• b20060116 portable a table max

     

     

     

    En nous hâtant chez Mère-grand Eglantine-Lilas, qui nous avait conviés à un grand dîner, nous apporterions des artichauts et des tomates coeur de pigeon et coeur de boeuf, des fraises, du far et des galettes, que m'aiderait à porter ma fée Dodue. Je serais accompagnée aussi de Marie-Louve et de Di, qui proposeraient du sirop d'érable pour les crêpes d'Amtealty.

    Nous allions être poussés par une Libre nécessité.

    Madame la Baronne Jill Bill de la Comète du plat pays qui est le sien nous ouvrirait les portes de son château. Etant donné le nombre de participants attendu, les fenêtres et porte-fenêtres resteraient largement ouvertes sur le parc.

    Pour ménager et compléter les tables et les chaises d'époque, nous aurions à notre disposition les chaises de Nina, ainsi que celles de Roger et du mobilier haïku, celui approprié pour la circonstance, de Mamylilou.

    Nous allions déguster du gibier fraîchement chassé, de la cuisine moyennâgeuse savoureuse car Rouergat aurait débauché les cuisiniers du seigneur de Trescolar, pour nous régaler et des spécialités lyonnaises comme dans les petits bouchons de Lyon, par les soins de Monelle.

    Eh non, pas de grands absents, tout le monde serait là : Olivier de Vaux, Rouergat et l'amiral Brunô !

    Le vieux coffre de Hauteclaire aurait quitté son grenier pour l'occasion ; s'en échapperaient moult épices exotiques, de la Caraïbe, de la Route des Indes, ou d'ailleurs.

    Le four à pain de Dan irait bon train et Anne Parisianne en compléterait la production par de grosses tranches de pain Poilâne (publicité gratuite), sur lesquelles se disposeraient plus tard les fromages corses de Fanfan, que sa belle-mère aurait tenu à rapporter dans sa valise, attendant sagement sur des lits de fougères cueillies dans les contes de Mireille et ceux d'Anne le Sonneur, tandis que m'annette aurait dessiné d'adorables cartons de table que chacun emporterait.

    On dégusterait du champagne de Reims ou du vin de Monsieur Tricôtin et même un petit vin italien, déniché à Bolzano par Denis Costa et on s'enivrerait sans modération, par-delà les fumets des mets, de la contemplation des nuages qui passent, des chants affairés des oiseaux migrateurs sur le départ grâce à Nounedeb, des parfums de foin et d'air marin sur lesquels Catheau nous ouvrirait les narines.

    Les oiseaux de l'arbre de flipperine voudraient bien partager leurs cerises avec nous et les branches de cet arbre nous imprègneraient de discrète sagesse et de sérénité.

    Tricôtine en convalescence, serait au repos, installée dans sa chaise longue, car Néon aurait promis de se plier en quatre pour elle mais elle n'aurait pas chômé avant : pour chacun, des myriades (presque) de jolis pochons de tissu et de crochet où seraient glissés des macarons, des jeux de mots de Jean-Pierre, des clins d'oeil d'Olivier et des joyeux drilles de la communauté (Ountès Passat, Juntos, le Dix-vins blog, j'en passe et des meilleurs), les lettres facétieuses des disparitions chez Jeanne Fa do si, les gâteaux orientaux de Malika, des chocolats belges et suisses et des caramels au beurre salé.

    Des bouquets de fleurs magnifiques, mélanges de lys et de bleuets, de liserons et d'orchidées, de roses joufflues aux senteurs euphorisantes donneraient à la fête un éclat sans pareil, par les claviers magiques de Fransua, Alice et Mamylilou, Tricôtine et Monelle.

    Soakette la sardine et ff (sont-elles chez les Croqueurs ? Je ne sais plus, mais elles sont venues en voisines) nous auraient dessiné pour l'occasion des robes de princesse ou de malicieux costumes de pingouins, aidées en cela par Pierre et Robin.

