• Jeu de Brunô n° 27 - Arthur et le mur (3e partie et fin !) - Lenaïg

    coloriage coyote warner 7

     

     

    Dans l'immense forêt Chourave, de la planète Pif, dans la galaxie du Concombre masqué, si le Spirou brillait comme partout ailleurs, ses rayons se posaient sans problème sur la canopée sans arriver parfois jusqu'au sol. Sous le feuillage dense, sur les tapis d'humus, de mousse et de champignons, la vie animale battait son plein, cherchant sa nourriture, traquant ses proies dans la pénombre. Mais les perroquets étaient ceux qui avaient la part belle. Toutes les variétés terrestres recensées, comme celles typiquement pifiennes, étaient représentées : gris du Gabon (ceux qui, sur Terre, étaient les plus aptes, sinon les seuls à reproduire la voix humaine), aras, amazones, loris et perruches, gent ailée souvent multicolore au-delà de ce qu'on pouvait imaginer. Les perroquets avaient le choix de s'abriter dans les frondaisons ou de s'élever jusqu'à rejoindre les rayons spirouaires sur les plus hautes branches et même de survoler la canopée. leurs seuls prédateurs auraient pu être des buses ou des faucons mais il était rare d'en voir s'aventurer au-dessus de la forêt.

     

    Ce fut ainsi jusqu'au début du XXIIIe siècle terrestre. Jusqu'à l'installation des premiers pionniers humains. Maintenant, les couples de psittacidés, dont les membres restaient d'une fidélité sans faille l'un envers l'autre, enseignaient la crainte et la méfiance des pièges humains à leurs oisillons. De gigantesques filets avaient à trois reprises été jetés sur eux, capturant et enlevant à chaque fois une centaine de leurs congénères. Le téléphone aviaire avait bien fonctionné, car les oiseaux communiquaient entre eux. De moineaux en pigeons, d'oies sauvages en faucons, le sort des trois cents perroquets captifs était maintenant connu. Les époux cruellement séparés avait la maigre consolation de savoir leurs moitiés vivantes, estropiées, manipulées mais quand même bien traitées, bien nourries.

     

    A la clinique Krapulax, notre gros oiseau coureur Agrippine était la coqueluche du personnel et des patients. Elle avait ses têtes et ne laissait pas tout le monde approcher ! Agrippine avait suivi Fougériane l'après-midi où celle-ci fit sa découverte extraordinaire. Il y avait répétition de chant et musique à l'ombre des tilleuls et Fougériane avait entraîné Agrippine en clamant bien fort :

     

    "Viens, Agrippine, viens voir et écouter ce que tes p'tits "frères" sont capables de faire !" Agrippine, malgré sa taille, désorientée, impressionnée par ces volatiles chantant comme les humains, tentait obstinément de se cacher derrière Fougériane, en lui tirant la manche pour lui demander de s'en aller. Draco Luthor, toujours aux aguets, se mit à rire devant ce tableau et détourna complètement son attention.

     

    Profitant d'une pause, un perroquet gris à queue rouge, allant et venant nerveusement sur son perchoir, émit un rire sarcastique, le même que celui de Draco Luthor d'ailleurs, et s'écria :

     

    "Crrr, crooc, elle est grosse mais elle est bête !" Agrippine, furieuse, percevant la moquerie, avança le bec, retenue par Fougériane, tandis que le perroquet changeait de ton :

     

    "Excuse-moi, ma jolie. Je faisais juste l'idiot. Alors, vous faites partie des p'tits nouveaux ? Moi je sais, j'ai senti : notre sort vous déplaît, à toi et ton ami, hein ? Alors, si jamais vous pouviez faire quelque chose pour nous, n'hésitez pas ! Les humains sont capables du pire comme du meilleur. Nous vivons assez longtemps, je ne désespère pas de revoir un jour ma compagne, si elle ne s'est pas laissée dépérir."

