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    Agathe au comptoir d’accueil


     

    P 220px-Seraphim_-_Petites_Heures_de_Jean_de_Berry.jpg ierre prenait de l’âge au compteur et sa mémoire flanchait plus souvent que parfois. Donc,  la haute direction, par respect pour ses droits d’aîné, lui avait imposé une préretraite qui lui permettait conditionnellement de travailler sur un horaire de deux jours semaine : les lundis et les mardis seulement. Voici les deux conditions qui assujettissaient le nouveau contrat de travail du vieux Pierre : primo, demeurer silencieux sous la surveillance sévère  d’Agathe Lapierre, nouvelle recrue de cet univers aux assises solidement ancrées dans les mœurs de la majorité des bons citoyens et deuxio, laisser ses souliers à la porte d’entrée.

     

    Occuper le poste de contrôleur exigeait une rigueur à toute épreuve et Pierre avait perdu la boule depuis longtemps. Fait reconnu par tous, sans aucune équivoque. Bien sûr, cela  avait généré d’affreux problèmes aux conséquences désastreuses pour la sécurité de cet espace aérien qui était devenu une passoire ouverte à la ratatouille née de tous azimuts.


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    Ce ne fut pas une mince affaire pour Agathe Lapierre de remporter le titre de contrôleur au sein de cette entreprise dominée par des esprits étroits, sexistes et rébarbatifs aux droits d’égalité des femmes, mais ses airs angéliques avaient eu gain de cause sur tous ses rivaux. Désormais, Agathe portait le précieux collier de pierres de sardoine et tenait en main, le sceptre rouge sardonique. À la guerre comme à la guerre ! Pour grimper dans l’échelle, il faut ce qu’il faut : le bon bout du bâton pour ne pas dire le bon outil, celui du feu sacré.

     

    ***

     

    seraphin1.jpg Ailleurs, ce dimanche-là, Séraphin* boudait Donalda, son épouse qui menaçait de le quitter s’il n’allait au bois lui bûcher un sapin de Noël.

     

    -          Femme ! Tu n’y penses pas ! Sacrifier un sapin sur ma terre en bois debout pour tes caprices de créature ! Pis après, tu vas vouloir des décorations dedans ? Ça va coûter la peau des fesses tout ça ! J’imagine que tu voudras de l’électricité dans tes lampions. Tes folies me mèneront à la ruine. J’ai dit non !

     

    -          Séraphin Poudrier ! Espèce de grippe-sou, mauvais oncle Picsou ! Tu sauras que Noël c’est pour tout le monde !  Je veux mon sapin devant notre cabane de suite, sinon, je t’i’slam la porte au nez maintenant.

     

    Furieuse, Donalda lui claqua la porte au nez avec tant de violence que Séraphin en vit des étoiles puis une autre grande porte s’ouvrit devant ses yeux. Une sourde peur l’envahit quand il aperçut l’affiche bleu pervenche sur le mur qui lui faisait face : Dieu est occupé. Puis-je vous aider ?  

     

    ***

     

    -Approchez !


    Au son de la voix qui l’interpelait, sa tête pivota vers la gauche à angle droit et ses yeux roulèrent d’incrédulité devant l’apparition de cette  femme aux trois paires d’ailes qui la revêtaient entièrement.

     

    -          Je me présente. Agathe Lapierre, tenancière en chef des lieux célestes.  Déclinez-moi vos noms, vos origines et vos fonctions. Étalez sur cette table tous vos péchés. Videz vos poches dans ce panier à salade.  

     

    En état de choc, Séraphin n’offrit aucune résistance. Il obtempéra sur le champ.

     

    ***

     
    seraphin-dans-la-bande-dessinee-d-albert-chartier.jpg Agathe Lapierre jeta un œil sur la table où elle vit les sept gros vilains péchés capitaux que venait de laisser tomber avec fracas l’avaricieux Séraphin Poudrier qui se sentait dans ses petits souliers devant cette femme à plumes.