    Mais quoi ? Tout cela au conditionnel ? Et si rien ne se passait ? Mais si, et lorsque j'y serai, je promets de citer ici les noms de ceux et celles que je croiserai aussi, comme Dominique et ses Antidotes, Annick, Christelle, Qu'importe et ceux et celles dont je ferai la connaissance. Peut-être pas tous car nous sommes 440, mais je ferai ce que je pourrai !

    Je vais poster mon petit texte, car il se fait tard dans la journée. Grâce aux explications de Mère-grand, j'ai eu la joie d'apprendre comment placer les liens derrière les noms. Hélas, cela a bien fonctionné un temps (hier soir), mais aujourd'hui que je reprends le texte, le système ne veut plus rien entendre et me laisse en attente indéfiniment ; je ne peux rajouter gracieusement les liens que je n'avais pas fini d'indiquer (il faut dire que j'en ai même perdu au cours de mes allées et venues). Je retenterai de placer ces fameux liens ultérieurement. En attendant, nous inviterons bien également Rahar et ses "boeuchons" exquis rapportés d'une lointaine galaxie ...

    Donc, j'arrive, bon gré mal gré, en espérant qu'on ne m'en voudra pas pour les liens qui manquent (provisoirement) ni pour les noms qui ne seraient pas (encore) indiqués.

       
     

    Lenaïg

     

    diner-afrique-copie-1.jpg 

     

     

    Photos du net.

     

     

     


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  • Pour page Nadine, fin, chez Lenaïg - photo du net : cilaos-village2

     

     

     

    Quand elle fut mise au courant de toute la vérité sur leur naissance, la sienne et celle de son frère jumeau, Nadine tempêta, s'énerva contre tout le monde : leur mère, qui s'était laissée faire, la famille bourgeoise de leur mère, qui avait refusé que la tendre relation entre la très jeune femme et son camarade réunionnais des Beaux-Arts s'éternise, faisant accoucher la jeune femme dans la clandestinité puis abandonner immédiatement ses bébés ... auxquels elle avait malgré tout tenu à donner des prénoms, seul lien, seul héritage ... Puis elle pleura de rage en ressentant le poids de la détresse de leur mère : bien vite mariée à un jeune homme d'une autre famille bourgeoise de la région, faisant bonne figure au début mais plongeant inexorablement dans la dépression, pour se jeter quelques années plus tard du haut du deuxième étage de leur propriété, sans avoir apporté de progéniture à sa nouvelle famille. "Quel épouvantable mélo, que c'est écoeurant, un vrai roman de gare !" avait-elle conclu, amère et révoltée.

     

    "Et notre père ?" avait-t-elle demandé à Thomas, une fois calmée. "Juste après la rupture avec notre mère, il a quitté Paris pour Amsterdam, puis New York, entre autres et il a fini par retourner se poser dans son île natale, où il a fondé une famille nombreuse ! Son propre père était d'origine européenne, un "zoreil" et sa mère réunionnaise de souche, ce qui explique que ce n'est pas évident à nous voir, toi et moi, que nous avons des ascendances asiatiques et africaines ; nous sommes des chabins, comme diraient les Antillais. A mon avis, il n'a jamais su que notre mère était enceinte de lui ... Il a 70 ans, c'est un artiste confirmé, sculpteur et peintre, qui bénéficie d'un certain renom chez les connaisseurs internationaux, on lui passe encore commande, il est veuf et sa nombreuse progéniture se promène dans le monde entier !" Nadine avait alors été prise d'un fou rire, trop de coups sur la tête, trop de tension nerveuse ; elle avait jeté cyniquement : "Eh bien, au moins tout n'est pas négatif, nous avons un père artiste !" Plus doucement, et comme fière et malicieuse à la fois, elle rajouta :"maintenant je comprends pourquoi nous sommes ... d'une beauté physique irrésistible, toi et moi !"

