

     

    Merci, apprécie Chaperon Rouge en démarrant sur les chapeaux de roues. Direction mère-grand ! se lance Red Wolf en se frottant les paumes.

     

     

    Toc ! Toc ! Toc ! Red Wolf a pris soin d’enregistrer la voix de Chaperon Rouge avec son modulateur, il  annonce : C’est moi mamie !

     

    Entre ma puce, lui dit Mère-grand en déverrouillant la porte de son antre.

     

    Sitôt l’ouverture créée, l’agent du KGB assomme la pauvre vieille. Il la ligote et l’insère dans une penderie.

     

    Sonnée, Mère-grand songe à sa co-équipière à l’autre bout de la planète qui devait se faire du sang de punaise voyant son écran vide du fameux fichier attendu de toute urgence par les services secrets. Puis, son ouïe encore fine malgré son âge, lui fait entendre le ronronnement du moteur de la machine infernale de sa Chaperonnette adorée. 

     

     

    Enfin ! Chaperon Rouge débarque de sa monture. Dans sa précipitation, elle bute sur un obstacle et ses lunettes effectuent un plongeon vers le sol caillouteux. Zut ! Pratiquement aveugle sans ses besicles, la pauvre met le pied dessus.

    Grrr ! Tant pis. Elle toque, toque, toque à la porte.

     

    À la voix de mamie, elle tire la chevillette et la bobinette choit. En poussant la porte, elle aperçoit au fond de la pièce sombre la silhouette de sa grand-mère penchée sur son clavier. 

     

    -Allô mamie d’amour. Laisse-moi faire, j’ai l’antidote. Tu devras m’aider j’ai écrasé mes lunettes.

     

    À ses mots, une odeur rustre enfla la narine de la jeune femme.

     

    -Grand-mère, tu sens vraiment bizarre

     

    - C’est le fromage de chèvre qui flotte dans l’air.  

     

    Au même moment, une cloche carillonna trois fois annonçant un visiteur à la porte de la demeure. Red Wolf devenu nerveux empoigne Chaperon par la taille pour la maitriser. Celle-ci, stupéfaite, écrase sa bottine à crampons sur les orteils de l’imposteur. Pris d’une douleur atroce, Red Wolf lâche prise. Il  hurle son mal. Vive comme l’éclair, Chaperon ouvre au livreur de pizza ganté de blanc et portant chapeau melon. En une fraction de seconde, son chapeau vole sur la tête du mécréant qui fige net sur place. Une fine coulée de gel  soporifique s’échappe des rebords du couvre-chef. Heureuse de retrouver sa co-équipière, grand-mère fut libérée de sa fâcheuse position. On menotte Red Wolf avant de le mettre à bord d’un spoutnik qui le ramènera endormi à sa mère patrie. 

     

    Marie Louve 

     

     

    Illustration :

    www.marcarine.be

     


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  • Insomnie http://www.literielibau.be/img/acces_oreillers.jpg acces oreillers

    Aller se coucher

    Quand l'insomnie nous fait peur

    Est à redouter.

    On se tourne heure après heure

    Dans son lit qui fait horreur.

    ***

     

    Sérénité

    La douce torpeur,

    Quand on vient de se coucher,

    Vient avec bonheur.

    L'insomnie est écartée,

    C'est doux de ne pas lutter.

    ***

     

    La couettetaies-d-oreillers-et-housses-de-coussin-ikea-1612 300x260

    Bonheur des draps frais
    Qu'on vient juste de changer.
    Doux de s'y glisser.
    La couette en nouvel habit
    Eloigne tous les soucis.

    ***

     

    Le réveil

    C'est le flottement,

    En sursaut ou doucement.

    Des secondes en suspens,

    Quand on ne se souvient plus :

    Lieu connu ou inconnu ?

    ***


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  • Hokusai - Volubilis et rainette -

     

     

    Vogue en occident :

    Ecrire haïku, tanka.

    Poèmes du temps

    Des empereurs de là-bas.

    Mais d'où nous vient donc ce choix ?

     

    Trois vers imagés,

    La beauté en haïku.

