• chaudron

     

     

    Le sorcier broucougne,

    Tout en chantonnant,

    Il n'est pas en rogne,

    Il a tout son temps.

     

    Son chaudron bouillonne,

    Que c'est effrayant !

    Son commis soupçonne

    Un filtre méchant !

     

    Qu'est-ce que broucougner ?

    Oh, plus d'une chose,

    Il faut expliquer,

    Il n'y a rien de rose !

     

    Broucou, c'est beaucoup,

    En mauvais langage.

    Le sorcier veut tout,

    Avide engrenage ...

     

    Broucougner chez lui,

    Est incantatoire,

    Quand la lune luit,

    Chanson de grimoire.

     

    Son commis est là,

    Apprenti lucide,

    Il n'aime pas ça,

    Il devient livide.

     

    Il faut prévenir

    La douce baronne,

    Qui pourrait périr

    De boisson félone ...

     

    petit-dessin-de-sorciere-1Le sorcier la veut,

    Est fou de la dame,

    Broucougne des voeux,

    Ce sera le drame.

     

    Petit apprenti

    A minuit prend fuite,

    Dame il avertit,

    L'affaire est sans suite.

     

    Le mauvais sorcier,

    Tout à sa colère,

    Reste à trépigner, 

    Jetant sa cuillère !

     

    Lenaïg,

    pour le mot de la semaine de l'Arbre à mots de ff link  

    Mot "broucougner" proposé par m'annette Annette  link

     

    Lenaïg précise que le jeune commis a réussi à se faire ouvrir les portes du château, même à minuit, qu'il est maintenant sous la protection de la baronne qui est en fait une bonne fée mais tient à ce que cela reste secret.

     

    Et un clin d'oeil au brave druide Panoramix, qui ne fait pas le même usage de son chaudron ...

     

    Panoramix

     

     


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  •  

    Hauteclaire  link  met le cap sur les légendes :

    "Alors dites-moi : quelle est la vôtre ?

    Je suis sûre qu'il y en a une que vous avez vécue.

    Vous en savez tous les coins d'ombre, quelle en est la vérité.

    Pour nous, et seulement pour nous, à bord de la coquille, racontez-nous !

     

    La construction des pyramides, celle de Stonehenge,

    le triangle des Bermudes, L'Atlantide,

    la Marie-Céleste et les prophéties de 2012 ,

    ou encore les dinosaures,

    levez un coin du voile ..

     

    A vos parchemins, sous la bougie d'une nuit noire  ...

    et programmez votre article pour le lundi 4 avril  Je suis sûre que ce sera haletant.

    Et pour les jeudis en poésie, de préférence

    Légendes de mer ce jeudi  31

    Légendes sur terre pour le 7."

     

    Note du mardi 5 avril 2011 :

    Honneur à notre matelote de quart !

    Hauteclaire a relevé son propre défi en un triptyque époustouflant.

    Deux psaumes, La Marie-Céleste revisitée et ...

    un tour à la Cour : La Lettre link

    et le lien vers "Fantômes du Trianon" link  qu'elle nous a indiqué.

     

     

    *** 

     

    Luther Redtimber fumait sa pipe en méditant au gré du balancement de son rocking-chair tandis que le soleil disparaissait peu à peu à l’horizon. Tout seul, il était tout seul dans son village abandonné. Cela faisait maintenant quatre ans que les derniers habitants avaient déserté. Même sa femme s’était réfugiée chez les enfants à Wichita, la plus grande ville du Kansas, centre géographique des Etats-Unis.


    Payton avait bien essayé de le persuader de la suivre, puisque la rivière était à sec, plus rien ne poussait, le gibier avait émigré vers des pâtures lointaines et le bétail avait dû être vendu.

      

    [...]