     

    ***

     

     

    Avant de s'envoler pour la longue traversée jusqu'à l'île de La Réunion, Nadine et Thomas étaient allés se recueillir devant le caveau d'une famille à laquelle ils étaient totalement étrangers et devant le nom de leur mère. Nadine n'avait pas voulu en apprendre plus sur le mari de leur mère ; elle était consciente que Thomas avait porté ses recherches de ce côté-là aussi mais elle n'en pouvait supporter plus, pour le moment. Plus tard, peut-être elle l'interrogerait aussi sur ce qu'il savait. Tous les deux étaient restés dignes, pour ne pas dire froids, lors de leur visite au cimetière, mais, une fois rentrés, chez Thomas, Nadine s'était effondrée et avait pleuré, beaucoup, sans pouvoir se contenir. Thomas, ému aussi, lui avait offert sa chambre pour la nuit. Nadine avait protesté, pour la forme, le voyant sortir un sac de couchage et l'installer sur le tapis du salon. "Ne t'inquiète pas, Nadine, j'ai l'habitude et je dors n'importe où !" "Bon, je te remercie, c'est vrai que j'ai pris de sacrées habitudes de confort et de luxe !" Le lendemain, pour la première fois de toute sa carrière, Nadine ne s'était pas rendue à son bureau. L'odeur du café l'avait réveillée le matin et elle s'était présentée à Thomas sans apprêt, sans maquillage, sans jouer un rôle pour la première fois depuis bien longtemps, avec un puissant sentiment de liberté et de soulagement ; Thomas l'avait d'ailleurs eu la veille devant lui le visage bouffi par les larmes.

     

    ***

     

    Ils venaient de se faire déposer en autocar avant le bourg de Cilaos pour finir le trajet à pied. Nadine avait énergiquement déconseillé à son frère de louer une moto, soudainement consciente du danger sur des routes de montagne qu'ils ne connaissaient ni l'un ni l'autre, une prudence qui faisait voler en éclat la carapace d'indifférence et de cynisme qu'elle s'était jusque-là imposée, aussi bien pour elle-même que vis à vis des autres. Thomas, attendri, l'avait écouté.

     

    Ils avaient rendez-vous en cette fin d'après-midi avec l'artiste, à son atelier, en tant qu'amateurs de son art et potentiels clients. La rencontre avait été fixée de métropole par téléphone. Ils espéraient qu'ils n'arrivaient pas trop tôt et que la sieste du sculpteur serait terminée. Ils sonnèrent à la petite grille, apercevant déjà de magnifiques sculptures dans la cour et même sous le hangar, plus loin. Nadine avait bûché son affaire et n'ignorait rien des débuts, des influences ni de la biographie de leur créateur ... "Voilà, voilà !" Une jeune fille tout sourire vint leur ouvrir et ils surent plus tard qu'elle était l'une des petites filles de l'artiste. Sur le pas de la porte, l'artiste, l'air avenant, canne en main mais très droit apparut. Il souleva poliment son chapeau de paille et se le rabattit sur le front, masquant ainsi sans le vouloir en partie son visage, mais Nadine comme Thomas, intimidés, ne cherchèrent pas à le scruter !

     

    La visite fut passionnante, Nadine interrogeant leur hôte, ravi de l'intérêt qu'elle portait à ses oeuvres et des questions précises et quelquefois pointues qu'elle lui posait. L'humour était de mise et les rires ne tardèrent pas à fuser, tandis que Thomas prenait des photos et se contentait de les écouter, apportant son grain de sel selon la tournure de la conversation. La jeune fille leur servit un délicieux cocktail de jus de fruits. La nuit tomba sans qu'ils s'en aperçoivent, on approchait de 19 h 00 ... Une sorte de trouble s'installa, car ni Thomas ni Nadine n'osait exposer à leur hôte la raison principale de leur visite ... On venait de finaliser l'achat d'une statuette et Thomas se leva, Nadine l'imita. Thomas tendit la main vers le vieil homme en bredouillant des formules de politesse et en s'apprêtant à déclarer qu'avant leur départ, ils ne manqueraient pas de lui rendre une autre visite, mais ... l'artiste ne fit pas un mouvement pour saisir la main tendue ...