     

    -          Viande à chien ! Vous n’allez pas me refuser de voir le curé pour ma confession et mon absolution ! Vous n’avez pas le droit !


    Agathe sortit son tampon au fer rouge et oblitéra le front de Séraphin : Entrée refusée.


    -          Ici, vous n’avez rien d’un Séraphin. Taisez-vous et chaussez ces sabots de charbons ardents. C’est à votre tour de danser la gigue du pendu pour payer votre dette. Vous voyez cet escalier au fond du corridor ? Il mène au sous-sol, votre destination. Allez oust, au trou ! 

     
    Fière du devoir accompli, aux anges, Agathe referma le grand livre des minutes enregistrées au registre céleste. 
     
    Marie Louve

     

     

    * Séraphin Poudrier, né du  roman « Un homme et son péché» écrit par  Claude-Henri Grignon.

    « L'histoire se passe lors de la colonisation du Nord (la région des Laurentides au Québec vers la fin du XIXe siècle (env. 1885-90), à Sainte-Adèle. Un homme sans scrupule, Séraphin Poudrier, domine la petite communauté en utilisant sa richesse.
    Maire du village, il épousera Donalda Laloge, après que le père de celle-ci, incapable de rembourser sa dette, la lui donne en mariage. Donalda, une femme douce et soumise qui était promise au bel Alexis Labranche, vivra plutôt sa vie en fonction des volontés de cet avare mesquin et méprisant, mais ne se laissera jamais abattre par sa situation. Nous visitons la région du nord de Montréal à travers les familles Fourchu, Laloge et Bouchonneau, sans oublier le curé Labelle et la riche héritière.
    Sources : http://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Belles_Histoires_des_pays_d'en_haut  »

     

     

    Avec la participation de Di pour le choix de la vidéo :

     

     


     

     

     

    Illustrations cueillies sur le net  :

    • Portrait de Folcoche de Vipère au poing d'Hervé Bazin (détournement d'image de Lenaïg : voir ici l'austérité sans faille de l'Agathe Lapierre de Marie-Louve, qui trône au grade le plus haut de séraphin dans la hiérarchie céleste), en lui rajoutant les six ailes qui siéent à sa condition.
    • Représentations de séraphins divins.
    • Portraits de Séraphin Poudrier : photo puis dessin de Serge Chapleau.



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    Lena et le cri ! Mais ... où est passé Alastair ?

     

     

    Lena se frotta les yeux. Elle s'était bien activée toute la journée allant jusqu'à se baigner dans un loch alors que les Ecossais, eux mêmes, y renonçaient à cause de la température glaciale de l'eau. Peu me chaud, pardon chaut, s'était dit Lena, Je ne me suis pas du genre à me dégonfler alors que les plages du Nord Finistère non plus ne peuvent se vanter d'avoir une température comparable à celles de la Méditerranée. Mais ces bains sont vivifiants !

     

    Et vivifiée elle s'était bien sentie, après coup, piquant un petit sprint autour du lac pour se réchauffer. Sa maman la couvait d'un oeil attendri et admiratif, elle même blottie dans un manteau bleu du plus bel effet, mais ne la suivrait pas ! Donc alors qu'après un léger souper de porridge épais, haggis et shorbread arrosé de whisky pure malt elle s'était endormie sans problème, un hurlement sinistre avait traversé la nuit agitée de bourrasques et l'avait réveillée en sursaut, ce qui la mit de mauvaise humeur et on la comprend !

     

    Mona

     

    ***

     

    Alastair et Lena réfléchissant au balcon de l'hôtel

     

     

    Curieusement, si la journée avait été très ensoleillée et si on avait pu rester en tenue d'été sans même enfiler de gilet le soir venu, dans la nuit le vent s'était levé, chargé d'un petit crachin digne du temps breton. Mais le sommeil de Lena était bien agité aussi lorsqu'un cri déchirant, un hululement qui aurait fait se dresser les cheveux de n'importe qui d'autre droit sur sa tête, retentit, l'arrachant au sommeil. Maman ne broncha pas, dans leur chambre à lits jumeaux, et continua son sommeil, recouverte du simple drap, la couette pliée sur la chaise à côté, à peine les boucles de ses cheveux visibles ...