     

    Lena surveillait la cuisson de ses pommes pour se faire une petite compote toute simple et sans sucre qu'elle trouverait à déguster dès son petit déjeuner. Elle cherchait quelle légende elle pourrait bien poster Visage de Dodue editedpour son défi d'écriture du lendemain. Tout à coup, elle se prit à songer à sa Fée Dodue, que son imagination avait créée il y avait déjà plus de quatre ans et qui avait pris tant d'importance dans sa vie de rêve. Une fée qu'elle avait d'abord considéré comme son double ; un double idéal, née jeune femme espiègle (alors que Lena avait largement atteint l'âge dit canonique !), un double aux yeux verts comme elle, mais au visage constellé de taches de rousseur et aux bouclettes à l'avenant.

     

    Fée Dodue avait très rapidement pris de la consistance, au point de ... se matérialiser en secret aux côtés de Lena, quand celle-ci était seule (ce qui était le cas ce soir-là) et, plus extraordinaire encore, de se mettre à vivre son existence propre, de partir en exploration sur le net en entrant dans l'ordinateur de Lena, d'en revenir de plus en plus savante aux côtés de Lena ! Fée Dodue disposait d'une baguette, magique évidemment, comme toute bonne fée qui se respecte et, au début, elle s'en servait pour donner de l'assurance à Lena, pour l'encourager quand la vie lui paraissait difficile, pour lui redonner le moral, donc, si celui-ci virait au noir, agissant comme une sorte d'ange gardien au féminin. Lena et Fée Dodue ayant eu quelques lecteurs assidus, on pouvait aisément affirmer que Fée Dodue leur était devenue légendaire ...

     

    [...]

     

    Puis le balancement du fauteuil se figea. Derrière la barrière, un animal immobile le contemplait. Par sa perception ultra sensible, Luther comprit que c’était une femelle et, en plus, qu’elle pensait ! Une nouvelle vision, Grand-père ? Celui-ci fit non de la tête. Qui était ce grand puma, qui n’en était pas, tout gris sauf la tête blanche et grise à la fois et des yeux rouges cerclés de noir. Un message clair parvint au vieux bonhomme indien, tandis que la longue queue rayée lui faisait des signes comme la main d’un humain.

     

    [...]

     

    Etait-ce sous l'influence de Fée Dodue ? Un jour, d'autres personnages entrèrent en scène, des explorateurs venus d'un autre univers, d'un monde à quarante-sept dimensions. Et il arrivait désormais que le petit appartement de Lena se peuple d'invités, débarquant par téléportation. Bref, Fée Dodue tomba amoureuse de l'un d'entre eux, se maria et s'en fut avec son Baguette de Fée DodueDanilo pour des missions diverses et risquées. Et voilà que Fée Dodue attendait même un enfant, enfin pas selon la méthode humaine traditionnelle -mais c'était une autre histoire- et Lena maintenant considérait Dodue plus comme sa fille que son double ; l'enfant serait son petit-fils !

     

    Lena sursauta en entendant du bruit dans son salon, des pas légers et hop ! la tête de Dodue s'encadra dans la porte de la cuisine !

     

    Lena :

    Ah, c'est toi ! Je commençais à être inquiète, je ne m'expliquais pas ton long silence, depuis plusieurs jours que je n'avais pas eu le moindre petit coucou télépathique de toi !

     

    Dodue :

    Ma chère future grand-mère, j'ai dû prendre mes dispositions pour bloquer vingt-quatre heures terrestres avec toi, plus le temps de te "téléphoner" et ... je voulais te faire la surprise pour le jour de ton anniversaire !

     

    [...]

     

    «  - Tu me vois, Thinking Bull ? Ma Chef n’aimerait pas ça mais elle ne dira rien, au contraire tu l’intéresseras ! Ton Grand-père te fait danser des papillons autour de ton fauteuil ? C’est par la poésie qu’il saisit ce qui se passe ici. Je dois partir, ma mission est finie, mais fais donc une Danse de la pluie, personne ne te verra et tu nous aideras. Mets-y toute ta conviction, le monde va bientôt changer pour toi ! »  

     

    [...]  