     

    Il n'avait plus son chapeau, une grande émotion transparaissait sur ses traits, il les fixait maintenant tous deux, bien que son regard ait étrangement l'air de les dépasser. Il prononça la phrase :

     

    "Vous lui ressemblez tellement ..."

     

    ***

     

    Epilogue :

    Nadine et Thomas ne repartirent pas ce soir-là, ils restèrent souper et dormir. "A qui ?" avait réussi à articuler Nadine, et le vieil homme avait commencé par leur demander de l'excuser, en s'expliquant brièvement. Thomas avait alors pris la parole, Nadine muette d'émotion. Les souvenirs de leur père étaient intacts : une querelle d'amoureux avait mis fin à la relation et la vie en commun pendant deux années de leurs futurs parents. Leur mère avait supplié en vain son compagnon de l'emmener loin de chez ses parents, qui l'étouffaient, qui faisaient pression pour qu'ils ne se voient plus. Elle voulait un enfant ! Le jeune artiste lui avait répondu d'être patiente, qu'il ne gagnait pas encore assez bien sa vie et qu'elle ne ferait que se mordre les doigts de quitter le confort et l'aisance auxquels elle était habituée. La jeune femme furieuse s'était enfuie et ils ne s'étaient jamais plus revus. Comme il ne pouvait la chasser de ses pensées, il était allé sonner plusieurs fois par la suite au domicile de la famille pour se faire entendre dire tour à tour que "mademoiselle était sortie" ou "mademoiselle ne désirait pas le voir".

     

     

    FIN

     

    Leng

     

     

     

     

    Cilaos, photo du net.


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  • Denis Costa - Photo 25

     

     

     

    - Alors Matteo, t'en es bien sûr, faire l'amour ne vous a pas ouvert l'appétit?
    Le suspect écarquilla les yeux, déconcerté, se demandant sans doute où voulait en venir le commissaire. Il répondit à nouveau par un non machinal.
    - Quand le commissaire te pose des questions, s'agaça le sergent Kallmünz, il souhaiterait des réponses plus circonstanciées, on t'a pas appris à faire des phrases au lycée? Ton non, vois-tu, ne ne nous suffit pas! Qu'as-tu fait après l'amour? T'as partagé un petit encas avec ta copine? Ça creuse le sexe, non? pas chez toi, walsche Weiberer alla Vèschpa, bellâtre italien à la Vespa? comme il s'était autorisé à interpeler le jeune homme dans son dialecte germanique. C'est quand même pas l'hostie du matin qui a comblé ta fringale de midi...

    Kallmünz enchaîna les questions triviales et irrévérencieuses dans un rythme débridé, afin de provoquer une réaction chez Matteo qui, depuis le début de l'interrogatoire, montrait une grande passivité. Les directives de Rizzoli étaient claires: il fallait faire craquer le gamin et lui faire avouer la vérité, avant le rendez-vous du lundi matin où il serait présenté au juge. Le sergent s'y employa sans forcer son talent. Il ne s'embarrassa pas de formules à l'emporte-pièce, et vociféra aux oreilles du jeune homme dans un jargon local aux intonations gutturales, qui eut pour effet de le désorienter. Schwellia Weiberer! Réveil le bellâtre!  Zwås, wie, woffra? Pourquoi, comment, lequel?

