• Pente et côte - 2ème partie et fin (entrée en scène de Klotz) - Rahar !

    fioles - www.comores-online.com

     

     

     

     

     Un drôle de contrat me parvient. Les termes de la proposition me sont familières. Je traîne toujours les oreilles dans mes déplacements, c’est une habitude. Je sais donc qu’on cherche à éliminer Marcos Deçaiche. Mais jusqu’ici, personne n’a pu honorer le contrat, le type est insaisissable, personne n’a pu le débusquer. Je pense qu’il a changé d’apparence. Cependant, même ainsi, de bons tueurs n’auraient pas été dupes, je dois donc reconnaître que le bougre a plus d’un tour dans son sac.
     

     

      La plupart des tueurs à gage se contente de mener la belle vie, bien peu ont l’idée d’investir pour améliorer leur performance. Voilà pourquoi moi, Klotz, j’ai englouti une fortune dans mon réseau informatique pour augmenter mon efficacité.

      Marcos Deçaiche est un malfrat discret. Il sait agir dans l’ombre, mais le bruit court qu’il n’a absolument aucun scrupule, ce qui donne la chair de poule à beaucoup. Sous ses airs de petit représentant de commerce, il a à son actif une dizaine de meurtres, dont au moins cinq de ses propres mains ; je le sais de source sûre, d’après l’interrogatoire d’un petit maffiosi. Je cherchais autre chose, mais j’ai eu l’information comme bonus en quelque sorte. Je classe toujours toute donnée qui pourrait m’être utile plus tard. En l’occurrence, je n’ai aucun scrupule à m’occuper de ce forban de Marcos. « Démarcheur » de l’Organisation, il était chargé de « persuader » les clients à souscrire un contrat verbal de « protection ». D’après les données que me transmet Romain, le bougre s’est monté une petite telecommande-universelle-solaireaffaire en détournant certains clients à son profit personnel, ce que l’Organisation a finalement découvert, si je m’en réfère au présent contrat sur sa tête. Pas bête, Marcos Deçaiche s’était préparé à cette éventualité et a levé les pieds à temps. Il est marié, mais sa femme n’est sûrement pas au courant de son vrai métier, à preuve, il s’est enfui seul. La plupart des maffieux mariés s’efforcent de ne pas mêler leur famille à leurs affaires et s’affichent comme des époux et pères modèles.

     

     

      Le malfrat peut être n’importe où, mais je me fais fort de le localiser. Je demande à Romain de scanner les caméras publics de toutes les villes de l’état. C’est là qu’intervient le coûteux matos dans lequel j’ai investi. Le très sophistiqué logiciel de reconnaissance faciale que j’ai piqué aux services secrets permet un scan ultra rapide et automatique ; il se joue de tous les déguisements et maquillages imaginables.
      Romain repère ma cible entrant dans une banque à Bretz, une petite ville de l’est du pays. Je suppose qu’il prend ses dernières dispositions avant de partir pour une autre contrée. Je sais qu’il ne va pas prendre l’avion et les tueurs moins futés vont poireauter en vain à l’aéroport. Romain m’informe qu’il n’y a pas eu de vol de voiture récemment. Je ne pense pas non plus que mon lascar se risque à fuir dans une caisse volée. Donc il ne reste que le bus. J’ai intérêt à bouger mes fesses.

      Un avion me dépose à Bretz. En ville, je demande à Romain de scanner toutes les stations de Blackhound. J’entre dans les toilettes d’un motel et me grime. Je rends grâce à Papa Rajy, le célèbre acteur de Prettywood, de m’avoir donné quelques tuyaux pour me mettre dans la peau d’un personnage donné. Je mets des lunettes sans degré, je me coiffe avec une raie médiane, ce qui parfait mon image de petit fonctionnaire insignifiant. Dans des poches discrètes de ma veste fatiguée, s’alignent de petites fioles de poisons et de toxines ; je n’ai pas encore arrêté mon choix. Quoiqu’il en soit, je ne peux utiliser de feu. Ma petite valise en carton bouilli est assez défraîchie pour ne pas attirer l’attention.

     

     

    fioles chimie5 - www.scientic.ca  Ma cible prend le bus pour aller vers le sud, alors qu’en continuant vers l’est, il n’aurait qu’une centaine de kilomètre à faire pour franchir la frontière. Futé de sa part : un tueur ordinaire supposerait que le fugitif s’empresserait de prendre la poudre d’escampette et prendrait un billet à la dernière station avant la frontière, et il éplucherait la liste des voyageurs de cette station en vain, ou bien ferait le pied de grue pour rien dans la station.
      J’ai choisi le fond du car pour pouvoir tout surveiller. J’ai été rejoint par un prêtre volubile qui accompagnait des religieuses. Sa conversation est intéressante, voire enrichissante ; on débat sur la réincarnation contre la résurrection, la légitimité de l’euthanasie, les mérites de l’andouillette au vin blanc… Et j’ai déduit de nos échanges d’idées que c’est un jésuite au raisonnement des plus tortueux.

      Marcos a jaugé tous les passagers, et ce qu’il a constaté l’a apparemment rassuré, je vois qu’il se relâche en subissant de bonne grâce le babillage de la petite mémé assise à côté de lui. Je dois admettre qu’il a réussi sa transformation ; il était loin le bellâtre qui paradait dans un costume à trois cent dollars avec un maintien hautain de sortant de Harvard… qu’il n’est pas, évidemment. Il semble ne plus être sur ses gardes, mais il me faut être méticuleux. Et puis, d’après ce qu’on m’a dit, le type est plutôt suffisant et très sûr de lui-même. J’ai un peu de difficulté à me concentrer avec ce bavard de jésuite. Il m’est pratiquement impossible d’agir dans le car, je ne suis pas suicidaire. Je ne pourrais exécuter ma mission que dans un relais.