     

    Dodue :

    Hmmm, ça sent bon, tes pommes qui cuisent, elle est prête, ta compote ! J'en Visage de Daniloaurai droit, virtuellement aussi, au petit déjeuner demain ? Et dis, qu'es-tu en train de chercher dans ta tête ? Une légende ? Oh, alors je te conseille : La légende de Gasgarina ! Car notre Gasgarina l'est vraiment devenue chez les Redtimber ! Dans le village de Luther, la rivière miraculeusement revenue a redonné toute sa vie au village ; les gens dits raisonnables attribuent le phénomène à l'oeuvre des castors, les gens dits plus ... fantaisistes se posent des tas de questions ; certains se demandent même si Luther ne serait pas sorcier, autant que sourcier ! Mais dans la famille même de Luther, Payton, leurs enfants et les petits-enfants sont au parfum ! Ils ne se lassent pas de prier le vieil indien de leur narrer l'histoire, la "légende" de Gasgarina, qu'ils n'ont jamais vue, eux mais ils y croient. Gascarina le sait pour avoir établi une correspondance avec Luther ; ils conversent parfois en pensée, je crois qu'il n'y a que Payton dans la confidence ! Gascarina n'en est pas peu fière !

     

     

    [...]

     

     Les jours suivants la rencontre avec la belle "lémurienne", Luther se mit à observer autour de lui, tous ses sens en alerte. D’abord il ne découvrit rien, mais il était très patient. Un matin en sortant de sa maison, il sentit de l’humidité dans l’air, alors que le ciel était clément et il comprit que l’événement se préparait. Plusieurs jours après, Luther eut la joie d’être aux premières loges pour la grande scène du final : l’eau détournée de la Dew, après s’être imposée entre les cailloux, les rochers, après avoir évité le piège d’un marécage, après avoir gravi des côtes, esquivé de peu un nid de marmottes endormies, contourné une colonie de fourmis, tout cela sous le guidage discret de Gascarina,  faisait son entrée dans le village de Luther, un petit flot d’abord qui devint vite plus affirmé. Luther qui faisait sa ronde de surveillance et de maintenance la regarda passer, l’air impassible et muet mais, dans sa tête, c’était la fête ! Il se projeta en un éclair dans l’avenir et il est possible de confirmer que le futur lui donna raison, se développant en un bel effet papillon : la végétation repoussa, le gibier rappliqua, plus tard les gens aussi, apportant du bétail et cultivant leurs champs et jardins ; merveilleux pour Luther, Payton se réinstalla dans sa maison et ne le quitta plus.

    Conversation de Gascarina avec sa Chef :
    «  - Chef, j’ai fini, l’opération est en bonne voie ! »

     

    Lena :

    Ma Dodue, mais oui ! Ouf, la voilà, ma légende à moi ! Et quel plaisir de mettre en vedette, Gascarina !

    Nouvelle Dodue plus dodue 

    Dodue :

    Hou hou, Gascarina, peux-tu nous entendre ? Voici le projet de Lena !

     

    Environ dix minutes terrestres après, Gascarina :

    Bonsoir, belles dames ! Mais c'est une joie pour moi et il faut que je sois une légende, que les gens y croient sans y croire et que nos vraies actions restent dans l'anonymat ! Bon anniversaire, Lena. Sache que Luther et Payton t'adressent leurs bons voeux aussi, car je leur ai révélé des images mentales de toi ! Comme l'équipe se trouve très très loin et que les communications comportent toujours un risque, même minime, d'écoutes mal intentionnées, je suis votre seule interlocutrice et à ce titre, je te fais écouter le choeur mental "enregistré" vite fait bien fait par Néan et la bande, en anglais : Happy birthday to you ! Aristide chante faux, exprès ! 