     

    La cuirasse que le jeune homme avait endossé commença à se lézarder. Rizzoli soutint le regard perdu du gamin, et il se rappela l'histoire de l'armure du roi, ce conte fantastique qu'il lisait à ses enfants, le soir avant qu'ils ne s'endorment. Mon armure m'a trahi, se plaignit le roi, sérieusement blessé et défait par le tyran des Terres Obscures. La cuirasse est seulement une illusion, lui répliqua sa bien-aimée, la vraie force qui te rend invincible, n'est pas ce morceau de métal, mais ta volonté et la certitude de combattre pour la vérité. La carapace de Matteo, blessé et à l'agonie, allait se briser en mille pièces. Il n'a pas d'autre choix désormais que de rendre les armes et de dire la vérité, se convint Rizzoli.

    Le jeune homme bientôt, consentit à s'expliquer autrement que par des paroles laconiques, mais il resta sobre dans ses réponses.
    - Nous enregistrons tes propos, Matteo: tu n'as rien mangé et tu n'as rien bu, ni toi ni Lisa, avant et après avoir fait l'amour sous les pommiers, puis sur le chemin qui vous a mené au bord de l'Adige, et ensuite, sur le rivage, peu avant que tu ne l'étrangles, c'est bien ça? Pas même un fruit, une orange ou une pomme?

    Matteo ne perçut pas le piège que lui tendaient les deux policiers. Il confirma ce que Kallmünz était en train de consigner dans le procès-verbal, et il précisa même innocemment, qu'il n'avait pas l'habitude de consommer des oranges, sinon sous forme de soda.
    Rizzoli soupira profondément. Il ne sut dire si c'était un soupir d'impatience, de soulagement ou de victoire, sans doute était-ce la combinaison des trois. Il se surprit simplement à apostropher le garçon sur un ton familier.
    - Et pourtant mon jeune ami, ta copine a bel et bien consommé une orange juste avant de mourir. On l'a retrouvée non digérée dans son estomac... J'en conclus donc que tu es un menteur et que tu ne pouvais en aucun cas être à ses côtés au moment du meurtre... Bref, tu te fais passer pour ce que tu n'es pas...

    Devant les protestations véhémentes de Matteo, Kallmünz quitta brusquement le clavier de son ordinateur pour s'approcher du jeune homme et le sermonner sèchement:
    - Nous dans la police, on n'aime pas les menteurs, ils nous font perdre du temps, Kàtzo! … Tu nous mènes en bateau depuis le début de l'enquête, comme si tu voulais jouer au chat et à la souris, mais nous, comprends-tu, on refuse de jouer avec toi! Y'en a marre...Tu te rends compte walsche Weiberer, que je serais bien mieux le dimanche, chez moi, dans mes pantoufles avec ma femme et mes enfants, au lieu de t'écouter nous raconter des Bàlle! … sans compter que les faux témoignages sont passibles de poursuites judiciaires, tu le sais ça?... Tu le devines ton avenir derrière les barreaux?
    Le jeune homme, déstabilisé par ces assauts verbaux, baissa les yeux et garda le silence.
    - Regarde-moi dans les yeux quand je te parle, walsche Weiberer! hurla le sergent.

    Dans le bureau du commissaire, la tension avait atteint son paroxysme, une tension lourde, dérangeante, mais nécessaire. Il fallut bien en passer par là pour que le chemin, sur le versant opposé, soit plus prometteur, et débouche enfin sur la vérité, expliqua le commissaire, le lendemain, au vice-questeur, surpris  par le revirement du jeune homme.                 
    - Je remets les compteurs à zéro, Matteo, enchaîna Rizzoli d'une voix onctueuse. Nous savons désormais que tu n'aimes pas les oranges, mais nous voudrions connaître avec détails, ce qu'il s'est réellement passé après ta dispute avec Lisa, non loin de la chapelle Santa Agatha...

