Issy-les-Moulineaux.

Carte postale à Fée Dodue

Photo de Mère Chagrin-Plaisir dans les ailes illuminées de son Ange Gabriel à Issy-les-Moulineaux. Aux portes de la Tour du vieux Moulin, après les Vêpres : Mère en prière et en état de grâce.

uvu

Chère Dame Fée Dodue,

Dieu soit loué pour votre générosité qui  me permet de réaliser mon rêve solitaire au milieu de la Tour aux Figures Dubuffet offert à mes yeux enchantés sous le soleil d’Issy-les-Moulineaux. Sans vous, jamais je n’eusse eu le privilège de succomber sous les charmes féconds de ces lieux paradisiaques. Fasse que les saints vous viennent en aide pour vous protéger des imprévisibles frasques de la novice Sabine Allaire-Duperron. Lui faire boire un litre de concentré de passiflore et un autre de millepertuis par jour vous évitera plusieurs désagréments avec cette dernière troublée permanente et bien mal patentée. La passiflore lui plantera son clou et le millepertuis la rendra euphorique d’amnésie. Un bien souhaitable. Ne manquerait plus que Mère Sainte-Carabosse n’appenne que son chaperon ne me suive pas au pas  à Issy. N’ayez crainte, Sabine suit ce régime fort efficace depuis que Mère supérieure m’ait confié son éducation au moment de son arrivée au couvent.

Laissez-moi vous raconter les premiers instants de mon  joyeux périple depuis que mes pieds satinés ont touché terre Moulinoise. Sans aucune hésitation, sitôt débarquée de l’autocar, je courus jusqu’au parvis de l’église Notre Dame des Pauvres. Là, je vis de pauvres diables n’ayant pas de mère pour consoler leur misère. J’ouvris mes bras et ma besace remplie de surplus de ma production d’hosties ratées que je leur offris généreusement. Ventre affamé n’a point d’oreilles et dans le tintamarre des bruits de la foule rassemblée pour la procession de je ne sais qui, repus, les miséreux se réfugièrent sur les bancs publics et piquèrent un roupillon. La conscience heureuse, je gravis follement les marches menant aux portes de l’église en priant le ciel que mon abbé Gabriel y soit déjà à préparer l’heure des vêpres. Il était là, sublime, dans la lumière des vitraux qui dansait sur son corps enflammé au centre de la nef. Je ressentis une intense chaleur couvrir tous les pores de ma peau souffrant le désir retenu de m’en approcher. Je n’osais, mais une main inconnue me poussa jusqu’à lui.

Cette main inconnue, eut la brillante idée de prendre cette photo de notre première rencontre. Je la lui ai achetée à gros prix, mais aucun regret ne viendra à jamais, rompre ce tendre moment d’état de grâce entre lui et moi.

Recevez mes salutations distinguées ainsi qu’une copie de cette précieuse relique.

Mère Sans Chagrin pour ce temps béni.

uvu

Marie-Louve