    Belle sensibilité,

    Peu de mots parlant beaucoup,

    Peinture, formant un tout.

     

    Il paraît facile,

    Le tanka : cinq vers.

    Tout aussi subtil.

    Mais je ne prétends pas faire

    Du vrai, au fond ; juste l'air.

     

    Les trois premiers vers :

    Dire, relater, décrire,

    Triste, gai, beau, vif ou vert.

    Deux vers pour le ressentir :

    Question, constat, pas de rire.

     

    Le rythme est acquis,

    Cinq, sept, cinq et sept, sept pieds,

    De petits écrits,

    Chant ou poème achevé.

    Quid de l'esprit japonais ?

    ***

     

    Sur ce que j'écris,

    Ma conclusion, la voici :

    Rythme seul acquis !

    Je prends plaisir à rimer,

    Cela n'est pas japonais.

     

    On va me maudire

    Si j'y introduis le rire !

    Evitons le pire :

    Puristes, passez chemin,

    J'écris ce que j'aime bien !

     

    Je garde l'esprit

    Du tanka tant que je puis.

    Place aux fantaisies.

    Tanka vous n'appellerez

    Que ce qui est bien carré !

     

    Mes vers sont rimés,

    Rimes sonores, parlées.

    Voilà, c'est un fait.

    Pour ne pas tourner en rond,

    Je dis : ce sont mes chansons !

    ***

     

    C'était ma réflexion en rythme et en rimes sur le tanka, forme poétique japonaise très ancienne, qui ne doit pas contenir elle-même de réflexion.

    La prochaine page va venir juste après : je vais y déposer ce qui, venant de moi, se rapproche le plus du tanka !

     ***

     

     

    Lenaïg

    Illustration :

    Hokusai, Volubilis et Rainette, série des Grandes Fleurs.

    www.expositions.bnf.fr/japonaises/images/3/098a.jpg

     

    Note de Lenaïg : je ne distingue pas la petite rainette sur cette estampe. Qui pourra me dire où elle est ?

     


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  • homme-marche-haut ~the0002Pour se retrouver dans cette histoire, il faut savoir qu’à la fin se trouve un glossaire, où tous les personnages sont cités. Peut-être sera-t-il utile d’aller y jeter un œil en cours de lecture, chaque fois qu’on découvre un personnage nouveau, ou qu’on ne sait plus qui est qui !

     

    D’abord, se garer. L’Ours Castor est champion des créneaux, Petit Jean le lui a dit une fois, pouce levé, le lapin était là et a approuvé. Comment fait l'Ours pour caser sa Peugeot dans des espaces aussi petits ? Le Lapin, même avec sa Clio, choisit prudemment des rectangles libres plus grands ! Mais à voir l’Ours en action, le Lapin a appris, lui aussi, à faire petit ! Des fois, il en fait des parfaits, du premier coup !

     

    Ensuite, les soixante-dix-neuf marches à gravir. L’Ours Castor commence à les gravir, le casquelapin8 sur les oreilles, il écoute la radio. L’Ours Castor n’a pas mis sa casquette, encore une fois il l’a « oubliée ». Il va encore exposer le dessus de son crâne dégarni à la férocité du soleil, qui se montre. Le Lapin qui veille en pensée apostrophe

    l’astre du jour : « Cache-toi un peu, mon Ours monte ses soixante-dix-neuf marches, la tête découverte. Reviens après, hein, car tu sais bien que, sans toi, on n’existerait pas ! »

     

    Pourquoi l’Ours Castor ne veut-il plus coiffer ses casquettes américaines à grande visière, qui protègent ses yeux bleu clair fragiles de daltonien ? Il ne tient plus à ressembler à un Etats-unien ? Soit ! Mais les casquettes à l’ancienne qu’il veut remettre sur sa tête le vieillissent et lui vont beaucoup moins bien ! C’est malin, se dit le Lapin qui ronchonne dans son coin.