     

     

      Il n’y a plus que deux arrêts, avant la frontière. Je dois maintenant me décider. J’ai un ami biologiste de l’armée qui m’a fait cadeau d’un enzyme à l’effet assez spectaculaire. Il empêche la formation du mucus qui protège l’estomac d’être attaqué par l’acide chlorhydrique au cours de la digestion, provoquant ainsi des ulcérations fatales et une hémorragie interne monstre. Le plus beau, c’est que cet enzyme est tout ce qui est de plus naturel et tout autopsie n’y verrait que du feu.

      Arrêt. On se dégourdit et on va casser la graine. C’est l’occasion ou jamais. Je surveille le menu que Marcos a commandé. Le café !
      J’ai un autre gadget qui va m’être très utile. C’est une télécommande universelle. Elle va me permettre d’agir sur la télé du bar. Je me lève en direction des toilettes en passant devant la table de Marcos. J’augmente brusquement le volume du poste ; tout le monde tourne la tête, certains en sursautant, et j’en profite pour assaisonner le caoua de ma cible avec l’enzyme.
    Télécommande universelle - www. 

     

     Je ne suis pas inquiet, mon ami le biologiste avait fait une démonstration avec un rat de labo qui a avalé une caméra miniature et j’ai été impressionné. Quelques kilomètres passent et je vois que ma victime est mal à l’aise. Le bus dévale une pente et Marcos accompagne exagérément le mouvement. Maintenant on gravit une méchante côte. Les viscères du malfrat se tassent, ce qui aggrave la pression sur son estomac, et je le vois se plier en deux. Une quinte de toux le secoue, il bave du sang… puis il en vomit. C’est fini.
      Au prochain arrêt, je vais prendre l’avion et je rentre chez moi.

     

     

     

    -Rahar-

     

     

     

    Illustrations :

    Fioles diverses (grande photo www.comores-enligne.com)

    et télécommandes universelles.


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  • Commentaires

    1
    Mardi 14 Juin 2011 à 14:28
    Libre  necessite

    Comme on dit les mouches ont changés d'âne. Amicalement dan

    2
    Mercredi 15 Juin 2011 à 00:06
    Lenaïg Boudig

    On ne peut échapper à Klotz ! S'il décide d'accepter un contrat, peu importe où se cache la cible, il la trouve ! Il a beau dire que c'est le fric qui l'intéresse, il ne s'en prend qu'aux salauds meurtriers ... C'est un justicier hors la loi, un drôle de Zorro ou de Superman comme me dit Marie-Louve à son propos. Un personnage comme on aime en trouver dans les romans, car dans la vie nul n'a le droit de se faire justice lui-même ... Une super création à la Dexter (mais je crois bien que ton Klotz a précédé Dexter), une décapante nouvelle, de plus et j'espère qu'il y en aura d'autres ! Tu es lu aussi par Denis Costa par le biais de facebook, qui a "cliqué" son approbation, Rahar. Merci beaucoup, bises à toi, à plus !

    3
    Mercredi 15 Juin 2011 à 11:32
    jill-bill.over-blog.

    Et bien...  Je vais regarder les enzymes autrement... Amie, ennemie !   Merci à vous deux !  Bonne journée   Bizzzzzzzz JB  

    4
    Mercredi 15 Juin 2011 à 17:24
    Marie-Louve

    Gare à Klotz si vous faites dans les affaires louches, mais payantes en ce bas monde ! Si Marcos a fait méchante tache, l'enzime choc servira au grand nettoyage. Quel personnage ce Klotz ! On finit par croire qu'il est un "BON " tueur ou, j'aime le croire. :-)))

    5
    Denis
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:43
    Denis

    Ton Klotz à toi est bien sympa, contrairement à la mienne, une certaine Eva Klotz, chantre des nostalgiques qui prônent le retour du Haut-Adige à l'Autriche, fille d'un terroriste sud tyrolien dans les années 60 qui a du sang sur les doigts (et en fuite en Autriche)...

    6
    Rahar
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:43
    Rahar

    Salut à tous. Je n'approuve pas les actes de violence gratuite. Pour captiver, un personnage peut être extrêmement méprisable comme Fantomas, totalement attachant comme miss Marple, ou diaboliquement futé comme Lupin. J'ai préféré choisir quelqu'un de sympathique, pas trop sanglant, mais à la limite de la moralité. Quant à la légalité, sachez que Klotz est légèrement autiste et malgré sa vive intelligence intrinsèque, ne comprend pas très bien les subtilités de la justice codifiée.

     Il paraît que "tout flatteur vit au dépens de celui qui l'écoute"... Tant pis, je me fais avoir en vous écoutant, et je vous promets une autre nouvelle dans quelques jours (vils flatteurs, va!)

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    7
    Mona de plumes au v
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:43
    Mona  de plumes au v

    Eh bien Rahar point de compliments donc! dommage qu'il ne travaille que pour l'argent! Je lui aurais bien suggéré de s'en prendre aux pédophiles qui ne se soignent pas,  par exemple, entre autres...  J'ai bien aimé que tu soulignes que les affreux personnages n'ont pas la tête de l'emploi. Dommage mais c'est ainsi! Landru recevait des lettres d'amour passionnées dans sa cellule... Et son "matos" reconnait-ils les malfrats s'ils sont passés par la chirurgie esthétique?

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