        

    Lenaïg 

     

    En bleu : fragments de l'origine de la légende,

    ou pour savoir en détails comment Gascarina s'y est prise pour déclencher un effet papillon, extraits de mon roman :

    Ils sont là ! Chapitre 8 link 

    Ils sont là ! Chapitre 10 link

     

    Mes dessins ! Maladroits ils sont, mais ce sont les miens ! On peut voir ma Fée Dodue, ainsi que sa baguette, de même que son mari le grand robot Danilo, tous les deux vêtus des combinaisons aux couleurs changeantes des explorateurs venus d'ailleurs !

     

    Quant à Gascarina, elle ressemble assez à ce sifaka de Madagascar (d'où son nom) qu'on peut voir ci-dessous !

     

     

     

    Sifaka de Madagascar

     

     


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  •  rates-de-la-communication--les-incomprehensions-semantiques - www.ithaquecoaching.com

     

    "UNE PETITE REVISION !

    Qui a dit que le français était compliqué ? 

    Voyez par vous-même en lisant ces phrases.                

     

     

    Monde du travail, des techniques,des relations professionnelles ...

    - Je vis ces vis.
    - Ces cuisiniers excellent à composer cet excellent plat.
    - Mes fils ont cassé mes fils.
    - Ils expédient leurs lettres ; c'est un bon expédient.
    - Ils négligent leur devoir; moi, je suis moins négligent.
    - Nous inspections les inspections elles-mêmes.
    - Nous exceptions ces exceptions.
    - Nous objections beaucoup de choses à vos objections.
    - Nous portions nos portions. Les portions, les portions-nous?
    - Nos intentions c'est que nous intentions un procès.

     

    Monde littéraire ...

    - Je suis content qu'ils nous content cette histoire.
    - Nous relations ces intéressantes relations.
    - Nous acceptions ces diverses acceptions de mots.
    - Nous éditions de belles éditions.

     

    La nature, les relations humaines et mondaines ...

    - Les poissons affluent d'un affluent de la rivière.

    - Les poules du couvent couvent.

    - Ces dames se parent de fleurs pour leur parent.
    - Il est de l'est.
    - Cet homme est fier; Peut-on s'y fier?
    - Il convient qu'ils convient leurs amis.
    - Ils ont un caractère violent et ils violent leurs promesses.
    - Ils négligent leur devoir; moi, je suis moins négligent.
    - Ils résident à Paris chez le résident d'une ambassade étrangère.

    Il faut être bon en français, une évidence. "

     

    ***

     services-a-la-personne-cooperative - www.blog.services-a-la-personne.pro 

    L'emploi du pronom indéfini.

    " Il était une fois quatre individus qu'on appelait
    >   Tout le monde - Quelqu'un - Chacun - et Personne...
     
    Il y avait un important travail à faire,
    >   Et on a demandé à Tout le monde de le faire.
    >   Tout le monde était persuadé que Quelqu'un le ferait.
    >   Chacun pouvait l'avoir fait, mais en réalité Personne ne le fit.
    >   Quelqu'un se fâcha car c'était le travail de Tout le monde !
    >   Tout le monde pensa que Chacun pouvait le faire
    >    Et Personne ne doutait que Quelqu'un le ferait
    >   En fin de compte, Tout le monde fit des reproches à Chacun
    >  
    Parce que Personne n'avait fait ce que Quelqu'un aurait pu faire. "

     
    >   MORALITÉ  
    >   Sans vouloir le reprocher à Tout le monde,
    >   Il serait bon que Chacun
    >  Fasse ce qu'il doit sans nourrir l'espoir

    >   Que Quelqu'un le fera à sa place  Car l'expérience montre que
    >   Là où on attend Quelqu'un,
    >   Généralement on ne trouve Personne !
    >
    >   CONCLUSION 
    >   Je vais le transférer à  tout le monde afin que chacun puisse l'envoyer à quelqu'un sans oublier personne... "

    ***

     

    Références des illustrations : album Fantaisies 4, ratés de la communication et Services à la personne.