    Matteo sembla complètement décomposé. Il n'était plus l'adolescent râblé aux épaules larges, dont le sourire fier et lumineux avait séduit bien des femmes. Assis sur une simple chaise à roulettes, il n'avait plus le cœur à exhiber ses biceps saillants, savamment entretenus par de longues séances dans les salles de sport. Il s'exprimait désormais d'une voix fluette, entrecoupée de sanglots à peine contenus. Lorsque l'émotion était trop forte, son visage disparaissait dans ses bras croisés, qu'il appuyait lourdement sur la table de conférence. Matteo se confessa et Rizzoli hochait régulièrement la tête, en gardant le silence, afin de l'encourager à poursuivre. Le sergent Kallmünz, de nouveau penché sur son clavier, se contenta de tapoter les déclarations du jeune homme de façon mécanique. Il intervint peu dans la discussion qui avait fini par s'engager avec le suspect, si ce n'est pour lui demander des éclaircissements, ou lui faire répéter ce qu'il estimait être un fait marquant ou un rebondissement. 

     

    De nombreuses minutes s'écoulèrent, et l'interrogatoire bientôt prit fin. Kallmünz éteignit son ordinateur et se retira discrètement du bureau. Rizzoli se tint debout un moment au dessus du garçon, et lui posa une main sur l'épaule. Le visage posé sur un bras, Matteo se cachait pour pleurer. Rizzoli détestait les sanglots, surtout ceux des enfants. Un enfant n'est pas fait pour pleurer, se disait-il alors, et lorsque le plaintif était l'un des jumeaux, il allait spontanément le consoler, sous le regard réprobateur de sa femme. Rizzoli eut la tentation de réconforter Matteo, mais sa main ne s'aventura pas dans la chevelure ébouriffée du jeune homme. Il le leva simplement de sa chaise, et le reconduisit dans sa cellule.
    Rizzoli partageait la souffrance ressentie par le jeune homme. Elle est douloureuse à confesser la vérité, brutale, rude, parfois, sans cœur souvent!


    ***


    Kàtzo!: le cazzo italien en dialecte sud-tyrolien (merde!)
    Bàlle: le balle italien en dialecte sud-tyrolien (bobards). 

     

    ***


     
    Denis Costa,

    Texte et photo



                                                                     


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  • Pour page Nadine, chez Lenaïg - Fournaise-mini1 - www.hommes-et-volcans.fr

     

     

    Début : Nez à nez avec son passé - Lenaïg

    Suite 1 : Que devient Nadine, chez Lenaïg ? Suite, pas encore fin !

     

      

    Trois mois s'étaient écoulés depuis l'enlèvement, consenti, de Nadine par Thomas, le motard alors inconnu. Ils montaient maintenant vers Cilaos, but de leur expédition. Ils ne se parlaient pas, chacun concentré sur la perspective de l'importante rencontre à venir. Depuis les révélations de Thomas, Nadine était passée sous une vague d'émotion intense, dont elle ne se croyait plus capable. Elle avait d'ailleurs laissé derrière elle, à son entreprise, une assistante à la fois perplexe et ravie, qui s'était bien rendu compte du bouleversement, sans en deviner la cause : plus de ton sec et cassant si les résultats demandés n'arrivaient pas assez vite, au contraire des encouragements et un humour apaisant ! Les autres cadres n'avaient pas encore pris la mesure de ce qui arrivait, Nadine n'ayant pas eu de changement d'attitude au cours des différentes réunions précédant son départ en vacances mais, dans les couloirs, les bavardages allaient bon train : Nadine avait-elle des velléités de se ranger ? Un mystérieux inconnu avait été aperçu, passant la prendre à son bureau tard le soir et disparaissant avec elle à moto ... Thomas, lui, réservé de nature, baignait pourtant dans une euphorie qu'il camouflait sous un flegme apparent, le métier aidant.