     

     

     

    Après cette prise de contact, les événements se précipitèrent, car il fallait bien que l'histoire se terminât, et de la meilleure façon possible. On apprit qu'une nouvelle razzia dans la forêt Chourave se préparait. Arthur obtint une permission de sortie exceptionnelle pour l'anniversaire, très opportun, de sa grand-mère qui, cette année-là, eut deux fois soixante-dix ans ! César et lui avertirent la brigade policière contre la maltraitance animale. Les malfrats furent coincés en pleine forêt au moment où ils jetaient leurs filets, tous les perroquets libérés sur le champ. Les deux véhicules aéroportés de l'expédition revinrent se poser sur l'héliport de Krapulax, tels deux chevaux de Troie ; en sortirent des policiers soigneusement armés qui maîtrisèrent sans trop d'effort les coupables, le directeur le premier. Des coups de feu furent échangés, des pistolets paralysants actionnés, provoquant quelques blessés de part et d'autre.

     

     

     

    Il y eut une période de confusion, d'émotion, de flottement et d'attente, la prise en charge des patients et des perroquets étant assurée par le personnel médical non impliqué ; les vétérinaires, eux, furent prestement remplacés. Un riche mélomane herculien acquit la clinique. La Compagnie galactique de robotisation fabriqua d'incroyables prothèses qui rendirent aux ailes coupées leur efficacité. Les perroquets eurent le choix d'être transportés dans leur forêt natale, ou de rester. La plupart, artistes dans l'âme, décidèrent de poursuivre leur carrière et firent venir leur compagnons ou leurs compagnes. Désormais, on les connaîtrait sous leurs vrais noms, on verrait leurs vraies effigies car le scandale avait fait grand bruit dans la galaxie ; les ventes se multipliaient vertigineusement.

     

     

     

    Arthur, Fougériane et Agrippine ? Ils travaillaient d'arrache-pied, plus enthousiastes que jamais. Ils connurent leurs premiers coups durs, leurs premiers affrontements lors des voyages interplanétaires, car les artistes ailés étaient très convoités. Mais cela est une autre histoire, tout comme la question de savoir s'ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Pour cela, ils avaient le temps ; ce qui était sûr, c'était qu'ils ne comptaient plus leurs amis perroquets !

     

     

     

    Fin !

     

     

     

    Lenaïg

     

     

     

     

     

    Notes

     

    "Pifien" : de la planète Pif,

     

    "Herculien" : de la planète Hercule (ne pas confondre avec : herculéen).

     

     

     

     

     

    Image :

     

    Le Bipbip, le "vrai" !

     

    Pour Agrippine, il faut laisser libre cours à son imagination. 

     

     

     


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  • Commentaires

    1
    Mardi 27 Avril 2010 à 05:04
    marie-louve

    J'arrive au pas de course quand enfin tout est bien qui finit bien ! Ces vilains voleurs de perroquets sont hors jeu maintenant. Cela me plaît énormément. J'aimerais beaucoup qu'on puisse faire ainsi dans la vraie vie. Mettre hors d'usage avec grande civilité tous  les abuseurs de pouvoir sur les autres. Sortons les flûtes de champagne et buvons des bulles à cette idée ! Tchin tchin ! Bon mardi et bisous.

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    2
    Mardi 27 Avril 2010 à 15:47
    marie-louve

    On éprouve du plaisir à lire et à écrire parce qu'on aime puiser notre plaisir comme dans la pêche aux mots. On s'en nourrit par besoin. Enfin, j'imagine. J,ignore comment j'aurais réagi devant ces perroquets de proie qui dans la réalité n'existent pas. Il se peut que je me sois dit : " Ce sont des perroquets imaginaires, qui vivent ailleurs dans un autre monde ... Tout est possible ? Je n,ai pas vu tes personnages nés des revues hebdomadaires de  Pif Gadget parce que je ne connaissais pas ces lectures. Par contre, j'ai fait un lien avec cet Arthur et son Excalibur que je connaissais. Il n'y avait pas de rapport avec tes personnages. On interprète avec nos ressources. Lire. Le lecteur devient souvent un autre co-auteur avec son imaginaire à lui. Enfin, c'est ainsi que je le conçois pour le moment. L'important c'est le plaisir qu'on partage avec des mots offerts entre nous. Ce plaisir construit du bonheur, ça c'est certain ! Bisous. Je vais lire mes retards... avec appétit. :-))) J'espère que vous avez le soleil. Ici, il brille par son absence !