     

    Et pourquoi maman ne broncha-t-elle pas ? Parce que ce cri dans la nuit n'avait rien d'humain, tout déchirant qu'il était ... Or, maman ne croyait pas du tout aux fantômes et, par voie de conséquence, ne risquait pas d'en voir un ; Alastair ? Totalement inconnu au bataillon chez maman ! Elle en avait entendu parler par Lena, mais le prenait pour un personnage de fantaisie comme sa fille aimait en créer.

     

    Lena enfila vite son jean et son blouson à capuche, puis ouvrit la porte-fenêtre et sortit sur le balcon du deuxième étage de l'hôtel. Un nouveau hululement se fit entendre et Lena put alors situer la provenance de ces cris : le château de Haunted Moss, non loin de là, bâtisse moyenâgeuse en partie restaurée qui commençait à devenir un lieu de tourisme intéressant et fréquenté, remeublé et orné des portraits d'ancêtres du propriétaire ... "Alastair ? Qui hurle ainsi dans la nuit ? Cela ne te ressemble pas !"

     

    Plop ! Aussitôt hélé, aussitôt là ! Alastair se téléporta du chemin de ronde des remparts de Haunted Moss jusqu'à l'Hôtel Rabbit Saraband. "Hellow, Lena ! C'est mon ami Donald McDonald, il avait besoin de s'exprimer cette nuit, c'est sa façon à lui ! Contrairement à moi, il tient à son registre tourmenté, il est amoureux fou de la Dame blanche, qui se dérobe à lui". Donald semblait calmé, car il n'y eut pas d'autre hululement.

     

    Lena rentra chercher le paquet de cigarettes Jack Sparrow et le briquet sur le bureau de la chambre, revint, essuya d'un mouchoir en papier l'humidité déposée par le crachin sur une des chaises métalliques du balcon coursive et s'assit. Elle se promettait tous les jours d'arrêter de fumer, mais c'était les vacances et quelques excès étaient permis, avait-elle décidé. Alastair, tout heureux, s'assit sur la chaise d'à côté.

     

    "J'ai dévoré mes assiettes -enfin, leur contenu- hier soir au dîner, je n'aurais pas dû me lester ainsi l'estomac parce que, avant le cri de ton ami Donald, je faisais un rêve invraisemblable où Maman et moi nous étions en scène, dans des rôles surprenants. Figure-toi que je m'y livrais à des exercices physiques frénétiques et la lubie m'avait pris d'aller nager dans le Loch ; j'en mettais plein la vue par mes prouesses de nageuse sous l'oeil attendri et admiratif de Maman, elle-même blottie dans un magnifique manteau de laine bleue ! En réalité, j'ai juste trempé les pieds dans le Loch Ness (et même que le monstre est venu voir en sousmarin qui troublait ses eaux ...), pas dans ce Loch-ci, que je n'ai fait que longer tout au bord et mon plus dur exercice a été d'y lancer des petites pierres plates en tentant des ricochets ...

     

    Oui, tu peux rire ! Et je ris de moi-même aussi ! Est-ce que j'ai imaginé une telle attitude de la part de Maman, qui m'a appris à nager et qui peut se targuer, elle, d'avoir été très sportive dans sa jeunesse, pour compenser le regard désapprobateur qu'elle m'a lancé devant le copieux menu que j'avais choisi ? Maman s'est contenté de remarquer : "Tu vas manger tout ça ?" mais j'ai bien compris son avertissement muet : "Ne va pas te plaindre ensuite d'avoir grossi !"