     

    ***

     

    Ce fameux soir, Nadine avait réussi à discerner Thomas sur les trois photos de classe et des souvenirs enfouis étaient revenus en surface. Elle avait revécu sa timidité d'alors et le fait que ce garçon turbulent, et sa bande de copains lui faisaient à l'époque un peu peur. Thomas était du genre à déclarer tout de go à un prof qu'il ne s'était pas donné la peine d'apprendre telle ou telle leçon parce que ça ne l'intéressait pas ! Et elle qui souffrait pour tout assimiler, même des cours ardus -pour elle-, quitte à les apprendre bêtement par coeur pour les ressortir habilement tout de même en ses termes à elle (mais pour tout oublier après) ... Thomas, donc souvent la bête noire des profs, qu'il déstabilisait certainement, mais qu'il remettait dans sa poche lorsqu'il consentait à prendre des exposés, qu'il préparait si brillamment, que ce soit de l'histoire ou de la géographie ou autre et qu'il présentait -déjà- comme des enquêtes policières, captivant son auditoire.

     

    - Vois-tu toujours ta famille ? avait demandé Thomas tout d'un coup.

     

    - Hmm, tu fais l'innocent ! Tu dois le savoir, tu sais tout sur moi !

     

    -  Oui, c'est vrai. Je sais que ton père est mort de maladie et que ta maman vit avec toi, mais que, malheureusement elle souffre de la maladie d'Alzheimer. Te reconnait-elle encore ?

     

    - Elle sait toujours que je suis sa fille, je ne sais pour combien de temps. Elle a ses appartements au manoir, bien au calme, et une dame de compagnie spécialisée que je rémunère. Je passe au moins une heure avec elle tous les jours et une journée entière ou des soirées quand je suis libre ; on rit, on joue, on papote, on sort quelquefois faire du lèche-vitrine bras dessus bras dessous, on prend la voiture et on va faire un tour en forêt ; elle me fait confiance, avec moi elle n'est pas effrayée et j'en suis très fière. Et toi ?

     

    - Moi j'ai la chance d'avoir mes deux parents, à peu près valides, et deux frères, un qui a fait pas mal de bêtises mais qui a l'air de reprendre du poil de la bête, un autre qui est un bon père de famille, mène une vie bien plan plan qui ne m'irait pas du tout mais qui m'a donné des petits neveux et nièces. J'aime aller les taquiner de temps en temps !

    Mais, Nadine, tu es une enfant adoptée, tu t'en caches ou tu n'en fais pas mystère ?

     

    - Ah, nous y voilà ! Je n'aime pas en parler, mes parents adoptifs sont mes vrais parents. Et il n'était pas question que je mette Maman en maison de retraite, sauf quand les soins seront trop importants et que je ne pourrai plus financièrement assurer.

     

    - Je te surprends si je te dis que moi aussi, j'ai été adopté ? Et que, comme toi, je suis né sous X, selon la détestable formule ?

     

    *** 

     

    Cela avait provoqué une éruption volcanique dans la tête de Nadine. Thomas, Thomas, toute petite elle avait entendu prononcer ce nom-là, par des adultes à voix basse, surprenant des conversations qui n'étaient pas pour elle mais qui semblaient la concerner.

    Elle s'était rappelé avec une surprenante netteté un malaise dans la maison, un jour : ses parents étaient penchés sur le journal ; il était question d'une femme qui s'était tuée ; Nadine, qui lisait dans son coin, avait tendu l'oreille aux chuchotements de ses parents et capté des bribes de phrases : "je crois bien que ..." ; "Nadine ..." ; elle, la mère des deux petits ..." Elle avait fini par s'approcher en demandant si on parlait d'elle dans le journal, inquiète, et sa mère l'avait rassurée : "Mais non, Nadine, on ne parle pas de toi, tu n'as rien fait de mal et tu es trop petite pour avoir accompli un exploit ! Qui sait, plus tard, tu seras peut-être célèbre ! Non, c'est une histoire triste qu'il y a dans le journal, une jeune dame de la région qui s'est tuée dans un accident". Ce ne fut que lorsque Nadine eut dix ans que ses parents lui apprirent le secret de son origine et à ce moment-là, Nadine n'avait plus en tête le fait divers du journal et ne risquait pas de faire la relation entre celui-ci et sa naissance.