     

    Je remercie mes correspondants par courriel, notamment Anaëlle, pour m'avoir fait parvenir ces délicieux petits textes de réflexion. Bon week end, bonne lecture à ceux et celles qui passeront par ici.

     

    Lenaïg

     

     

     


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  • Photo de Mamylilou pour le Coucou du haïky - N37-Poisson

     

     

    Haïku

     

    Monde en miniature,

    Poissons dans un aquarium.

    On rêve devant.

     

    Le premier avril,

    C'est la fête des poissons.

    Mais le savent-ils ?

     

    Tout ce petit monde,

    Contenu dans l'aquarium,

    Est-il pacifique ?

     

    Ils en ont tout l'air,

    Non conscients de leur beauté,

    Pour nos yeux ravis.

     

    ***

     

    Tanka

     

    Des orange vif,

    Jaune citron, bleu néon,

    Des plats et des ronds.

    Mais qu'ils sont beaux, ces poissons,

    Illuminant le salon.

     

    ***

     

    Lenaïg,

    captivée par la superbe photo

    Que nous offre 

    Alice  link,

    chez 

     Mamylilou  link 

     

     

     

     


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  •  

    Poizon d'avril ...

     

    Poisson d'avril - boites-a-lettres-autres-insolite-miami-etats-unis- www.photos.linternaute.com 

     

       

     - Poison d'avril ! -

     

     

    Voilà trois ans que Juan « Speedy » Gonzales m’a embauché comme chef de sa sécurité. Je n’ai vraiment pas à me plaindre ; je ne dirais pas que c’est une sinécure, mais j’ai vu des situations mille fois pires. Je n’ai pas à trop me fouler la main : le nom même de Speedy est déjà une protection en soi, je ne vois pas d’individu assez fou pour soutenir son regard, même une grosse légume. Son secret ? Un recensement officieux des richards le classerait dans les dix premiers. Pourquoi officieux ? Ben ma foi, il ne serait pas convenable de crier sur les toits que l’on dirige un cartel de la drogue. Oh, le bougre est plus fin qu’un renard et aucun indice ne peut être directement pointé sur lui ; en outre, il a une armée d’avocats – les uns véreux, les autres non, pour la respectabilité évidemment – à sa disposition, il a des juges dans sa poche, ainsi que quelques députés, et certains policiers reçoivent régulièrement des enveloppes bien garnies.
      

    Comment je sais tout ça ?

    Poisson d'avril - www.coeurd'enfant.skynetblogs.beJe suis tout de même un ancien officier instructeur de l’armée, ce qui veut dire que je suis plus instruit et plus intelligent qu’un adjudant réputé borné et sur qui on a l’habitude de faire des blagues comme sur les Belges. Je n’ai pas les yeux dans les poches et ni les oreilles bouchées par le cérumen. Ce n’est pas que Speedy me témoigne une confiance aveugle, mais un de mes anciens copains de l’armée était affecté dans la section Renseignement et je lui avais soutiré quelques tuyaux sans avoir l’air d’y toucher… enfin, juste par curiosité. Mais en fin de compte, cela m’a été utile, toujours pour satisfaire ma curiosité. Et qui sait, ça pourrait m’être éventuellement profitable…
      

    En y réfléchissant, je crois que le destin m’a pris en affection.

    Quand j’ai été saqué de l’armée à quelques années de la retraite, j’étais au trente sixième en dessous. Oh, c’était dû à une sordide histoire de fesses. Je suis persuadé que c’est ce pète-sec de colonel qui a monté en épingle toute l’affaire ; il ne m’a jamais blairé, il me jugeait trop… brutal.
      