     

    Et pourquoi dans mon rêve s'enveloppait-elle dans un superbe manteau de laine bleu ? Hein, Alastair, dis-moi ! Nous sommes au mois d'août ! Ah, ça y est, j'y suis ! En début de voyage, à Edimbourg, nous avons eu quartier libre pour faire du shopping et, dans un joli grand magasin de vêtements, Maman a essayé un ravissant manteau bleu de facture écossaise qui lui allait à ravir mais ... hors de prix. Nous sommes tout de même ressorties du magasin un beau gilet écossais chacune.

     

    Bon, les bonnes choses ont une fin, Alastair, demain : le car nous attend devant l'hôtel à 9 h 00, retour à Edimbourg et, à l'aube le jour d'après, départ pour l'aéroport et retour en France. Assez parlé de moi, à toi, Alastair ! Quels sont tes projets ? Tant pis si je ne retourne pas dormir, je n'en ai plus envie."

     

    Alastair exposa son idée encore vague de proposer des prestations de fantôme clown aux propriétaires de manoirs et châteaux hantés touristiques. Lena se creusa la tête. "Relis Harry Potter, par exemple, Alastair, on y trouve des fantômes bien pittoresques et plutôt marrants ! Propose d'apparaître sur les tableaux d'ancêtres, fugacement, derrière les nobles personnages posant, en faisant des coucous et des grimaces ! Déplace-toi de portrait en portrait ! Les gamins s'amuseront à chercher où tu es, etc ! Et tout le monde louera le propriétaire et ses ingénieux stratagèmes ! Tu feras fureur et tu seras réclamé !"

     

    Lenaïg

     

    ***

     

    Note de Lenaïg :

    Tu n'avais pas mis de titre, Mona. J'en ai avancé un, que tu pourras changer à ta guise, bien sûr.


     

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    Illustrations cueillies sur Google images : Harry Potter et Scooby Doo.

     

     

     


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    En ce doux soir de mars 1889, dans un petit village du département du Rhône, Grand-père, assis sur une chaise qu'il avait tirée sur le pas de sa porte, fumait pensivement sa pipe (car, en ce temps-là, on n'avait pas évalué la nocivité du tabac ; la pipe faisait partie du paysage et personne ne songeait à s'offusquer au point de trafiquer affiches et photos et de retirer la sienne à à Jacques Tati ; Lucky Luke n'était pas encore né mais, s'il avait vécu, on ne l'aurait pas vu machonner un brin d'herbe, ni un chewing-gum, d'ailleurs, qui aurait été tout à fait anachronique). Rassuré et attendri par la voix de son petit-fils Jean-Mimi, dont le murmure de la voix dans la grange lui parvenait, Grand-père respectait l'intimité de l'enfant et du lapin et ne serait pas allé les déranger ; Jean-Mimi était occupé à raconter ses secrets à son lapin favori.

     

    484721877.gif Grand-père se mit à se rappeler ses débuts difficiles d'enfant de la balle à Prague, où, malgré les incertitudes du lendemain et le ventre souvent creux, il avait connu une joyeuse bohème. Sur le vénérable Pont Charles, ses pîtreries amusaient les passants les soirs comme celui-ci. Quand la recette dépassait leurs espérances, avec ses compagnons jongleurs et autres Polichinelle, Arlequin et Colombine, il se payait un bon repas au restaurant et c'était la fête jusque tard dans la nuit.

     

    Le montreur d'ours les rejoignait lorsque les autres clients étaient partis car ceux-ci n'auraient pas apprécié de voir la brave bête entrer aussi ! C'était pourtant ce qui se passait : l'ourse débonnaire, et pourtant en représentation très impressionnante comédienne, s'asseyait à table comme tout un chacun. Il fallait l'avouer, c'était elle qui se tenait le mieux : pas de hurlements de rire ni de tapes sur les cuisses, ni de chansons paillardes ; non ! juste quelques grognements discrets de satisfaction en dégustant les gamelles qu'on lui apportait ...Mais personne ne mangeait à sa faim tous les jours.