     

    L’Ours Castor tous les jours de la semaine, ou presque, monte ses soixante-dix-neuf marches. Il les a comptées, enfin à peu près. Où va-t-il, comme cela ? Suivons-le, on le saura ! Il y a un parc à traverser, enfin de l’ombre ! Les moineaux, les merles sous les frondaisons le regardent passer distraitement, en se disant « c’est l’heure ? » et continuent leurs conversations, ou leurs disputes, ou leurs chansons, pleine de cui cui et de beaux sifflements. Ah, nous voici en vue d’une école.

     

    oiseaux smallL’Ours Castor fait halte devant. QUOI ! L’Ours Castor fait la sortie des écoles ? Y aurait-il quelque chose de suspect, là-dedans ? Serait-il un ogre, un monstre déguisé et mal intentionné, des bonbons plein les poches, pour attirer les petits enfants ? Le Lapin dans son coin frissonne, sachant bien que des ogres comme cela existent malheureusement et il espère, ce Lapin dans son coin, que les gamins se rappellent toujours bien qu’ils ne faut pas parler à des inconnus et ne rien accepter d’eux. En ce qui concerne l’Ours Castor, le Lapin dans son coin n’a aucune crainte car il connaît son Ours on ne peut mieux.

     

    Voici en effet que surgit devant l’Ours Castor une petite fille, une grenouillette, qui crie : « Papi iiiii ! » et lui saute dans les bras. Puis tous les deux repartent en sens inverse, main dans la main, l’Ours droit comme un « i », portant, au fait, un lourd sac à dos, dont il ne se sépare presque jamais quand il sort. Le Lapin n’a jamais fouillé dedans mais n’en finit pas de s’étonner du poids du sac mystérieux. Le mystère c’est joli, un secret garde-t-il son charme quand on le connaît ? C’est sur le poids de ce mystère-ci que le Lapin n’est pas d’accord ; il s’inquiète de la santé du porteur du mystère. L’Ours rétorque que c’est bon pour son équilibre et pour son dos. « Mais on devrait t’appeler l’escargot ! » rigole le Lapin, « je crois bien que c’est presque ta maison que tu portes sur le dos ! »

     

    La grenouillette blonde babille et sautille, silhouette frêle et claire à côté de l’Ours brun à la peau tannée. Mais … ils passent à côté de l’auto ? Ils traversent la route, s’en vont-ils à pied, en laissant l’auto là ? Ah, une autre école. C’est un grand garçon qui en sort, au milieu d’un essaim et qui fait la bise à son Papi. Ce garçon a fini de sauter dans les bras de Papi, il a passé le relais. L’auto les voit réapparaître, rassurée. Ses passagers sont au complet. Elle sait, l’Auto, qu’avant de ronronner pour repartir, elle doit attendre patiemment qu’une dernière formalité soit accomplie.

     

    Cette formalité révèle d’ailleurs une partie du mystère de Monsieur Sac à dos de Papi. caricature-ruelle-dos ~u28460602Que voit-on sortir du Serveur Sac :

    - Et … deux moitiés de baguette avec du chocolat en crème pour la p’tite Souris, heu la Grenouillette !

    - Et … des tranches de pain de mie emprisonnant du chocolat à croquer pour Petit Jean, qui est déjà grand !

    C’est le moment sacré du goûter. Le Lapin dans son coin se remémore les grosses tartines rondes avec des barres de chocolat qu’il savourait aussi sur le palier devant le jardin, avec son frère et ses cousins, dans le soleil déclinant des débuts de soir d’août, préparées par leur Grand-mère, après qu’ils aient été se baigner dans la rivière salée en contrebas et il fait comme cela un énorme bond de quarante-sept ans en arrière au moins et cela lui fait du bien.

     

    L’Auto peut repartir, Papi au volant, pour conduire Yaya et Petit Jean chez Papa et Maman. Plus tard dans la soirée, Petit Jean confiera à son Grand-père ses secrets, ses soucis : « Papi, j’crois que j’veux plus faire de judo. J’en ai marre de me faire flanquer par terre par les grands. Et puis, à quoi ça sert ? On n’a pas le droit d’utiliser ce qu’on sait faire en dehors des tatami ! » La conversation qui s’en suit ne sera pas retranscrite ici. Le Lapin a fermé les oreilles, c’est dur pour un lapin mais il y réussit ! Le Lapin croit savoir que Petit Jean a changé d’avis depuis, donc il n’est pas un imbécile, car ne dit-on pas « il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis » ?