    3
    Mardi 27 Avril 2010 à 18:11
    marie-louve

    Ouille! Je suis allée me recoucher. Le retour est pénible et dehors tout est blanc !!! Gr....J'ai froid. je reviendrai plus tard... Bizs. Ton Ours fut de bon conseil. J'aurais eu même peine à écrire  sur un sujet aussi terrible. À plus !

    4
    Mardi 27 Avril 2010 à 23:15
    marie-louve

     Cela m,a requinqué moi aussi. Un beau moment chaleureux au milieu de ce temps tout blanc dehors. Bonne nuit !

    5
    Mercredi 28 Avril 2010 à 13:35
    Mamie Claude

    Les tractations de changement de Capitaine terminées, suis revenue lire les 3 épisodes "du mur" !Il s'agit d'un ballet de jeux de mots animés par une imagination débordante, sans oublier bon nombre de parallèles avec l'histoire !! En résumé, un vrai régal égrené comme toute vie, de quelques aléas, mais dont la chute est est message d'espérance !! un grand merci avec mille bisous;

    6
    Lundi 3 Mai 2010 à 00:07
    Pascale la Tricotine

    ton néon est affolant !!! hihi!! un drôle d'histoire, romanesque avec rebondissements qui se lit avec plaisir à la vitesse d'un bip bip !! beau message final !! enfin la police n'est pas arrivée en m^me temps que la cavalerie !! elle est arrivée à temps !!! hihi!! bravo Lénaïg il se cache de vilaines choses parfois derrière les murs   bizzoux du soir avant de me préparer psychologiquement aux greniers du matin !!

    7
    Dimanche 30 Mai 2010 à 18:27
    SAM ELEON

    Une fois un peu rapido, mais tout se termine bien et tant mieux. Merci pour cette histoire originale, loufoque aux trouvailles étonnantes !

    8
    Mona l
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:56
    Mona															l

    Je reviendrai lire plus tard mourant littéralement de FAIM, défaillant presque (j'exagère mais...)

    9
    Mona l
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:56
    Mona															l

    Franchement c'est énervant les lecteurs qui ne signalent pas leur passage même par un commentaire bref ou un simple smiley! Bien lu cette fois: une fin heureuse, sans tomber dans la béatitude les humains étant ce qu'ils sont. Les perroquets semblent plus sympa , décris de cette façon... Une histoire que j'ai bien aimé lire, sincèrement

    10
    Mona l
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:56
    Mona															l

    Je suis allée un peu voir les croqueurs de mots, et certains des blogs sont super mais je sais aussi que je ne pourrai pas être partout. S'éparpiller sur le net c'est trop chronophage, surtout si on veut penser à un projet, si enplus on travaille. et si on tient à sa forme...Pour Farouk , tu n'a pas parlé de ce qui m'intéressait vraiment: son état de santé actuel! Sur Writing.com, j'ai appris à réviser et corriger mes textes et je suis en correspondance avec un fermier littéraire Afrikans (??) qui me conseille bien. J'envisage de traduire mes légendes bretonnes mais ça prendra du temps là encore... Marie Louve rentre au Québec aujourd'hui si j'ai bien compris... La fidélisation avec tant de contacts, je sais que c'est trop pour moi.

    11
    Mona l
    Vendredi 6 Juillet 2012 à 08:56
    Mona															l

    Pourrais tu me rappeler qui est Denis Costa? Je ne me souviens pas l'avoir lu...

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