     

    9293115-le-pont-charles--prague-durant-le-lever-du-soleil-l.jpg Plus tard, Grand-père clown eut son heure de gloire, engagé dans des tournées mondiales de cirques de grande réputation. Retraité maintenant, et sédentaire, il avait actuellement la garde de Jean-Mimi, qui portait toujours son pendentif au cou, cachant sous ses habits un médaillon boîtier contenant un daguerréotype de son papa et de sa maman, un duo de trapézistes qui ne se posaient que rarement. Il aurait voulu que sa fille, la mère de l'enfant, eût un métier sérieux et sans danger et elle avait d'ailleurs poursuivi des études. Il ne l'avait pas écoutée, sa fille, quand elle déclarait ne vouloir vivre que pour le cirque, déjà gamine.

     

    Quand elle avait épousé Zef, trapéziste en troupe, elle exerçait un métier de secrétaire. Mais, quatre ans après la naissance de Jean-Mimi, Zita, qui n'avait cessé de s'exercer pendant ses loisirs, lui déclara : "Terminé le secrétariat, Papa, je ne m'y épanouis pas. Notre numéro à deux est prêt, à Zef et moi, et nous allons partir en tournée". Il avait piqué une colère monstre. "Mais je t'avais prévenu, Papa !" avait-elle répliqué et il avait fini par se calmer. Cet été, Jean-Mimi les rejoindrait pour toutes les grandes vacances. A cette perspective, l'enfant avait plein d'étoiles dans les yeux. Quand il serait grand, Jean-Mimi, quant à lui, serait vétérinaire ... de cirque !

     

    Grand-père se leva et rentra pour allumer la lampe à pétrole, puis se pencha par la fenêtre pour héler l'enfant :

    "Jean-Mimi, dis bonsoir à ton lapin et viens ! Il y a école demain !"

     

     

    Lenaïg

     

     

    prague_4.jpg

     

     

    Illustrations glanées sur Google images :

    • Jacques Tati et sa pipe censurée,
    • Lucky Luke et son brin d'herbe,
    • Sur le Pont Charles à Prague
    • Vue du Pont Charles la nuit. 

     


     

    Ci-dessous, l'énoncé du défi de Lilou-Fredotte,

    qui a réalisé une très jolie photo-montage,

    à voir chez elle !

     

     

     



     

    Défi   69       « Les huit éléments » 

    Pour ce défi,

    je vous propose d’écrire une histoire

    vers ou prose

    en utilisant les éléments suivants.

    Peut importe l’ordre.

     

    des personnages : un grand-père et un enfant,  Jean-Mimi

    une profession :   clown

    une période :       mars 1889

    des lieux :            Le pont Charles à Prague

                                 et le département du  Rhône  

    un objet :             un pendentif

    un animal :          un  lapin

     

    Mais ce n’est pas tout vous devrez aussi placer la phrase  

    «  et pourtant, je t’avais prévenu(e) »

     


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  • 41-Chorten-et-face-Nord-.jpg

     

     

     

    Au Café philo d'Ivry sur Seine, vendredi soir, on a débattu du hasard. Mais je n'ai pas été en mesure de m'y rendre, cette fois, donc je ne connais pas la teneur du débat, pour le moment.

     

    Le hasard existe-t-il ? Telle est la question proposée qui, lors du dernier Café a été élue par vote à main levée à la fin de la séance. J'aime la question, ce n'est pas moi qui l'ai avancée mais j'ai levé la main aussi.

    Mon essai de réponse sera indécrottablement fantaisiste ! Pour moi, le hasard n'existe pas et je m'en vais vous le prouver ! Mes éventuels lecteurs me croient ? Ils ont tort, alors, car je ne fais que plaisanter ! 

    Il va falloir que je m'explique, ce qui reviendra probablement à montrer à la fois sa non existence et son existence car, si le hasard n'existait pas, il faudrait l'inventer (trop tard, c'est fait !).