    Une brute, moi ? Je sais qu’on me traitait de « peau de vache »

    derrière mon dos. C’est faux, je suis juste d’une sévérité toute paternelle. Je voulais former de vrais soldats, et si certaines recrues s’étaient… hum, cassé quelques os, la faute en incombait à leur faiblesse, congénitale ou non. Quoi ! Je ne faisais que favoriser la « sélection naturelle » de Darwin. Au cours de mon divorce, l’avocat de ma femme avait produit des photos d’ecchymoses, mais le mien avait habilement argué que cette idiote était d’une maladresse congénitale et n’arrêtait pas de se cogner partout. Quant aux bleus de mes fils, mon bavard avait judicieusement cité : «  Qui aime bien, châtie bien et mon client n’a fait qu’appliquer l’éducation saine inculquée par ses parents. » Une brute, moi ? Soyons sérieux !  

     

    Bref, quand l’armée avait incorporé la gent féminine,

    cela m’avait un peu bouleversé… comme les autres, je suppose. Les instances supérieures de la hiérarchie « déconseillaient » vivement toute relation intersexuelle non officielle… ce qui sous-entendait tout abus d’autorité à des fins libidineux. Cette petite lieutenant n’avait pas été effarouchée par mes avances (je m’étais dit que cela me dispenserait des bordels et me ferait des économies par la même occasion). C’était une affaire très chaude, et les préliminaires torrides avaient fait prévoir une forte tempête. Comme on le sait, en cas de tempête, tous les ports sont bons. Mais malheureusement pour moi, le port en question n’avait encore jamais accueilli de navire et la passe étroite avait été méchamment rabotée par mon bâtiment. Cette garce avait été admise à l’infirmerie en geignant et jurant, et moi j’ai comparu devant le commandant de compagnie. Tous ces hypocrites m’ont éjecté pour avoir « terni » l’honneur de l’institution par mon acte « immoral » et que je pouvais toujours me brosser pour bénéficier d’une honorable retraite. Tout çà pour un truc que tous ces enfoirés ont pratiqué au moins une fois.
      

    C’était alors que Speedy m’avait recruté.

    Il voulait un homme à poigne pour assurer son service de sécurité. Je suis impressionné par son service de renseignement : il savait même qu’à douze ans, je m’amusais à tuer les chiens de nos voisins. Voilà pourquoi j’ai dit que le destin m’a souri. La paie est excellente, voire fabuleux, je peux écrémer à ma guise le personnel (Speedy faisait simplement supprimer les faibles et les estropiés, je m’en doute), et je commande tout le matériel que je veux.
      

    En fait, je me la coule douce.

    Les seuls moments où je dois mobiliser toute mon énergie, c’est quand Speedy doit sortir de sa villa aussi luxueuse qu’immense. Il doit rencontrer des personnalités ou des « émissaires », ou bien présider quelqu’œuvre de bienfaisance, assister à un vernissage… En réalité, il n’a pas vraiment grand’chose à craindre, sauf peut-être de la part de quelque déséquilibré.
      

    Je dois aussi assurer la sécurité de madame et du petit dernier

    (qui, à trente ans, vit encore chez ses parents) au cours de leurs sorties. Les parties qu’ils organisent me font parfois tourner en bourrique, c’est fou ce que les gens sont indisciplinés et d’une arrogance incroyable. Le fils aîné vole déjà de ses propres ailes et dirige une entreprise qui blanchit le blé de papa (ne me demandez pas comment je le sais, motus).
      

    Quant à la villa, c’est une forteresse imprenable.

    J’ai fait installer le nec plus ultra des détecteurs, trois dangereux dobermans sont libérés la nuit, le bâtiment lui-même est truffé de toute sorte de gadgets. Une mouche ne pourrait pas y entrer.
      

    À soixante cinq ans, Speedy ne les fait pas.

    Il est vrai qu’avec tout son pognon, il peut se permettre tous les moyens de paraître plus jeune : sport, massage, traitements coûteux… Son médecin personnel ne mérite pas ses honoraires : même pas un tout petit rhume à traiter, depuis que je suis dans la place.
      