     

    Glossaire :

    1) Auto : l’Auto, la Peugeot conduite par l’Ours Castor qui ramène au bercail Petit Jean et Yaya.

    2) Grand Garçon : voir plus bas à Petit Jean.

    3) Grenouillette : voir plus bas à Yaya.

    4) Lapin dans son coin (ou Lapin narrateur) : Lenaïg.

    5) Monsieur Sac à dos : le sac mystérieux que l’Ours Castor porte sur le dos.

    6) Ours Castor : compagnon de Lenaïg.

    7) Papi : voir ci-dessus à Ours Castor.

    8) Petit Jean : petit-fils de l’Ours Castor.

    9) Petite fille : voir plus bas à Yaya.

    10) Serveur Sac : voir plus haut à Monsieur Sac à dos.

    11) Souris : voir encore à Yaya.

    12) Yaya : petite-fille de l’Ours Castor.

     

    papo-23034-figurine-de-collection-tirelire-de-petit-ours-bJe crois que le Lapin narrateur a fait le tour. On remarquera que certains personnages ont plusieurs noms, c’est pour brouiller les pistes !

    Ah oui, glossaire : liste alphabétique de mots qu’on ne comprend pas et qui sont expliqués, mais, ici, c’est la liste des héros et personnages de cette histoire.

    Le Lapin narrateur aime beaucoup les dessins et il pense que les enfants qui liront, et même les grands qui ont gardé un cœur d’enfant en feront peut-être après avoir lu ou écouté cette histoire.

    Il pense à l’Ours dans son Auto, mais un vrai ours ! Ou le Lapin dans sa Clio, mais un vrai lapin !

    Il pense à la petite fille blonde qui sautille, la main dans celle de son papi, ou encore à Petit Jean en tenue de judoka ! Puis il y a les oiseaux sur les branches, qui regarde passer l’ours …

    Le Lapin narrateur ne verra pas vraiment les dessins qui seront faits mais il le saura en pensée et il les admirera !

     

    Lenaïg

    Mardi 20 mai 2008

     

    A suivre : Les Soixante-dix-neuf Marches, le récit de l'Ours Castor ...


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  • Art-Passion - Galerie virtuelle - Tableaux historiques

     

     

    Marie Louve divague et joue sur des mots. Nothing else... Juste envie d’écrire sur une trame libre. J'ai laissé ma plume dire à sa manière sans chercher à comprendre. Au milieu d’une forêt de sens, entre ses miroirs et ses illusions, des monstres dépouillés de leurs formes. Un tableau blanc troué d’espace déboule ici-bas sans conteur ni chronos. Au bord de mon coeur ...

     

     

     

    Ma boule roule vague à la mer

     

     

    Dessous la lune, sirène affolée, parée de marabout casse-cou

     

    Dans son âme, la sauvage des mers recoud bout à bout écailles

     

    D’argent bafouées ailleurs, derrière des jours battant peur sans garde-fou

     

    Boule roule vague à la mer jette des trous soûlés d’amer vers des racailles

     

     

    Sirène, cheveux en bataille, avec des idées, maillent ses filets tressés au corail

     

    Voyais-tu sa beauté majestueuse, dans le noir, chasse des mythes à corps fou

     

    Droit devant, son œil entaille la muraille de glace, son fond s’éteint au portail

     

    Filou noyé sous les ombres floues, sur sa joue coulent, glissent d’amour, l’écrou

     

     

    Perce la mémoire blessée, tisse des ponts sur des rayons de lune, prépare semailles.

     

     

    ML.

    ***

     

    Illustration :

    Frida Kahlo - Art-passion, galerie virtuelle, tableaux historiques.

    http://art-passion.site.voila.fr/im2/00kahlo.jpg


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