     

    Le hasard fait bien les choses, entend-t-on souvent. Ou encore on appelle le hasard : la Providence, sans trop penser à l'entité qui est représentée derrière ce nom, ou parce qu'on sait que cette appellation désigne Dieu, mais qu'on ne veut pas s'avouer ouvertement croyant ! Dieu et moi, nous avons depuis longtemps de longs débats secrets et j'avoue que ses discours à lui me restent énigmatiques. Un ami écrivain, qu'on peut lire sur ce blog, Dominique B (cliquer sur son nom), profondément croyant, me dirait, à ce stade de mon billet, qu'une telle conversation (ou recherche) ne peut aboutir qu'avec le coeur, pas l'intellect. Et, d'ailleurs, Antoine de St Ex fait dire à son renard des sables s'adressant au Petit Prince : On ne voit bien qu'avec le coeur. Soit ! Mais moi, j'ai pris depuis longtemps l'habitude de raisonner, ce qui n'empêche pas la présence des sentiments, mais non !

     

    Chorten-Tintin-au-Tibet.jpg Quand le hasard ne nous est pas favorable, nous le nommons : fatalité ! Ce hasard n'en ferait-il qu'à son gré ? Le hasard est un ... ingrédient de la théorie du chaos, d'ailleurs. Tout comme deux gouttes d'eau versées au même endroit à un certain temps d'intervalle, sur une main par exemple, ou sur un sol en pente, ne glisseront jamais sur le même chemin et n'iront pas s'échouer au même endroit, soit parce que la main a légèrement bougé entre temps et que la position n'est plus la même, soit parce que le vent a déplacé un petit caillou sur le sol, on ne retrouve pas la même configuration et on n'obtient pas le même résultat. Quand mon grand-père, estafette dans l'enfer de Verdun, courait entre les tranchées et l'Etat-major, avait-il pris pour complice le hasard, ayant constaté que les obus ne tombaient jamais au même endroit, avançant par bonds, de trou d'obus en trou d'obus ? Ce souvenir m'a décidément marqué, même si ce n'est pas mon grand-père qui me l'a directement raconté ... Le hasard fit bien les choses pour lui.

     

    Prendre en compte le hasard implique que nos destinées ne sont pas toutes tracées. Je ne le crois pas, en effet, comme je ne crois pas non plus aux horoscopes des journaux et des magazines. L'astrologie, je ne la repousse pas non plus, sans m'être vraiment penchée dessus ! Après tout, Ptolémée pensait tantôt en astronome, tantôt en astrologue, en distinguant bien les deux, Galilée ... pareil ! Mais il n'insistait pas trop sur l'astrologie, ne voulant pas voir fondre sur lui les foudres ecclésiastiques et Dieu sait si l'Eglise de l'époque l'avait à l'oeil (les évêques et cardinaux, surtout, car le Pape était son copain et mit tout en oeuvre pour le protéger) ... De grandes lignes, de grands mouvements sidéraux influent-ils sur nos vies ? Fort possible, mais j'ai envie de conclure que si nous sommes quelque peu des marionnettes et qu'un "on" nous tire les ficelles (chaque éventuel lecteur le définira à sa façon), l'air du temps est à la liberté individuelle (à nous de construire nos propres vies et de construire nos avenirs et notre futur commun) et, ficelles ou pas, il nous est laissé un grand nombre de choix. On peut se fier au hasard, des chemins, des rencontres, on peut trier ses "hasards". Et je pense à mes actes manqués, convaincue maintenant qu'ils n'en étaient pas !

     