    Alors, jugez de ma stupéfaction

    quand sa femme a donné l’alerte, quand, à midi et demi, Speedy n’était pas encore apparu au déjeuner et que la domestique avait toqué en vain à la porte de la bibliothèque. Il s’était barricadé comme de coutume. Après avoir défoncé la porte, nous l’avons trouvé affalé sur le bureau d’acajou, la tête sur le clavier de son notebook, des papiers répandus à terre. Il avait clamsé. J’ai envoyé chercher le toubib et ai dû raccompagner madame dans sa chambre en pestant in petto : ma chemise est toute trempée de ses larmes.
      

    Chiottes ! Que vais-je devenir ?

    La veuve et son fils n’auront peut-être, sûrement, plus besoin de mes services. Ma cagnotte ne suffira pas à assurer mes vieux jours, et à mon âge, trouver un autre protecteur n’est pas évident. Enfin, on verra.
      

    Surprise !

    poisson d avril - www.pourton.infoLe toubib a décrété que Juan « Speedy » Gonzales n’a pas succombé à quelque AVC, il est mort empoisonné. C’est invraisemblable ! Il a bouffé le même p’tit déj que sa gonzesse et son rejeton. Il garde la clef de son bar et personne n’aurait pu toucher à sa bibine, même pas son fils ; d’ailleurs, il ne boit que le soir ou quand il reçoit des relations d’affaire. Ses cigares sont également enfermés et il n’en a pas fumé. Les fenêtres vitrées sont closes et d’ailleurs, les barreaux extérieurs empêcheraient quiconque d’entrer. La porte de la bibliothèque était fermée à clef, avec celle-ci dans la serrure. La domestique est toujours accompagnée par un de mes hommes, quand elle fait le ménage de cette pièce. Comment a-t-il donc été assassiné ?

     

            
    ***
              

     

    Un contrat au nom de Juan Gonzales.

    Je connais le zouave. Il est soupçonné d’être derrière un important cartel de la drogue, mais il est assez malin pour casser toute piste menant à lui. J’aurais pu m’intéresser à Speedy depuis longtemps, mais l’Éboueur ne travaille pas à l’œil (ou presque jamais). L’occasion se présente donc à Klotz pour son double plaisir : un assainissement très bien rémunéré de la société. Qui était donc assez puissant pour vouloir s’attaquer à ce cachalot ? Une guerre d’influence, un loup aux dents longues ?
      

    Enquêter semble superflu,

    je connais sur le bout des doigts le CV du zigoto. Mais ma curiosité est titillée par le fait qu’on a osé lancer un contrat sur lui. Je fais la tournée des grands ducs et laisse traîner mes oreilles. Des rumeurs, rien que des rumeurs. C’est le plus insignifiant de mes indics qui me fournit le petit détail insolite. Il y a une semaine, des Chinetoques déguisés en touristes se sont baladé en ville. Quoi de plus banal, dirait-on, les Chinois fortunés imitent de plus en plus les Japonais à la découverte du monde. Mais ces jaunes-là avaient de drôles de tatouages sur leur corps. Mon indic qui a pu en voir un torse nu, m’a fait une description qui m’a fait dresser les cheveux sur la tête.
      

    Je contacte Romain et lui fait faire certaines recherches.

    Comme je m’en doutais, ces drôles de cocos sont de la Triade. Mais qu’est-ce qu’ils venaient foutre ici ? Je demande à Romain de jeter un œil dans le réseau de la brigade des stups et d’en extraire les dernières statistiques. Le trafic de drogues asiatiques a subi des revers providentiels (malheureux pour la Triade, bien sûr), grâce à des dénonciations anonymes ; pourtant, le niveau de consommation intérieur n’a accusé qu’un seul pic de manque. Il était clair que Speedy avait joué un tour de cochon aux Yeux Bridés et avait voulu s’accaparer leur créneau. Il ne faut pas mésestimer les Asiatiques et prendre les enfants du bon Confucius pour des canards (de barbarie) sauvages, car il n’y a rien de plus teigneux quand ils ont pigé l’entourloupe. Comme il leur était difficile, voire impossible d’agir discrètement ici, compte tenu de leur physionomie, ils n’ont eu d’autre recours que de s’en remettre à la main d’œuvre locale. Je déduis donc que ce sont eux mes clients.
      