     

    ***

     

    - Tu es mon frère ? s'était écrié Nadine, sans plus réfléchir.

    -  Ah ben, tu vas vite en besogne, pas besoin de circonlocutions avec toi ! Tu as deviné, aucun doute, j'ai cherché, trouvé, tout recoupé, tout vérifié !

     

    Nadine lui avait fait part de ses morceaux de souvenirs en s'interrogeant sur les propos tenus par ses parents adoptifs. Thomas avait expliqué que sûrement des indiscrétions avaient eu lieu, au sein de l'hôpital ou des organismes publics, peu nombreuses certainement mais suffisantes pour que ses parents en aient eu vent.

     

    - Et moi qui avait tiré un trait sur ce mystère et ne voulait plus en entendre parler ! Je voulais même le nier ! Bon, Thomas, crache le morceau, vite ! Comment t'y es-tu pris pour tout savoir, tu es flic ?

    - Pas vraiment, mais je ne suis pas non plus le gangster ou le ravisseur que tu as dû croire que j'étais ! Tu as du cran de m'avoir suivi ! Non, je suis enquêteur privé, j'ai une agence et un associé. Cela m'a pris un temps fou, en dehors de mes heures de travail, mais j'y suis arrivé.

     

    ***

     

    A suivre

     

    Leng

     

     

     

     

    Note : dès la parution de ma fin, je posterai un récapitulatif chez les Croqueurs, comportant les liens vers toutes les suites que vous avez bien voulu donner à ce Nez à nez avec son passé, Qu'importe, Dominique, Jill et Monelle, que vous ayez posté chez les Croqueurs ou dans ma nouvelle communauté à peine démarrée !

    Et cette suite 2 et sa fin seront alors reportées dans :

    Feuilletons, histoires à suivre, multiplume ou en solo.

    SI mes liens fonctionnent, car il semble que j'ai un problème actuellement ...

    Mais ce fut une belle aventure, un grand plaisir, merci, merci, amies de plume !

     

    Le bois

     

     

    Illustrations :

    En haut, le Piton de la Fournaise, à La Réunion, www.hommes-et-volcans.fr

    En bas, ma tapisserie des enfants qui rentrent du bois.


    7 commentaires
  • bleuet[1]

     

     

     

     

    Même mot breton

    pour désigner deux couleurs.

    L'une en est le vert.

     

    Et l'autre couleur,

    c'est la mer et c'est le ciel

    par jour de beau temps.

     

    Turquoise émeraude,

    la mer sait être changeante,

    parure moirée.

     

    Quelques moutons blancs,

    ciel superbement radieux,

    sans trace de gris.

     

     

    ***

     

    On le dit après,

    la peur a cette couleur

    quand on est sauvé !

     

    ***

     

    Tous un bonnet blanc

    sauf le rouge du grand Schtroumf

    Tous même couleur.

     

    ***

     

    Les tendres années,

    la fleur prend cette couleur,

    l'amour est en herbe.

     

    ***

     

    Horizon d'azur

    quand on voit la vie en rose,

    goût à toutes choses.

     

    ***

     

    Lenaïg

       

     

    Extrait du Wiktionnaire pour le mot breton glas :

     

    glas /ˈɡlɑːs/

    1. Bleu, de couleur bleue.
    2. Vert, de couleur verte naturelle (la végétation).
    3. Cru (légume, fruit).
    4. Blême, blafard, livide.
    5. (parfois) Gris.

     

    Coïncidence ... providentielle ? Six heures ce matin, fenêtre ouverte, de l'autre côté de ma rue, un homme en forme sifflait cette chanson, et fort bien ! C'était juste ce qu'il fallait ... J'aime beaucoup cette chanson et l'interprétation de Dalida. Comment un son, une chanson peuvent vous faire voyager !

     

     

     


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