    Quand même, avant de terminer, il me faut expliquer pourquoi en tête de cette page trône un chorten, tibétain. Je trouve que c'est une superbe illustration du hasard, ou pas et je vais laisser mon toujours éventuel lecteur se renseigner tout seul sur la signification des chorten, encore appelés stupa (cela vaut le détour) ! Pourquoi ce choix de photo ? Parce que la première fois que j'en ai vu un, ce n'était pas au Tibet, où je ne suis jamais allée, mais dans Tintin ! Le mythique album Tintin au Tibet, où arrivé devant un chorten, un des sherpa crie au Capitaine Haddock : "Ne passez pas à droite du chorten, Capitaine, c'est la mauvaise voie ! Passez à gauche !" Le Capitaine, respectueux de la croyance des sherpa, s'exécute, mais une pierre le fait trébucher et il dévale la pente pour aller se cogner le nez en plein dans un autre chorten, dont le sommet se détache et tombe sur son sac à dos, fracassant sa bouteille de whisky secrètement emportée ... Se rend-t-on compte de toute la richesse de cette scène, sous l'humour farceur ? Le Capitaine en courant malgré lui ne pense qu'à sauver sa bouteille de whisky, il croit y être parvenu (donc qu'il a de la chance), il maudit un peu les sherpa et, pof ! c'est un nouveau chorten qui se précipite vers lui comme un platane sur la route d'un chauffard et ... le prive (momentanément) de son vice, sa dépendance à l'alcool ... Etonnant, non ? Comme aurait dit Pierre Desproges. 

     

    Lenaïg

     

     

    Chorten et Capitaine Haddock

     

    Illustrations :

    Cueillies sur Google images.

     

     

     


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  • louison-cresson-tome-1-la

     

     

     

    Fantôme gentil - CasperAlastair ! Hurla la dame blanche ! Tu as encore laissé trainer des morceaux d'ectoplasme partout sur les remparts depuis que tu t'es offert une séance de bronzette près du loch ! Tu pèles ! Depuis CINQ  siècles que tu es rené, tu n'as pas encore compris que le soleil nous fait fondre ! Tu as l'air d'un gruyère blanchi à présent ! Tu ne volètes plus, tu te traines comme une serpillère ! Et ces beaux muscles ectoplasmiques qui te donnaient de la consistance ont l'air de beurre ramolli ! Tu vas faire rire les dealers qu'on est sensé faire partir en courant de la crypte où Lord Angus Mac pherson faisait du bon whisky de contrebande et où ils se sont fait installer un labo d' « est-ce Tasie », un truc qui rend fou les lads et lassies du coin! Tu te rappelles au moins ! Och ! NON, NON ! même son intelligence s'est échappée par les trous ! Que faire ! Ochon, quel malheur !

    La dame blanche pâlissait à vue d'oeil. Vous vous demanderez : « Comment pâlir encore quand on est déjà d'un blanc neigeux ? Eh bien elle devenait transparente ! Donald Mac Donald qui était allé réveiller Walt Disney toute les nuits pour se venger d'avoir ridiculisé son nom de brave devant le monde entier, Donald donc était en proie à la panique. Lui seul, grâce à sa tête coupée qu'il portait sous le bras, ferait encore son petit effet lorsqu'il apparaitrait aux hommes, mais il lui fallait aider Alastair, et le recoudre si possible. Qui pourrait l'aider ? Pas son clan errant du côté de Glen Coe depuis cet horrible massacre  du 13 février 1692. Il s'en était éloigné par amour pour la dame bl... transparente et par amitié pour Alastair, et ils étaient rancuniers, très rancuniers. Bof soupira Donald, ils avaient des dons de guerriers mais ne s'y connaissaient pas en soins. Qui pourra m'aider ? Qui ! Il hurla dans la nuit, désespéré.

     

    Alastair se demandait bien pourquoi la dame blanche faisait tant d'histoires parce qu'il se desquamait . Du temps de sa vie, bien plus dure qu'à présent, il était déjà rouquin et pour peu qu'un rayon de soleil perce le ciel nuageux des Highlands, sa peau laiteuse et parsemée de taches de rousseur virait à l'écarlate. Pourtant il l'aimait cet astre radieux. Pourquoi, une fois mort aurait-il cessé de l'aduler ? Il n'était pas vampire, et ne se transformait pas subitement en tas de cendre sous sa caresse. D'accord il pelait. Comme avant ! Un peu plus c'est tout ! Il perdait des morceaux de linceul ici et là mais il savait le reconstituer. Il ne servait à rien de répondre à la dame blanche maniaque de la propreté, qui avait TOUJOURS raison et passait son temps à le houspiller sans raison. Elle le croyait devenu crétin ? Tant mieux ! La contrariété avait cet effet fabuleux sur elle : ses piaillements de mégère se transformaient en faibles couinements et elle disparaissait ! Si Donald n'en était pas tombé amoureux il se serait moqué d'elle au point de la faire fuir, car elle détestait la bonne humeur par dessus tout. Et voilà que le brave Donald se mettait à hurler de désespoir maintenant !
    Non loin de là dans un lit douillet où elle s'était assoupie après une journée active passée à visiter la région avec son énergique maman,  Lena ouvrit un œil...