    Je fais un tour du côté de la villa de Speedy. Le problème est intéressant. La forteresse est très bien gardée. Le mur est haut et est électrifié. Neutraliser les chiens n’est pas envisageable : ils portent un émetteur qui signale toute immobilisation anormale. Le plan des gadgets de la villa que Romain a pu pirater est désespérant de complexité ; un moustique ne pourrait pas y voler cinq secondes sans être détecté. Il n’y a aucun point où un sniper pourrait atteindre une quelconque cible dans la villa. Les voitures sont évidemment blindées et seul un bazooka ou un missile serait efficace ; mais l’Éboueur a horreur de ces trucs « grossiers ».
      

    J’assiste à l’arrivée du postier.

    Il glisse le courrier par un trou dans le mur en soulevant un volet métallique ; il n’a pas besoin de sonner, sauf probablement quand il y a quelque chose à signer. Je demande à Romain des infos complémentaires. Speedy va rendre visite, seul, à sa môman dans une maison de retraite de luxe, une fois par mois. La vieille dame écrit à son fils chaque semaine, refusant obstinément de toucher à un quelconque ordinateur. Donc les Gonzales reçoivent régulièrement du courrier, lequel courrier est glissé dans une boîte à lettres que le chef de sécurité vide chaque matin ; il doit examiner tout colis autre qu’une mince lettre pour éviter un quelconque paquet piégé.
      

    Cette nuit du jeudi 31 Mars,

    je m’introduis dans les locaux des postes, guidé à distance par Romain derrière ses écrans. Il ne m’est pas difficile de trouver le pli de Mom' Gonzales adressé à son garnement de fils, grâce à l’informatisation très avancée des lieux. Je gagne rapidement mon labo sous la remise de mon jardin. J’ai étudié la chimie par correspondance, et si je n’ai pas de diplôme d’ingénieur, j’ai été avantagé par des travaux pratiques intenses sur du matériel de pointe financé par mon lucratif « boulot ».
      

    Je dispose déjà d’un poison volatil sous forme de feuilles,

    dans un conteneur étanche. Une fois exposée à l’air libre, la feuille commence à se sublimer et ses émanations toxiques tuent rapidement dans un rayon d’un demi mètre, avant de se neutraliser en quelques minutes. J’ouvre à la vapeur l’enveloppe de maman Gonzales. J’y glisse presto la petite feuille de poison et scelle rapidement la missive. Il n’y a pas suffisamment d’air pour que le processus puisse s’amorcer. Je retourne à la poste remettre le pli en place, grâce toujours à l’aide à distance de Romain.
      

    Poisson d'avril - www.gralon.netLa nouvelle de la mort de Speedy s’est rapidement répandue

    dans le Milieu, et les circonstances horribles et mystérieuses ont frappé d’une crainte superstitieuse une bonne partie des malfrats. J’imagine que les Asiatiques vont essayer de reprendre peu à peu le terrain perdu. Enfin, ils peuvent toujours essayer.
      

    Oserais-je dire à Yvonne qu’un joli petit poisson de papier

    est collé à son dos ? Voilà donc pourquoi ce garnement de Dany avait mis en désordre ses feutres de couleur. En rigolant, je pousse gentiment ma fleuriste vers la porte pour la ramener à sa boutique. En jetant distraitement un œil dans le grand miroir du vestibule, je perçois fugitivement quelque chose au dos de mon blouson.
       — Dany !!! Petit sacripant !...

     

     

     

    - RAHAR -

     

     

    Références des illustrations : voir à "Poisson d'avril" dans l'album Fantaisies 4.

     


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