     

    Mona

     

    ***

     

    Fantôme gentil - arthur-le-fantome-bd-volume-1-simple-21246Alastair, à nouveau livré à lui-même, se risqua de nouveau sur les remparts du château, maintenant que la Dame blanche s'était complètement évaporée. Il avait besoin de prendre le frais, de se refaire une santé sous le croissant de lune. Il fallait qu'il soit discret, ne pas se faire pincer par le Chevalier du guet -enfin, son équivalent écossais-, celui du château qui tournait sans fin la nuit sur le chemin de ronde, un autre fantôme qui continuait à prendre son rôle très au sérieux, sans état d'âme et comme figé dans son personnage depuis que des brigands l'avaient poignardé.

     

    Il avait rassuré son ami Donald qui, en face à face avec lui, remettait sa tête ectoplasmique sur ses épaules. Alastair avait assez de volonté pour reconstituer son tissu ectoplasmique tout seul et il était en train d'y oeuvrer à la faveur de la nuit. La Dame blanche, Alastair ne l'appréciait pas ! le moins qu'on pût dire, c'était qu'elle n'était pas nette, ni dans ses actes ni dans ses intentions. Toujours à morigéner, très austère, rien à ... voir (!) avec son propre tempérament. Quel message voulait-elle faire passer, en s'installant inopinément comme passagère d'autos sur les routes nocturnes, au risque de provoquer de mortels accidents, puis en disparaissant aussi brusquement ? Il y avait trop d'ombres autour d'elle, il ne s'était jamais aventuré à lui poser la moindre question, à peu près sûr qu'elle se serait dérobée ou l'aurait envoyer vertement promener ...

     

    Avec Donald, son complice de la conjuration pour libérer la jeune Marie Stuart, il n'était pas toujours d'accord non plus. Il respectait l'amour que celui-ci portait à la mystérieuse Dame blanche mais ce n'était pas l'envie qui lui manquait de lui dire de se méfier. Donald prenait son rôle d'horrible épouvantail très au sérieux, il était d'ailleurs reparti en mission : dans un autre château avait lieu une animation nocturne pour les touristes friands de sueurs froides et il devait les glacer d'effroi en apparaissant au détour sombre d'un corridor, sa tête tranchée sous le bras ! Il y parvenait en général très bien, mis à part quelques plaisantins qui s'esclaffaient, ce qui le vexait ...

     

    Alastair gardait pour lui ses sourires lorsque Donald lui narrait certaines déconvenues, car, lui, avait choisi le parti de l'humour et cherchait encore un propriétaire de château écossais qui accepterait de voir les choses sous cet

    angle !

    Il ne tenait pas du tout à faire peur, bien au contraire. Il était en train d'étudier un certain nombre de facéties et se demandait sur qui il allait les tester : Mona, ou Lena, ou les deux ? Si les effets étaient réussis, si le fou rire était au rendez-vous, il les proposerait lors de sa quête de manoirs et châteaux touristiques à hanter ...

     

     

    Leng

     

     

    ***

    A suivre, ou pas ... ? 

     

    Alastair  

     

     

     

    Illustrations

    Louison Cresson Tome 1 - La Nuit Des Fantômes - Rock And Roll à Pied-L'abbé

    webmarchand.ch

    puis Casper et Arthur (images du net aussi)

    et l'unique représentation d'Alastair (par Lenaïg) ... unique, jusqu'à présent !

     

     

     


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